jeudi 18 septembre 2008
Festival d'Automne flamand
"Atropa", une des trois pièces qui composent le "Triptyque du pouvoir", mise en scène par Guy Cassiers à Avignon, le 10 juillet 2008.
Dans le Monde du 17/09
"Directrice artistique du Festival d'automne, chargée du théâtre et de la danse, Marie Collin fait venir à Paris le Triptyque du pouvoir mis en scène par le Flamand Guy Cassiers - Mefisto for ever, Wolfskers et Atropa -, qui a fait événement au Festival d'Avignon en 2007 et 2008.
Ce triptyque signe une double première : l'ouverture du Théâtre de la Ville à des spectacles étrangers, comme le souhaite son nouveau directeur, Emmanuel Demarcy-Mota ; le choix d'une longue série de représentations - trois semaines -, qui permet à un large public de découvrir un metteur en scène important du théâtre européen.
Comment avez-vous découvert le travail de Guy Cassiers ?
Il y a sept ou huit ans, à l'invitation de Guy Cassiers lui-même, je suis allée voir sa mise en scène d'Hiroshima mon amour, de Marguerite Duras. J'ai beaucoup aimé le spectacle, tout en étant réservée sur la possibilité de le faire "passer" auprès d'un public français. Mais un lien s'est tissé entre le festival et Cassiers. Quand j'ai vu le travail remarquable qu'il a fait sur A la recherche du temps perdu, je me suis dit qu'il fallait absolument faire connaître cet artiste à Paris, mais six heures de Proust, en trois spectacles de deux heures en néerlandais surtitré, pour moi, ça n'était pas pensable.
Après ce deuxième rendez-vous manqué, il y a eu Mefisto, à Avignon, en 2007. Au festival, nous avons senti que c'était le moment juste pour inviter Cassiers. Nous aurions préféré qu'il crée les deux derniers volets de sa trilogie à Paris. Il l'a fait à Avignon cet été. Mais nous serons les premiers à présenter en France les trois spectacles en même temps.
Qu'est-ce qui vous intéresse particulièrement chez ce Flamand ?
C'est un artiste qui travaille à la fois comme intellectuel et comme poète de la scène. Il a une véritable réflexion politique et un langage très particulier, entre le cinéma et le théâtre. Il se sert beaucoup du gros plan, du montage, du flou et du son cinéma. Mais il le fait avec une technique un peu "low-tech", qui est théâtrale.
Sa trilogie est consacrée aux pouvoirs. Dans Mefisto for ever, il s'agit du pouvoir un peu mégalomane d'un acteur qui se croit plus fort qu'un dictateur et qui finalement sera vaincu. Wolfskers met en scène la fin du pouvoir des dictateurs. Atropa rend compte du pouvoir des victimes, ou des victimes du pouvoir - selon la façon dont on le voit.
Trop souvent, vous présentez les spectacles étrangers quelques jours. Pas cette fois. Pourquoi ?
Parce qu'il y a eu les volontés conjuguées d'Emmanuel Demarcy-Mota et de Guy Cassiers, qui est aussi directeur du Toneelhuis, à Anvers. Pour lui, l'enjeu est important. Il peut expliquer au conseil culturel de sa ville, qui lui reproche de faire un théâtre trop élitiste et trop politique, que c'est précisément ce théâtre-là qui est invité trois semaines au Théâtre de la Ville de Paris. Cela dit, c'est un grand pari que fait Emmanuel Demarcy-Mota, et nous avec. Pour Mefisto, qui a bénéficié d'un excellent bouche-à-oreille depuis deux ans, il n'y a pas de problèmes de location. Pour les deux autres volets de la trilogie, ce n'est pas gagné. Nous ferons un bilan à la fin de l'exploitation.
Est-ce difficile de programmer des productions étrangères ?
De plus en plus, et c'est navrant. On se heurte à des questions de disponibilité et d'argent. On aurait voulu faire dix représentations de Platz Mangel, de Christoph Marthaler, et on en fera cinq. Les acteurs du spectacle ne sont pas disponibles. Ils jouent dans de grands théâtres allemands et autrichiens, qui sont des théâtres de répertoire, où l'on pratique l'alternance. Pour l'argent, quand on veut inviter le Berliner Ensemble, la Volkskbühne de Berlin, ou, pire encore, le Burgtheater de Vienne, on atteint des sommes prohibitives. Et enfin, à Paris, pour les partenaires "normaux" du festival, la donne est en train de changer.
Comment ?
Je pense que le Théâtre de la Ville va prendre une place importante dans l'accueil des grands spectacles étrangers, parce qu'Emmanuel Demarcy-Mota a la volonté de refaire de Paris un lieu central pour le théâtre. L'Odéon, exit pour nous, peut-être parce qu'Olivier Py fait beaucoup de choses, ou qu'il est plus intéressé par la création française. Chaillot s'oriente plus vers la danse. Bobigny - un partenaire historique - est limité par des questions financières. Créteil - lui aussi un bon partenaire - a une salle beaucoup trop grande pour certains spectacles. A la Colline, tous les espoirs sont permis avec l'arrivée de Stéphane Braunschweig, qui dirigera le théâtre à partir de 2010. On va donc bouger. Et c'est très bien.
Triptyque du pouvoir. Mis en scène par Guy Cassiers. Du 19 septembre au 10 octobre. Théâtre de la Ville, place du Châtelet, Paris-4e. Tél. : 01-42-74-22-77 ou www.festival-automne.com."
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