mardi 13 février 2007
Le quotidien le petit monde du théâtre la Mouette qui meurt ou pas... Juliette Gréco, aimer ... Valentin et les autres
Aimer, séduire, être aimé, que devenons-nous d'autre ? de quoi donc avons nous peur ? et qu'est-ce qui nous anime pour réchauffer, sculpter, changer la vie ... chanter dans la pièce d'à côté, ne plus se sentir si seul et si destructible...
Je pense en écoutant la radio ce matin à créer un spectacle avec plein de personnes cachées, d'acteurs amateurs masqués auquel répondrait un grand personnage de théâtre avec entre autre ce fameux monologue de la Mouette de Tchékov...
Car hier j'ai entendu dans mon bureau une femme que j'aime bien pour son caractère trempé, sa joie d'exister, d'avoir un ami, une grande fille, de parler haut, de cuisiner une poule au riz, de d'exprimer par une originalité d'habillement, une soif de personnages, un besoin de fiction, d'aller vers les autres telle qu'elle est... Je l'ai entendue dire sérieusement : "je déteste les gens du spectacle ..." avec la même défiance que l'on affiche pour les politiques, sans aucune réserve, sans aucune excuse pour défendre les saltimbanques... les musicos... les théâtreux.
Cela m'interpelle une fois de plus, c'est en tel décalage avec les hommes et les femmes de théâtre que j'ai pu rencontrer : "les détester..." et ce matin il y a Madame Juliette Gréco qui dit combien elle a peur quand elle va chanter sur scène, elle emporte des objets : petit nounours qu'on lui a offert, quand elle a si peur,elle ne sait plus très bien pourquoi elle chante, pourquoi on joue on monte sur les planches.
Elle voudrait tellement donner aux gens ce qu'ils sont venus chercher... elle travaille, chante tout le temps dans sa tête avant, pour contenir sa peur... elle a peur comme au premier jour, comme toute personne qui se rend à un rendez-vous amoureux, elle veut séduire elle veut aimer et être aimée, surtout être belle être bien être elle-même en accord avec sa "plus belle histoire d'amour" : le public, comme chantait Barbara... Ma grande longue "Dame brune".
En voyant Madame Ségolène Royal sur les petits écrans avec son petit tailleur rouge aller sur scène pour son discours de plus de deux heures devant 15.000 personnes, je l'ai trouvée touchante entre trac (tract) et conviction ...
Alors bien-sûr tout ne se limite pas aux entrées sur scène, il faut rester sobre, prêter l'oreille et pouvoir ressentir profondément quand on est spectateur, l'art d'être spectateur, l'art d'aimer, d'écouter les autres, qu'on soit public, militant, enfant, parent, lecteur, élève, amant amoureux...
A ce propos, j'ai un mot à dire, je reviens à ce spectacle autour de la Mouette de Tchékov appelé "On ne met pas un fusil chargé sur la scène si personne ne va s'en servir" ce spectacle que j'ai revu, dont les représentations étaient offertes et que je vous ai fortement conseillé, il était hébergé à la fondation Biermans-Lapôtre. Car, jusque là les gens de théâtre, ceux qui ont des lieux ne s'étaient pas encore déplacé pour "On ne met pas un fusil chargé sur la scène si personne ne va s'en servir"... trop long le titre ou trop loin ? c'est quoi cette salle ? mais mes amis, les créateurs, ils cherchent toujours à se produire dans des endroits des salles des fêtes des hangars, ils n'ont pas d'arrogance, ils aiment, ils s'aiment Catherine PIÉTRI ET Fréderic CONSTANT, ils ont tout fait, tout reconstruit, des traductions à la scénographie originales aux costumes incroyables choisis par les deux filles Muriel Delamotte et Anne Deschaintres et avec l'autre comédien Guillame Junot... ils ne renoncent pas. Quand elle dit, Catherine PIÉTRI : "Je suis une mouette..." quand dans ce long monologue elle exprime l'infinie tristesse, sa déception quand au travail même de l'actrice : Nina, et quand à la vie, elle a perdu son petit enfant... eh bien ! c'était un moment unique de chaleur intense où j'ai pu éclater en sanglots intérieurs, elle l'a si bien joué... et ce monologue est si rare à jouer... et si rarement bien joué.
Eh bien dans le public ce soir là, il y avait une professionnelle : une secrétaire artistique d'un grand théâtre, elle est partie à l'entracte. D'un pas précipité avec un visage fermé... c'était un spectacle offert, Madame Incroyable ! On reste jusqu'au bout ou l'on part en disant pourquoi on n'a pas aimé, à l'assistante des relations publiques, qui coure toujours après ces programmateurs blasés et politiques. Ils sont très clairsemés ceux qui se démarquent qui déjà se déplacent, "chez ces gens là" on cause pas avec les inconnus et on n'aime pas...
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Alors je pourrais vous convaincre de surtout quand vous avez la chance de toucher à cette planète, celle des gens du spectacle, car c'est une chance un peu comme celles différentes mais extirpantes, privilégiées, d'être riche ou d'avoir un enfant, d'être en couple : le jour de la St Valentin, ne toisez, ne méprisez personne, ne crachez pas d'injures aux corps fatigués des rejetés, des incultivés des ceux qui n'ont pas eu la chance, découvert les moyens de l'Espoir. Ne fabriquez-pas l'aigreur, la haine ou ce mot à toutes les sauces : la fracture.
Et vous les Cassés les Rejetés les Exceptés, saisissez la main d'un gentil, qui se rappelle tous ses fous rires comme tous ses chagrins ... et faites vous respecter bien-sûr quand ça vaut le coup, car sinon c'est tellement d'énergie pour presque rien... "Il n'y a plus rien" ? Chapeau bas Monsieur Léo Ferré... En passant, j'ai entendu quelque part, quelqu'un qui disait qu'à écouter Ferré on savait tout de la politique... Non ça vaut le coup de réagir de se rebeller, de la ramener le plus souvent, car cela sculpte l'intérieur, l'espoir, la reprise, la révolte... On n'est pas obligé de connaître la Mouette de Tchékov mais on n'est pas non plus obligés de détester l'art abstrait, la Mode, les livres, le théâtre, le cinéma...
Pas non plus détester les petits riens le kitsch le pas beau les romans photos... à ce propos je suis allée voir au ciné : Odette Toulemonde et ?! Eh ! ce n'est pas de la démagogie ni du simplisme ni du cliché, c'est une fantaisie interprétée par des grands acteurs français et cela fait du bien comme un Pagnol avec des brins de comédie musicale, c'est un roman-photo qui cherche un chemin celui de la réconciliation à soi aux autres à la lecture. Monsieur Emmanuel Schmidt, Monsieur Albert Dupontel, Madame Catherine Frot vous m'avez fait autant de bien que les clowns quand j'étais petite. - C'est maladroit ? - Pas tant que cela et je m'en fous ! c'est un premier film original, mais ce n'est pas rien et je vais m'en faire des ennemis en clamant que j'ai beaucoup aimé ça m'a réchauffé... du haut en bas et vive la fête à tous les Valentins...
Juste un bémol à tout cet exhibé encore... Je m'accroche à ce micro ordinateur depuis des années, car il ouvre tant de fenêtres mais je ne progresse pas vite.
Je voulais conclure pour boucler que les gens du spectacle n'en déplaise à ma collègue y compris les musicos, sont des passeurs, ils ne sont toujours là que de passage, une incroyable force une chaleur qu'ils vous communiquent et qu'ils vous retirent. Juste à ce moment là on les déteste, on se déteste de ne pas savoir apporter tant de chaleur, car nous alors, juste à ce moment là , on ne partirait pas. Mais si ! car le plus rude apprentissage au spectacle mais des plus importants, je le répète toujours, ce sont : les entrées et les sorties.
Comme au Canal St Martin, les saltimbanques sont repartis ; Augustin Legrand a repris son avion, mais le temps avant, le temps de la chaleur humaine déclenchée, le temps du spectacle de la revendication affichée de ces enfants de Don Quichotte, ce temps là, il a fait bouger les choses : le quotidien possible de chaque humain SDF à commencer par son droit au logement.
Les gens du spectacle quelqu'ils soient, par leur spectacle ou par leur personne, il faut s'apprêter à les quitter quand ils sont là...
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