Cinéma : « Ad Astra », une odyssée astrale et œdipienne
James Gray envoie Brad Pitt en mission vers Neptune, un voyage qui le conduit sur les traces d’un père astronaute supposé mort.
Par Jacques Mandelbaum
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"Brad Pitt tient le rôle principal dans « Ad Astra », de James Gray, un film qu’il a aussi produit.
Avouons-le, on fut étonné en apprenant que James Gray – styliste néo-classique fiévreux, auteur de films noirs palpitants, propagateur de tragédie grecque dans le septième art et, pour ces quelques raisons au moins, l’un des plus grands cinéastes américains actuels – s’était lancé dans la réalisation d’un « space opera ».
C’est mercredi 18 septembre, en France, que tous ceux qui tombèrent pareillement des nues à cette nouvelle sont invités à y remonter pour juger sur pièce.
On sait combien la catégorie du film spatial est souple. Elle conjoint la pure fantaisie et l’adaptation au milieu interstellaire de genres dûment répertoriés (la guerre pour Star Wars, l’horreur pour Alien) à des chefs-d’œuvre méditatifs de haute volée tels 2001 : l’Odyssée de l’espace (1968) de Stanley Kubrick ou Solaris (1972) d’Andreï Tarkovski.
C’est manifestement à ces derniers que Gray ambitionne de raccrocher la fusée Ad Astra, film produit et interprété, autrement dit rendu possible, par Brad Pitt, lequel, après Once Upon a Time… in Hollywood de Quentin Tarantino, aurait toutes les raisons de se féliciter de son année.
L’acteur y interprète, dans un futur qui se veut proche, Roy McBride, astronaute missionné dans le plus grand secret pour voyager jusqu’à Neptune et y découvrir la cause de l’émission d’ondes électromagnétiques surpuissantes qui mettent en danger la vie sur Terre.
La principale raison de ce choix tient à l’hypothèse émise par l’état-major que le propre père de Roy pourrait avoir un lien avec ce phénomène. Lui-même astronaute réputé, Clifford McBride (Tommy Lee Jones) était pourtant tenu pour mort depuis trente ans, après qu’il avait disparu aux alentours de Neptune lors d’une mission de reconnaissance à la recherche de formes de vie intelligentes aux confins du système solaire. Mais la réception d’un récent message de Clifford a changé la donne.
Magnifiques scènes d’action
Eloigné de son père depuis l’adolescence, lui portant le sentiment qu’un fils peut cultiver à l’égard d’un géniteur ayant toujours fait passer son ambition professionnelle avant sa famille, Roy est devenu lui-même un être froid, raisonné, le pouls bloqué à 80 y compris en période de fin du monde, peu enclin à laisser parler ses sentiments, incapable de nouer des relations affectives viables.
Sa mission vers Neptune sacrifie à quelques magnifiques scènes d’action inhérentes au genre – telles une course-poursuite en rover avec des pirates lunaires ou la découverte en chemin d’un vaisseau en détresse peuplé de singes enragés. Elle emporte aussi avec elle la possibilité, toujours appréciée des spectateurs, d’une pure et simple manipulation au plus haut niveau du commandement après celui du cinéaste.
Plus essentiellement encore, cette mission devient un voyage vers le père. Une odyssée œdipienne qui fait flotter Sophocle dans le cosmos, une psychanalyse encapsulée, guidée par la voix intérieure et omniprésente du fils et par des rétro-images mentales évoquant par fragments l’inaccomplissement de sa vie intime. Certains spectateurs verront là, dans ce motif freudien si ostensiblement noué, sujet à agacement. Le thème de la malédiction père-fils n’est pourtant pas nouveau chez l’auteur de Little Odessa (1994), The Yards (2000) ou La nuit nous appartient (2007). Simplement, sa mise en scène spatiale avec des protagonistes séparés par des mois de voyage et caparaçonnés de combinaisons étanches en atténue la pesanteur charnelle.
C’est donc d’une émotion plus conceptuelle, plus cérébrale, que le film saisira le spectateur. Le sentiment d’intelligence formelle, par exemple, entre la ouate sensorielle qui enveloppe son long voyage et l’engourdissement mental d’un héros qui s’est fermé au monde et est devenu comme étranger à lui-même. Ou cette idée, paradoxale et séduisante, que la prospection du cosmos approfondit davantage le mystère de l’âme humaine que la connaissance de l’univers, qu’en un mot nous serions, sinon seuls dans l’univers, mais à nous-mêmes notre propre infini.
Ces poignantes perspectives philosophiques, enfin, sur la question de la filiation, avec ce père qui est toujours trop loin, reclus, intouchable, incessamment hors d’atteinte… Comme si, nous précédant de toute éternité dans une mort dont il nous abritait en secret, il ne nous en révélait la connaissance qu’in extremis.
Un détour par le vide
Le tour coppolien que prend insensiblement cette traque d’un père qui a rompu les amarres, souligne, si besoin était, non seulement notre fondamentale solitude, mais encore, et pour cause, la sombre impuissance qui nous saisit devant la mort, individuelle ou collective.
L’antienne de l’apocalypse qui menace notre planète exténuée explique à elle seule le regain des (tous remarquables) films spatiaux depuis quelques années. Gravity (2013) d’Alfonso Cuaron, Interstellar (2014) de Christopher Nolan, Seul sur Mars (2015) de Ridley Scott, First Man (2018) de Damien Chazelle, High Life (2018) de Claire Denis.
Tous ont pour point commun non seulement de chercher dans l’espace une terre de rechange pour y prolonger la vie mais encore d’évoquer en arrière-plan un trouble généalogique dans l’histoire de leurs héros. James Gray met ce trouble au cœur du récit et nous invite à envisager le voyage spatial qui en résulte comme un immense détour par le vide destiné à nous ramener à nous-mêmes. Quant à savoir si la vapeur d’eau récemment découverte à cent onze années-lumière sur l’exoplanète K2-18b est de nature à rendre caduc cet humain quant-à-soi, bien malin qui le dira."
ma critique laissée juste après avoir vu ce film dans la salle en IMAX au procédé image et son améliorés du Gaumont Braugrenelle avec supplément de 3€ par personne
Ad Astra avec Brad Pitt c’est-à-dire un beau film moins attractif que le genre science fiction et au delà des frontières de la réalité affective et celle de l’astronomie. On est tellement seuls, tous prisonniers d’images, de souvenirs, de cordons affectifs. Partager ensemble le fardeau est le plus beau combat à mener même au delà du visible et du légendaire qu’est la science fiction de cinéma. Le commerce et ses excroissances révoltantes auraient colonisé même la lune avec toujours ses résistances piratages combats. Et comment accepter toujours le plus effarant combat même en deçà de la planète bleue : le fils contre le père. certes le cinéma américain en est plein même 2001 même Apocalypse Now... La littérature a plus exploré la relation mère fils ou non ? ces combats sont initiaux mais pas indispensables... il suffit de partager ensemble tous les fardeaux. Brad Pitt est extrêmement touchant. Les critiques fades le sont par rapport à la solitude si difficile à épaissir sur terre au cinéma. Ce film on a beaucoup de mal à en sortir.... comme du ventre d’une renaissance espérée
https://www..com/film/Ad_Astra/critique/186520479
Le dernier film de Tarantino est pour moi hors d’atteinte, je n’ai réagi qu’ en sourde et aveugle comme si je lisais cela accompagnée déjà par d’autres yeux et d’autres oreilles, celles, des amateurs cinéphiles inconditionnels de l’époque hollywoodienne et/ou des films de Tarantino. J’ai été impliquée directement : au combat entre Bruce Lee et Brad Pitt, aux extraits de la bande annonce de Mannix. Sinon Leonardo di Caprio Al Pacino l’actrice blonde censée jouer Sharon Tate oui bof ! sauf pour cette dernière quand elle se voit jouer au cinéma sur l’écran, placée seule dans les premiers rangs, avec le public disséminé derrière elle. Et aussi la scène entre Leonardo Caprio et la petite fille de 8 ans sur le tournage de la scène du méchant. Mais c’est Brad Pitt sinon tout le long du film qui m’a permis de ne pas quitter le navire du cinéma, malgré son manque de tangage, pour le sommeil. La fin les variations tarentinesques avec la réalité, moi j’aime cela infiniment. C’est ce que je fais de plus en plus, je vais au cinéma pour aérer le quotidien car la fiction rend la « douleur féconde » et adoucit le caractère. Et puis une mention aussi pour le chien qui ne meurt pas d'avoir mordu les humains, dans le film....
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