mardi 24 mars 2020

"Perdu" : confinée lecture aux tout petits que nous sommes restés et Journal de confinement après 10 jours,


Cette vidéo dure 9 minutes 51... aucune notion du temps qui passe quand on lit à voix haute une belle histoire.


"Lire et faire lire" c'est une association qui bien-sûr a suspendu ses lectures, auprès des enfants, par les seniors dans les crèches, les écoles, les bibliothèques...
Juste avant que je ne commence cette aventure d'échange avec les plus jeunes, après rencontres formation, parrainage avec Jeanne qui allait 3 fois par semaine dans une micro-crèche, visite de la crèche où j'irais ; le confinement suite à la propagation du Corona virus a été décrété.
https://www.lireetfairelire.org/content/epidemie-coronavirus-information-aux-benevoles-43311


Mon Perdu

Entre parenthèses ce sont mes premières réflexions après une semaine de confinement. Je ne sors pas je suis diabétique de type 2. Mon compagnon fait les courses encore à peu près 2 fois par semaine.

(ce retard, ce suspends puisse t'il nous apporter de bons réflexes, car quand j'étais comédienne élève lycéenne j'avais besoin de beaucoup de temps pour me préparer même si j'ai toujours su avec la boule au ventre improviser... les enfants les êtres ne sont pas tous égaux non seulement par l'intelligence mais par leur capacité à aller droit au but à ne pas prendre des chemins de traverse, digresser. On n'est pas obligés de tout réussir et de la même façon?quelle gageure humaine ces mesures de confinement).

(dans les amis qui me donnent de leurs nouvelles un groupe d'amis d'une amie, ils s'envoient des petits poèmes ou haïkus. En voici un

"J’ai regardé par la fenêtre
Bouquets de feuilles en explosion
Et chants d’oiseaux en ribambelle
C’est le printemps"
Et confinée j’écoute encore j’ai écouté sur France-Inter le boomerang en rediffusion de Claude Ponti

Voilà l’homme qui m’a donné envie de rester en enfance. 
Au J10 c’est meilleur, que d’écouter cette émission,encore que d’écouter Julien Clerc. Un professeur de maths quand il s’est aperçu qu’il était gaucher lui a jeté une pluie de craies et ne l’a jamais ré -interrogé de toute l’année. Il demande aussi pourquoi les enfants qui sont très intelligents ne le restent pas... Il demandait à cet enregistrement, l’amnistie pour Jacqueline Sauvage... Cet homme n’a jamais cessé de s’adresser à sa fille. Il dit aussi que les bébés comprennent très vite que ce sont les pattes de mouches écrites dans un coin de l’image qu’on leur lit, parce qu’ils aiment la voix humaine....


Les délices de Tokyo de Naomi Kawase

Nathalie Feyt C’est un très beau film qui explique comment regarder écouter les autres. Alors oui c’est triste et c’est aussi à propos d’une maladie... la lèpre au Japon, mais c’est au delà de toutes les peines... et souvent bien des zones sombres sont en chacun, des terres intérieures handicapant nos vies, on ne peut pas tout réussir. Mais pour aider et vivre mieux il est comme une ressource en soi celle de regarder la lune, les cerisiers en fleurs ou si vous êtes confinés, regarder cuire les légumes .... de les sentir avec tous nos sens.....ouvrez vos fenêtres le ciel est bleu mais il y a de bonnes odeurs de cuisine dans la cour intérieure un puits....

samedi 14 mars 2020

Une belle histoire

Via la Pèlerine des étoiles 
A 40 ans Franz Kafka (1883-1924) qui ne s'est jamais marié et n'avait pas d'enfants, se promenait dans le parc de Berlin quand il rencontra une petite fille qui pleurait parce qu'elle avait perdu sa poupée préférée. Elle et Kafka ont cherché la poupée sans succès.
Kafka lui a dit de le rencontrer le lendemain et ils reviendraient la chercher.

Le lendemain, quand ils n'avaient pas encore trouvé la poupée, Kafka donna à la petite fille une lettre "écrite" de la poupée qui disait : " S'il te plaît ne pleure pas. J'ai fait un voyage pour voir le monde. Je vais t'écrire sur mes aventures."

C'est ainsi que commença une histoire qui se poursuit jusqu'à la fin de la vie de Kafka.

Lors de leurs rencontres, Kafka lisait les lettres de poupée soigneusement écrites avec des aventures et des conversations que l'enfant trouvait adorables.
Enfin, Kafka lui ramena la poupée (en acheta une) qui était de retour à Berlin.

"elle ne ressemble pas du tout à ma poupée", dit la petite fille.
Kafka lui a remis une autre lettre dans laquelle la poupée écrivait : "mes voyages m'ont changée."La petite fille a embrassé la nouvelle poupée et l'a ramené toute heureuse à la maison.



Un an plus tard, Kafka est mort.

Plusieurs années plus tard, la petite fille désormais adulte a trouvé une lettre dans la poupée. Dans la minuscule lettre signée par Kafka, il y avait écrit :

"tout ce que tu aimes sera probablement perdu, mais à la fin l'amour reviendra d'une autre façon."

jeudi 12 mars 2020

Philippe Person prof de théâtre

Pour ceux qui le reconnaissent ... il y a du graphisme sur les murs de l’escalier du Lucernaire.... c'est Philippe Person acteur auteur metteur en scène et prof de théâtre. Il a également été directeur de théâtre, d'ateliers, d'une école pour amateurs et maintenant d'une école professionnelle en deux ans au sein du Lucernaire. 
Qu’est-ce, que sont les profs de théâtre ? Des pédagogues, des comédiens, des metteurs en scène avec un peu d’expérience, des érudits ou des techniciens formateurs à l’intermittence, en un mot des illusionnistes ? Ce sont aussi des personnes comme tout le monde. 
L'apprentissage du théâtre : c'est aussi un apprentissage de confiance en soi, de lâcher prise,  d’aise avec le corps, avec la respiration, pour renaître et sortir la voix, un apprentissage d’acceptation des contraintes, des contradictions : on connaît un texte chez soi et on l’oublie « sur scène » devant les autres. Le théâtre c’est apprivoiser ses émotions et inventorier ses contradictions  : violence et douceur, amour et haine, faire rire et faire pleurer, et toucher à tout  s'instruire beaucoup lire, voyager, aller au théâtre et au cinéma et pouvoir dire "Je suis homme, rien d’humain ne m’est étranger. Montaigne". Le pourcentage de risque, de désillusion est plus fort que la chance de réussite... Oui mais alors ? Alors... c'est utile pour mieux percevoir le non-dit, parler avec une boule au ventre, apprendre que la connaissance d'autrui est infinie, comme sa méconnaissance cela s'appelle aimer et pratiquer le goût du mystère, on ne connait jamais quelqu'un et encore moins un enfant.... 

pour cela un peu de philosophie pour regarder la boussole ; 

mais jouer c’est réactiver l’hypersensibilité et l’extrême pudeur, entrées sorties, c’est travailler sans filets et être sur le fil devant un public et après avoir joué, c’est être à la fois heureux et se sentir seul abandonné comme jamais.... être au balcon des folies, certains s'en prémunissent ainsi, d'autres y sombreraient mais dans les cours, il y a des amis qui ainsi, se dévoilent, on se reconnait et les écoles se multiplient,  car quand on y a goûté au collectif respectueux des individualités, on a du mal à s’en passer... 

La vie est une scène où un pauvre acteur s'agite et s'en va...  la vie n'est qu'un moment.... (d'après Shakespeare);
à trop vouloir en dire on ne dit rien il faut savoir se taire écouter le silence et finir une scène une pièce une improvisation et sortir. Ne pas rater ni ses entrées ni ses sorties.

John Travolta avait le choix enfant soit de faire un sport collectif avec son père soit du théâtre avec sa mère.....Les deux ont un point commun faire équipe pour un match....avec tous. "Un pour tous, tous pour un". Dumas.

« Aujourd’hui on dirait qu’il n’y a au monde que des obsédés sexuels, mais le monde a oublié l’amour. Et pourtant c’est l’amour qui mène le monde, et ceux qui peuvent assouvir autant qu’ils le veulent leurs instincts sexuels préfèrent l’amour. »
Henry Miller 1976 Lettres à Brenda Vénus livre offert par Philippe Person pour mon anniversaire en 1998 alors que nous allions jouer : Tout sauf aimer... création collective...







lundi 9 mars 2020

Lecture : Le roi des cons : Idi Nouhou et 80 étés : Jeanne Herry Théâtre : Derniers jours au Rond Point :

Le bois brut ne prend pas la poussière, ma mère m'avait conseillé de mettre de la toile plastifiée dans mes placards sur les planches et alors pourquoi, n'en y avait-il pas dans son buffet de la salle à manger? J'ai tout retiré chez moi après quelques années... plus de 40 ans et 4 ans après la mort de mon père... Les plastiques empêchent surtout la poussière de se retirer...

On demandait à Tolstoi vous lisez des livres ? Il répondit : non, j'en écris !

Je lis comme je me promène sans aucune obligation comme les recommandations d'un nombre de 10000 pas par jour... qui aurait pu prévoir qu'on en serait arrivé à devenir le comptable de son puits intérieur de son coeur qui bat????....
Je comprends tellement cette phrase attribuée à Tolstoï qui selon Tchekhov notait sur un carnet toute la journée ses pensées : images, réflexions voir La Mouette : personnage de Trigorine...

Le roi des cons : Idi Nouhou éditions CONTINENTS NOIRS nrf Gallimard, fait partie pour moi des livres qui ôtent l'envie d'écrire parce que tout y est...

par exemple :

sur la transparence, passer inaperçu...
p 14
Rakki… Comment la décrire ? Élancée et affichant une fausse maigreur qui occultait d’appréciables rondeurs… Un genre de beauté qui vous révèle votre soif d’amour, ou vous la crée… Une beauté qu’un sourire facile rendait plus irrésistible encore… Un teint inclassable parmi les teints, et que vous jureriez clair au prime abord, rehaussé par les couleurs toujours vives de l’habillement… des couleurs toujours les mêmes, à quelques nuances près : rouge et noir… Un corps, animé par une gracieuse aisance dans les moindres gestes, et éclatant de charme…
Et je l’intéressais, moi, le petit canard boiteux de la séduction masculine ? Moi un homme commun ? Presque invisible au milieu d’un groupe de deux personnes… Ne brillant ni par le teint, ni par la taille… Encore moins par le charme… Je n’étais pas laid ; non ! Une laideur trop criarde est voyante. Trop voyante même. On pouvait en parler après avoir croisé une telle « chose ». Et il y a des laideurs qui sont sublimes à force de relever de l’horreur. Dans un tel cas, on finit souvent par attirer l’attention d’une femme fatale, belle à la diablesse, crainte par les autres hommes, et qui se serait contentée d’une telle horreur. Mais être commun sur toutes les coutures ? Passer inaperçu à force d’être terne et quelconque ? C’est encore plus insupportable… Pire que d’être mort… Un mort ne vit pas. Il est mort. Mais un vivant qui ne vit pas aux yeux des autres, qui est comme transparent, qui est transparent, c’est une première mort pendant la vie…
Et j’intéressais Rakki, moi… ?

Un livre qui nous donne à ressentir plus jeune que soi.... 
 80 étés Jeanne Herry éditions Folio
P31.....38
Je suis brune. J’ai même les cheveux très noirs. Plutôt grande et bien bâtie. Ce n’est pas une belle expression, mais c’est vrai. Je suis solide. Je ne suis pas fine. Il m’arrive de le regretter. Quand j’étais enfant, on m’aurait demandé de choisir entre « fine » et « bien bâtie », j’aurais coché la première case. Pour être plus jolie. Mais je suis contente quand même, il faut plus d’un coup de vent pour me faire tomber. Et personne ne m’a demandé de cocher la moindre case. J’ai le corps de ma vie.
Il y a quelques temps, j’ai retrouvé mon carnet de santé dans un tiroir. En feuilletant les premières pages, je me suis arrêtée sur un graphique où le pédiatre reportait  chaque année ma taille et mon poids. La ligne horizontale désignait les centimètres, la verticale les kilos. Au stylo bleu il plaçait des points et les reliait pour former la courbe : la courbe de mon poids.
De 0 à 10 ans tout va bien. La courbe est régulière, harmonieuse. On voit qu’une enfant a grandi, Et qu’elle a pris tous les ans, en passant, les grammes et les centimètres qu’il fallait. En s’allongeant, elle s’est alourdie. On imagine qu’elle a dû rassurer beaucoup sa famille : Jeanne ne serait ni trop petite ni trop grande, et charpentée mais pas trop. « Jeanne n’aura pas ces soucis-là », pensait le pédiatre ; il serrait la main de maman, il serait celle de papa en opinant du chef, en clignant fermement des yeux. Et ce clignement signifiait pas de problème.
.....
Théâtre 

Les derniers jours à voir absolument pour désengorger les abcès de l’hypocrisie ambiante pour apprendre à mourir pour accéder au sublime malgré tout...
Ma critique sur Billet Reduc 

A quels moments on a le plus besoin d’amour quand l’extrême maladie fait rendre l’âme ? Oui mais au théâtre comment le dire comment faire part des derniers jours ? En sublimant en époussetant toutes les surfaces en ayant des comédiens aguerris comme chez eux dans l’apesanteur. Notamment celui au corps jeune et frêle fascinant de blancheur, à l’homme vieillissant à la crinière blanche qui époussette tout pour y mettre de la légèreté, un peu des cieux sur le noir plateau mais qui par le théâtre fait tout exister. Comment faire pour accompagner, pour apprendre à mourir, personne ne vous le dit, ce théâtre là, il purifie le sujet. Il va falloir reparler d’euthanasie, on n’est donc pire que des chiens...Tous nos chers fantômes resurgissent, mais on chante on danse aussi. Une jeune femme à la cithare comme Orphée chante si bien et Pénélope elle fait le récit du concret de tout ce qui nous rend si faible à la fin de corps et d’esprit. Elle nous tient la main sur son cœur. Jamais je n’ai vu cela encore au théâtre ?! -mais si, dans les tragédies grecques ! -Oui mais là c’est dans une autre langue ! -oui mais ça a la même dimension, grâce à la beauté de la mise en scène, légère comme  »les ailes du désir«  Si on pleure ? Oui car la beauté surtout en ce moment, ça re-afflue... Et merci d’être si fidèle aux comédiens par delà la mort. Merci d’avoir réanimé mes chers fantômes !


vendredi 6 mars 2020

Mine de rien

Mine de rien, un film historique, social du pays minier des deux genres à tous les âges sans en avoir l’air... pour tous les combats, les collectifs. C’est une belle réalisation  avec quelques bases :- des formidables acteurs (Héléne Vincent, Rufus) une histoire avec de multiples personnages chacun à une histoire : certains certaines sont très touchants touchantes incarnés incarnées. Ce film surfe sur notre époque de communications tous azimuts. Comment intéresser des adolescents à autre chose que leur portable ? Que faire de nos fantômes pas riches  pas « à la mode »(expression de mon époque.)
Que c’est bon de se retrouver ensemble, pour faire chacun dans ses hésitations, ses désirs, ses échecs, ses timidités, avec la pudeur des hommes et avec la volonté, le désir, la singularité des femmes à tous les âges, à tous les postes dans la vie sociale, amoureuse jusqu’à veuve retraitée Alzheimer...
Certes ce film ne ressemble pas à l’idée qu’on se fait des comédies sociales anglaises mais justement c’est plus émouvant. 
Bon la salle au Gaumont-Parnasse était presque vide (4 et nous deux) alors je vais semer par tous mes réseaux, le désir d’aller voir ce premier film à plusieurs, avec tous ceux qui savent qu’à plusieurs, en choeur, en groupe, en troupe, en syndicat, en collectif, solidaires à sauver la planète et le plus grand nombre ici et maintenant avec de la délicatesse pour la mémoire le passé.....
merci aussi à Marie Sauvion d’avoir défendu relevé une phrase d’un Russe qui sur internet veut créer un parc d’attraction à Tchernobyl... Oui merci car on a ri encore plus....  c’est à des petits moments qu’on rit sourit sans éclats....et Viva toutes les reparations les reconstructions !!!




La recette du petit ecolo serein mais pas contre quelques précautions ! Pour le gel anti-bactérien pour les mains via La Vie Claire.... ceci est une info pas une pub....

Pour continuer à aller au ciné au théâtre dans les librairies à l’Opera aux concerts sortir pour se cultiver rester serein altruiste ne pas se replier, à tous les âges de la vie se rencontrer, car le futur est devant nous comme me disait un petit gamin de 10 ans en marchant avec moi dans la rue .... 
 Je vous ai mis cela la recette si vous ne trouvez pas de gel pour les mains parce qu’hier au cinoche on n’était que quatre  avec nous deux alors que j’avais réussi à sortir mon Chéri de son fauteuil avec le chat sur les genoux et la tablette en mains ....
Une des réponses : Marine Auglas
En cas de pénurie de gel (et plus écolo !)Recommandé par un pharmacien : Alcool modifié + Gel Aloé Vera + qq gouttes HE de tea tree ( puissant bactéricide .. ms en effet les HE à utiliser avec précaution avec les enfants ,,)  Alcool modifié seul est déjà une bonne barrière , l'aloé juste pr éviter d'irriter la peau ,, bien sur à utiliser surtout à l'extérieur , chez soi on peut continuer avec le savon !😉

mardi 3 mars 2020

Le fantôme d’Azyadé

Cet été j’ai eu des regrets de n’avoir pas vu plusieurs spectacles en Avignon comme tous les ans, mais celui là particulièrement. Il y a des pages,  des oeuvres de la littérature que j’ai survolées ou oubliées en partie, mais j’en ai gardé un souvenir comme une pépite qui brille encore : Pierre Loti. -En fait il n’est qu’un monument d’une certaine nostalgie d’un empire colonial avec ses protectorats ?!
-C’est un autre Claudel mais non de la diplomatie, lui de l’armée française !? 
C’est un orientaliste, un homme épris de la sensualité, en quelques mots, il fait tout resurgir de nos sens !? Il est tel un poète monstre marin, un demi-dieu récoltant toutes les sensations : les sensuelles et les esthétiques, avec la bande son...
Et à propos du fantôme d’Aziyadé, c’est tout cela, qui est restitué dans ce spectacle, je sais c’est fini au Lucernaire, j’ai attendu la dernière, mais je suis, j’étais toujours en retard à mes rendez-vous amoureux et je vis d’ailleurs avec le seul l’unique qui a su m’attendre....au deuxième RDV...

Dans ce texte, il y a les personnages, la voix de Xavier Galais, qui re-sculpte nos rêves à partir de ces mots et pour moi, de mes souvenirs de cette ville : Stamboul, Istanbul, si présente dans le bruit des vaguelettes sur la coque du bateau pour traverser l’immense fleuve du Bosphore, on se croirait à la mer ! Qui peut connaître parfaitement cette Babylone ?
Le pêcheur d’Islande (succès de Pierre Loti), écouté et vu cet été au Festival de Saint-Céré avec ses filets dans la si belle mise en scène d’Éric Perez resurgit. 
Mais là dans ce spectacle, ce qui est réconciliant c’est que « les morts et les vivants ne s’épousent-ils pas » comme chantait Barbara. J’ai revu tous mes morts et cela vous ôte des larmes, o combien adoucies, et aussi mes amours perdues : tous les Dom Juan même s’ils sont adorés sont des traîtres ? 
Quelle relation égotiste déclenchée par le théâtre mais qui répare et réouvre vers tous les ailleurs, tous les possibles....a même la bande son de notre vie. Écouter dans la presque pénombre le bruit d’un fleuve...(moteur d’un bateau mais pas seulement) mélangée à la voix de l’acteur et aux mots de l’auteur : quel plaisir d’entrer comme encore ce nouveau monde celui de l’après mort....



Extraits de ce spectacle puisque c’était la dernière, quand je pense que j’aurais pu rater cela.
Je crois aussi que c'est un très beau texte à travailler dans un jeu extrêmement sensible dénué de tout affect humeur émotion dans un jeu désincarné au delà des sentiments habituels, du jeu dramatique théâtral avec un micro "une mise à nu"comme le faisait si singulièrement Xavier Galais pour rendre "la douleur féconde" comme écrivait Maria Casarès.

p 28 à 31 (édition les cygnes)
« D’un geste machinal, pour me découvrir comme on fait sur les tombes chrétiennes, je porte la main à mon front, puis je la laisse retomber… J’oubliais quel costume j’ai repris pour venir ici : le fez turc ne s’enlève jamais, même pas pour prier Dieu. Et je me penche sur le marbre, d’un bleu éteint. cherchant son nom parmi les inscriptions d’or que je ne sais pas déchiffrer.
Tous ces gens qui me regardent, tout ce groupe tout cet appareil presque théâtral. Il aurait fallu pouvoir venir seul.
...
–Je viendrai seul te voir pauvre petite, je passerai la matinée de demain avec toi.
...
Quand un amour a grandi et s'est élevé jusqu’à des aspirations vers d’éternelles durées, Et que nous avons pourtant pris conscience que l’avenir ne sera jamais, on a besoin de jeter les yeux en arrière, le présent paraît insuffisant, on essaye de reprendre le passé. C’est ainsi chez nous tous.
...
Seul maintenant, je chemine à cheval au milieu de ses Landes funéraire, seul sous ce ciel bas et obscur, seul aussi loin que je puisse voir, seul infiniment.
...
J’attache mon cheval aux branches d’un cyprès. Je m’approche. Un peu de vent se lève, semant sur ce pays des morts des gouttes de pluie fouettante. À l’orientation de la borne, je sais la position du corps chéri qui est enfoui sous la terre rousse, Et je m’étends doucement, et j’embrasse cette terre au-dessus de la place où doit être le visage mort.
–Tu comprends que je t’aime Asiyadé puisque j’ai fait, pour te retrouver, ce long voyage.
Je sens que nous sommes là, tout près, voisins, séparés seulement par un peu de cette terre dans laquelle on l’a couchée sans cercueil. Nos corps sont de nouveau presque réunis. Maintenant  Asiyadé est vivante. Je revois son sourire, son regard profond sur le mien, son regard des derniers jours ; j’entends sa voix, je retrouve les insaisissables choses d’elle que j’ai adorées.
Alors rien d’autre n’existe plus, ni le grand décor, ni les ambiances étranges ; il n’y a plus rien qu’elle-même. Et je pleure à chaudes larmes, comme j’avais désiré pleurer.
... 
après une partie des saluts et des applaudissements Xavier Galais s’est avancé et a dit ces derniers mots :
Dans mon enfance, je me souviens d’avoir lu l’histoire d’un fantôme qui venait timidement le soir appeler de la main les vivants. Il revint ainsi pendant des années jusqu’au moment où quelqu’un ayant osé le suivre, on comprit ce qu’il demandait et on lui donna satisfaction.
Ce rêve angoissant qui pendant tant d’années m’avait poursuivi, ce rêve d’un retour à Stamboul toujours entravé et n’aboutissant jamais, ce rêve ne m’est plus revenu depuis que j’ai accompli ce pèlerinage.
Ce rêve était sans doute l'appel du fantôme d'Asyadé, auquel j'ai répondu et qui ne se renouvelle plus.»