mardi 14 avril 2015

Smoky le chat, elle qui m'a accompagnée pendant 15 ans, est morte à 19 ans

Je vais raconter ton histoire ou du moins un gros morceau, l'époque où tu es devenue ma compagnie. C'est intime, tu faisais partie de moi, de mes repères à sourire, tu étais mon lien à l'enfance puis quand j'ai rencontré Pascal, tu étais notre lien à plein d'échanges, à faire passer de l'affection futile, naturelle, plus que maternelle, par la communion avec tes ronrons. Ton regard était grand rond et fixe. Tu savais vraiment poser ton regard longtemps sur nous, comme si nous étions plus qu'un détail, un décor.

d'abord quelques photos
les coussins, tu les as tous essayés, un sourire.

A Créteil

La gueule chez toi !

En Dordogne dans la mi-temps du lit

dans l'Igloo

sur le rebord de la fenêtre, tous les voisins te voyaient

au retour des vacances

Quand ton regard se posait sur Pascal

Dans le transat sur le balcon en vacances pas loin de Figeac

un amour de chat qui sent si bon

Retour à l'Igloo

un peu de lait

Avec les peluches pour me faire plaisir

ton couloir griffoir et l'assiette à chat offerte par Grégory
on fête ma retraite !

la plus animale des deux, ou la plus intelligente ?

ce matin ça va moyen

Boire l'eau fraîche dans une coupelle sur le rebord de la douche, un plaisir

ton dernier coussin

le couloir inoccupé

Notre 1ère rencontre dans une association, c'est à dire un immense balcon loggia appartement, consacré à une vingtaine de chats, gardés par un chien à 3 pattes petit bâtard aux yeux tendres qui prenait à peine le temps de pisser quand on le promenait, pour remonter au plus vite garder ses chats... Ce chien et deux humains, une femme exténuée par les corvées de son Cat's Paradise, avec aussi beaucoup de plantes vertes et une jeune fille au pair qui murmurait aux oreilles des chats.


Tu étais planquée sur une chaise, rangée sous une table ronde et tu dormais dans un coussin pelucheux. Les autres chats dont les plus sauvages longeaient les murs, grimpaient aux arbres à chats. Ton profil psychologique me fut énoncé : abandonnée par une anglaise qui après un séjour en France retournait en Angleterre et t'avait laissée aux bons soins de cette association pour échapper à la quarantaine encore en vigueur à cette époque là pour tous les animaux venant de l'étranger. Bien avant la vache folle, évidemment.


La femme la plus âgée m'avait précisé que tu étais très affectueuse et que tu ne supportais pas trop tes congénères au point que tu avais été confiée un temps à une femme qui avait déjà une chatte persane, pour une période de repos-vacances, et depuis ton retour tu étais fort mécontente. Beaucoup de détails me sont restés, comme ton agressivité avec la personne la plus âgée et ta douceur avec la plus jeune. Je t'ai regardée, souris surement, caressée à peine et je suis partie dans le reste de l’appartement pour voir d'autres chats, dont un très jeune de 6 mois, dans la chambre du fond, Gagarine qui lui semblait beaucoup plus sportif. Et j'ai entendu un grognement très sourd, je me suis retournée, tu m'avais suivie... comme si tu ne supportais pas que j'en regarde d'autres. Tu avais compris que j'étais le moyen pour sortir de là au plus vite. Ah deux détails qui m'avaient fait sourire la dame qui t’avait gardée seulement en pension, avait dit que tu aimais te regarder dans les glaces et que tu avais tout fait pour la séduire ainsi oubliée, reléguée, la chatte racée.

Après la mise au point, des détails très rigoureux de l'adoption, accord fut pris pour le lendemain : ils viendraient chez moi, t'apporter avec le panier-coussin, vérifier aussi l'habitat ;  par exemple que je n'étais pas au sixième étage avec un balcon sans grillage de protection, car contrairement à ce que l'on dit : les chats ne retombent pas souvent sur leurs pattes.  Rdv fut pris aussi pour un  contrôle chez le véto et avec accompagnement et prise en charge du vaccin de rappel. Tu avais comme mal dans le haut du dos dès que l'on essayait de te caresser à cet endroit, tu te retournais pour griffer ou mordre.
Tes préférences gourmandes à l'époque : les escalopes de dinde...

Les premiers jours tu restais planquée sous le lit, mais tu venais manger régulièrement et acceptais les caresses sous le cou. Quand ces dames sont revenues te chercher pour t'emmener chez le vétérinaire, tu es devenue une bête furieuse, tu crachais même sur la jeune femme.  Tu n'avais rien au dos que de la rancœur contre l'espèce humaine et ce réflexe de te rebiffer quand on te touchait le dos a très vite disparu.  J'ai du partir quelques jours et je t'ai confié à mon meilleur ami et homme de théâtre, tu dormais dans son lit, petite maline ! et il avait dit de toi que jamais il n'avait connu un chat aussi affectueux. Très vite et pendant des années tu as accepté les gardes, gardiens, gardiennes, avec plus ou moins de gentillesse en exceptant petit à petit, les maisons où il y avait d'autres chats...  alors tu te terrais dans un coin et n'allais manger que la nuit.

Je me souviens d'une tournée plus longue avec un stage que nous donnions aux élèves du Lycée Français d’Istanbul. Pendant cette longue période tu étais chez une personne que je ne connaissais pas, adresse donnée par l'amie du metteur en scène, car dans ces bateaux de tournée de théâtre on résout  tous les problèmes, pour que les personnes soient le plus tranquille, cad ensuite les meilleurs sur scène ou en tant que directeurs  et/ou profs de stages. La jeune femme t'avait beaucoup appréciée, elle te filmait, te racontait plein d'histoires dont chaque soir sa journée en te gardant dans les bras.

Quand je suis revenue te chercher, les premiers contacts furent très froids, tu ne me regardais même pas. Samia me dit c'est parce que je suis là, je vais vous laisser toutes les deux, parlez-lui... Et je me souviens qu'au bout d'un moment, tu es venue vers moi, pour te faire caresser en avançant ta tête de côté.

Sinon bien sûr, je t'ai emmenée partout, nous nous sommes promenées combien de fois ensemble dans les campagnes, je t'ai perdue quelques rares fois, dont une célèbre où tu avais glissé dans le soupirail d'une cave de maison de maître, en Bretagne, mon beau frère avait dit : elle ne peut être que dans le château. Nous, nous logions à côté dans la petite maison du jardinier. Ah quand je suis rentrée dans cette immense cave, pleine de chaises empilées, comme tu a bondis vers moi avec un miaulement hurlé des plus forts, comme tu en avais le secret.

Nous avons fait ensemble deux fois le festival d'Avignon, d'un studio la 1ère fois nous avons évolué vers le moins, avec un toute petite chambre kitchenette* et Pascal était venu passer une semaine, heureusement pendant les italiennes, nous allions tôt le matin dans la cour.
*(parce que la 1ère fois j'avais pris à ma charge cette location pour être isolée et pouvoir me reposer aussi, car je jouais pendant mes vacances et retournais après directement à l'autre vie avec bureau=boulot alimentaire. La 2ème fois la location étroite mais comme une roulotte de saltimbanques m'a ravie et elle était aux frais de la Compagnie)
On pourra dire que tu m'as entendue jouer, déclamer, répéter des millions de mots ; pour ceux de Racine dans la piété d'Esther, tu venais, j'étais dans la garrigue chez nos amis du Sud, te rouler à mes pieds et un papillon noir était, lui aussi attiré, car il s'était posé sur ma tête. J'avais un jeu animal, végétal, minéral à la fois, du moins c'est ce que je cherchais.

Lors du 1er séjour en Avignon en tant que comédienne, j'allais te chercher des crevettes surgelées en tractant, à l'autre bout de la ville. Tu en aimais qu'une sorte "Leader Price". Et le jour où le martinet est tombé dans ce petit puits de lumière bétonné, entre les immeubles, près de la fenêtre de la chambre. Je l'ai récupéré, tu miaulais dans l'autre pièce.  Avant que je comprenne que c'était un martinet, avec l'aide des personnes d'Avignon et non pas une jeune hirondelle tombée de je ne sais quel nid.  Les martinets ne peuvent pas se relancer, il faut les y envoyer  au ciel, quel cri il avait lancé. Avec toute la troupe, au courant de l'histoire, ils l'avaient appelé Maurice et me disaient chaque jour alors  comment ça va Maurice et Smoky ! sous-entendu, pas encore dévoré l'oiseau par le chat ! Quand je partais jouer ou tracter, je mettais Maurice dans la chambre et toi dans l'autre pièce. Un homme m'avait dit dans Avignon que "pour les chinois" un oiseau qui rentrait dans une maison, c'était signe de quelque chose, quelque chose de bon. Ce signe c'était toi et non pas le martinet.... C'est tellement l’occasion d'échanger des petits détails, de parler en souriant que d'avoir un chat. Et puis comme disait Pascal, c'est bien le chat d'une comédienne, elle s'exprime beaucoup. Avec les années tu as multiplié, décuplé les variations de tes miaulements.

Et quand nous sommes allés vivre à Créteil au début de notre relation avec Pascal, l'essai fut concluant, il y avait un balcon et une baignoire et cela te suffisait à élargir ton éventail de possibles, alors que moi, Paris me manquait terriblement jusqu'aux commerces du quartier.

Ton histoire s'est arrêtée en Dordogne 6 mois après la mort de mon père et 7 mois après ma mise à la retraite. Je t'avais demandée en quelque sorte de rester avec moi, pour tourner définitivement ces pages.
Je sais qu'il n'y a pas de dieu des chats, mais tu aurais pu me le faire croire, car sans toi l'appartement nos deux pièces et la salle de bains où a toujours trôné ton bac à litière, semblent plus grands, mais surtout inoccupés....

Le message adressé à tes amis... par mail
Smoky ne donnera plus de ses nouvelles elle avait une tumeur qui lui mangeait  les os de la tête. Elle s'est endormie. Comme elle était mal ces deux derniers jours. Pascal et moi l'avons emmenée chez un veto d'ici, en Dordogne à une dizaine de Km pour une dernière balade... Je suis triste mon amie chat de 16 ans devenue notre compagne Smoky à nous deux depuis 12 ans. Tant d'images ronron-nées. Je tenais à vous embrasser pour me donner du courage, les bestioles et leur maîtres.
Sur FB(voilà j'y souris à FB)
les deux crabes l'un sur son dos et l'autre sous le front lui fermait presque l’œil droit

Nathalie Feyt : Smoky le chat n'est plus avec nous
7 avril, 19:39 · J’aime

Annie Guillotin : je compatis !!!!!
7 avril, 23:43 · Je n’aime plus · 1

Vicki Schneider : Je suis désolée.
8 avril, 00:50 · Je n’aime plus · 1

Martine Gastelais : C'est bien triste.
8 avril, 07:42 · Je n’aime plus · 1

Pierre Kandel : Ah merde... Je suis de tout cœur avec vous, c'est triste, triste, triste.
8 avril, 08:29 · Je n’aime plus · 1

Catherine Vézier-Lepêtre : Mince. Il doit s'en passer de belles choses au paradis des chats en ce moment!.. le nôtre est parti aussi le mois dernier...
Bon courage ma cousine.
8 avril, 08:52 · Je n’aime plus · 1

Severine Dvsm  : Je pense à vous... chat, chien, peu importe, les animaux en général sont des bêtes à chagrin... je compatis à votre douleur...
8 avril, 09:31 · Je n’aime plus · 1

Pierre Kandel : Ce sont tous les papillons et les souris du paradis qui vont être bien embêtés maintenant ! Et puis qu'il ne se soucie pas de Tom qui y est depuis 12 ans, il ne s'intéressait pas vraiment aux matous !
8 avril, 09:49 · J’aime

Nathalie Feyt : elle est en lévitation entre Terre et cat´s dog´s Paradise, elle en a du monde à saluer, le serrage de pattes va durer une bonne partie du mois... Mais ce qui compte c'est l'amitié sans les mots... entre espèces différentes je sais qu'elle a fait des émules même parmi les plus jeunes alors qu'elle était vieille. Je pense tout particulièrement à Anouch et Hippolyte. Les bestioles de Cie, c'est triste parce qu'ils font partie de nous...
8 avril, 09:56 · J’aime · 1

Nathalie Feyt : Oui Pierre mais elle préférait les chiens aux chats elle a mis des lustres à s'intéresser à ses compatriotes. La scène la plus drôle c'est ici(en Dordogne), quand je l'ai vue, il y a plus de 15 ans, gober une petite libellule et forte de mon autorité à aimer par moments la terre entière y compris les insectes, je lui crie Smoky, non ! elle a rouvert son museau et d'un coup d'ailes la libellule bleue est repartie. Sinon les insectes d'accord, sauf les moustiques.... Poor Thing elle avait des origines anglaises, enfin... sa 1ère maîtresse mais qui l'avait laissée dans une association : l'école du chat avant de rentrer dans son île qui a l'époque laissait les animaux en quarantaine.
8 avril, 10:08 · J’aime · 2

Patrick Vallee bises
12 avril, 14:40 · Je n’aime plus · 2


Depuis j'ai effacé tous mes SMS sur mon portable, dont les réponses à cette annonce un peu ridicule, dans ce monde vu enfin, dans son entier, aimer pleurer un chat alors qu'on assassine impunément tant de gens. Effacer les messages de nos téléphones, mettre à la corbeille les mails, comme on brulait les lettres des amours les plus belles, pour que personne ne puisse tomber dessus.
"L'amitié permet d'accepter de se laisser modifier sans l'intervention de Dieu", ai-je entendu à la radio propos tenus par Philippe Val, qu'il fallait retrouver le goût de l'amitié. L’amitié d'avec un chat permet d'être en amitié comme avec une grande partie de soi reconnue par ses seuls yeux. Et d'éloigner tous les drames... à quelques mètres, car le chat veille ou ronronne, il ne dort jamais contrairement aux apparences ...


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