29.06.2009 Blog d'une journaliste critique du Nouvel Obs
Sous le soleil de Terzieff, au chateau de Claudel
Au Château de Brangues, demeure de Paul Claudel en Isère, à la Maison du Comédien, chez Maria Casarès à Alloue en Charente: chronique de quelques belles rencontres, sur la route de l'été.
« L'Habilleur » : le règne de Laurent Terzieff(art. du Figaro) spectacle qui s'est terminé le 13/06
Le Château de Brangues, en Isère, que Paul Claudel acquit en 1927 est une vaste demeure qui semble embrasser d’un coup d’œil solitaire la nature environnante. Au bout d’un chemin ombré d’arbres, Paul Claudel repose, lui et « sa semence », selon les mots gravés sur sa pierre tombale qui jouxte, ainsi l’avait-il voulu, la toute petite tombe d’un de ses petits-enfants. Paul Claudel disparu, en 1955, le Château de Brangues a continué sa vie familiale. Vaste famille, en vérité, veillée par Renée Nantet-Claudel, sa fille, par sa petite fille Marie-Victoire Nantet, par trois générations qui ouvrent large les portes du château le temps des « Rencontres de Brangues ». Ici, on reste simple, accueillant. Ici, tout est resté dans son « jus », si l’on peut dire , la chambre de Paul Claudel, sa bibliothèque, la cuisine..Ici, sous les arbres, les mots de Claudel bien sûr, et plus largement celui des poètes ont une ample résonance, et pas forcément sanctifiée. Exemple ? Et bien, cette année, une lecture-concert nommée « les voix de la fureur », un montage passionnant de textes signés Claudel, Péguy et Bernanos.
Oui, Paul Claudel était assez réac ! Heureusement, sa passion des cultures autres, dont l’Orient, l’a sauvé des plus mauvais relents du nationalisme. Mais quel régal que d’entendre la joute de ces trois hommes de leur temps ainsi portée par Philippe-Morier Genoud (Claudel), André Marcon (Bernanos) et Christophe Maltot (Péguy). Et quel beau travail a réalisé, plongeant dans les archives, Gérald Garutti, dramaturge de Christian Schiaretti, directeur du TNP . Ledit metteur en scène est aussi un des abonnés de ces Rencontres puisqu’il préside l’Association pour un Centre Culturel de Rencontre à Brangues. Et puis, la poésie et Schiaretti, c’est une longue histoire : il a crée « Les langagières » à Reims. Un jour de 1995, il a convié à ses cotés, sans plan prémédité, le poète Jean-Pierre Siméon. Ainsi est né, après bien d’autres textes, un superbe « Philocète », une variation sur Sophocle que Laurent Terzieff incarnera à la rentrée prochaine sur la scène de l’Odéon. Et Laurent Terzieff était là, aussi. Et c’est ainsi qu’à Brangues, dans la nuit (froide et humide !) on a entendu un « Philoctète » incandescent, et volé des mots, ainsi ceux-ci : « chassant des bêtes plus maigres que le vent ». Tard dans la nuit, Laurent Terzieff était là encore, pour parler poésie, porteuse de cette lucidité dont René Char disait qu’elle était la plus proche du soleil, a-t-il rappelé. Des soirées comme celles-ci sont des dons.
Alors, revenant de Brangues, on a songé à Maria Casarès, qui dans sa maison d’Alloue, en Charente, aimait s’asseoir sur un modeste banc de pierre aux rives de « sa » rivière qui serpente dans son domaine de la Vergne, qu’elle légua à sa commune après sa mort, en 1997. C’est aujourd’hui La Maison du Comédien. Là aussi s’y tiennent des « Rencontres d’Eté ».. Naturellement, les comédiens y sont rois, et serviteurs des poètes. Le Président de la Maison, le comédien François Marthouret a préparé une « surprise » pour les 10 ans de ces Rencontres d’Eté : un récital « Esot ErikSatie », accompagné au piano par Madeleine Malraux (le 3 juillet). Quant à la suite du week-end (les 4 et 5) on rêve d’en être : David Lescot reprend sa guitare et sa « Commission Centrale de l’enfance », Laurent Roy et Alain Libolt lisent « les années » de Annie Ernaux, les élèves du groupe 39 de l’Ecole du Théâtre National de Strasbourg proposent un « Parcours chanté », la troupe des amateurs de la Vergne « La Cerisaie » de Tchekhov. Un téléphone ? 05-45-31-81-22.
Mais comme on ne peut pas être partout à la fois, on sera (et rendez-vous avec ce blog) la semaine prochaine au Festival d’Avignon.
Mais sur la route de vos vacances, si vous croisez la demeure d’un poète, poussez la porte.
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