mercredi 16 novembre 2016

En préparation de la lecture dont le thème est : la littérature engagée






Premier message publié sur FB : C'était hier soir à la librairie : Au plaisir des yeux, il y avait quelque chose d'indéfinissable qui passait nostalgie utopie vivre avec tous les autres accueillir l'étranger poésie et un engagement total espoir de toutes les voix de tous les cœurs de toutes les oreilles... mon Cheri lui n'a pris que deux photos de moi... Mais d'autres vont arriver. Merci à Anne Guyot et Anne Sophie et aussi à la mairie du XIV : nous y étions tous à part entière grâce aussi à des auteurs comme Daniel Pennac Dany Laferriere Louis Aragon Léo Ferré Olympe de Gouges Annie Ernaux Georges Brassens Victor Hugo Mahmoud Darwich  Jean-Marie Pelt et Pierre Rabhi et pour finir le chant des partisans version Leonard Cohen (chant et guitare Jeremie Droulers, la video https://www.facebook.com/anne.sophie.7146/videos/10153893077616697/)
...et le mot de remerciement si bien écrit de notre super-libraire même si ça énerve un peu la joie des autres en ces jours de novembre si petits gris... et j'aime les escargots.
Merci
Merci à Madame le maire et à toute l'équipe qui l’entoure pour son initiative qui a permis de faire vibrer encore les mots, de faire vivre encore la culture, de penser que cela est possible, que nous sommes encore capables de dire, de lire de chanter et d'être émus
Merci à mes clients qui sont venus écouter car les textes ne sont rien si personne ne les reçoit, et qui ont échangé avec nous des sourires et des larmes... ou presque
Merci à tous les participants quel que soit leur rôle car sans eux rien n'aurait été possible
A Nicolas qui a fait quelques courses pour qu'on ait tous à boire
A Valérie et son fils Théophile qui ne sont plus de simples clients mais qui ont mis toute leur âme en donnant leur voix
A Anne-Sophie et Anabel qui ont "sauvé" la soirée un vendredi soir chez moi entre un verre de Cheverny et un ordinateur.
A Christian que je ne connaissais pas et qui a voulu participer à nos lectures avec sa belle voix de comédien.
A Nathalie qui est une amie de longue date et qui s'insurge contre toutes les injustices, contre le conformisme et la privation de liberté, qui aime les particularités de chacun, les générosités de chacun, les coups de gueules de certains.
A Jérémie pour qui les mots, leur force, l'idée de la liberté, l'âme humaine a tant d'importance qu'il les chante.
Et à Mohammed qui est bien plus qu'un client ordinaire qui est comme le colibri de Pierre Rabhi il vous laisse toujours un air dans la tête, une chanson pour l'âme et le cœur car il contient tout une sagesse qu'il aime transmettre.
Enfin merci à tous ces auteurs, femmes et hommes qui ont dit, écrit, chanté avant nous afin que vienne un monde plus juste.
J'espère vous revoir vite pour une nouvelle aventure
ah, merci aussi pour toutes les photos....


Tout d'abord il y aura d'autres textes dont celui de Victor Hugo, Le dernier jour d'un condamné à mort...
Chacun des lecteurs choisit ....
Mes propositions sont celles-là, pourquoi pas Gottingen ?

"Il n'y a plus rien" texte poème de Ferré sur tout fout le camp les poètes etc---

Il n'y a plus rien

Écoute, écoute...
Dans le silence de la mer, il y a comme un balancement maudit qui vous met le cœur à l'heure, avec le sable qui se remonte un peu, comme les vieilles putes qui remontent leur peau, qui tirent la couverture.
Immobile... L' immobilité, ça dérange le siècle.
C'est un peu le sourire de la vitesse, et ça sourit pas lerche, la Vitesse, en ces temps.
Les amants de la mer s'en vont en Bretagne ou à Tahiti...
C'est vraiment con, les amants.
 Il n'y a plus rien

.........................
Camarade tranquille, camarade prospère
Quand tu rentreras chez toi
Pourquoi chez toi ?
Quand tu rentreras dans ta boîte, rue d'Alésia ou du Faubourg
Si tu trouves quelqu'un dans ton lit
Si tu y trouves quelqu'un qui dort
Alors va-t'en, dans le matin clairet
Seul
Te marie pas
.........................
Le désordre, c'est l'ordre moins le pouvoir!

Il n'y a plus rien

Je suis un nègre blanc qui mange du cirage
Parce qu'il se fait chier à être blanc, ce nègre,
Il en a marre qu'on lui dise: " Sale blanc !"
..............................

Si tu savais ce que je sais
On te montrerait du doigt dans la rue
Alors, il vaut mieux que tu ne saches rien
Comme ça, au moins, tu es peinard, anonyme, citoyen !
..................................................

Les mots... toujours les mots, bien sûr !
Citoyens ! Aux armes !
Aux pépées, citoyens ! A l'amour, citoyens !
Nous entrerons dans la carrière quand nous aurons cassé la gueule à nos aînés !
Les préfectures sont des monuments en airain
Un coup d'aile d'oiseau ne les entame même pas, c'est vous dire !

Nous ne sommes même plus des Juifs allemands
Nous ne sommes plus rien
Il n'y a plus rien
.......................................................
Moi, je suis un bâtard.
Nous sommes tous des bâtards.
Ce qui nous sépare, aujourd'hui, c'est que votre bâtardise à vous est sanctionnée par le Code civil Sur lequel, avec votre permission, je me plais à cracher, avant de prendre congé.
Soyez tranquilles, vous ne risquez rien
Il n'y a plus rien
Et ce rien, on vous le laisse !
Foutez-vous-en jusque-là, si vous pouvez,
Nous, on peut pas.
Un jour, dans dix mille ans,
Quand vous ne serez plus là,
Nous aurons TOUT
Rien de vous
Tout de Nous
Nous aurons eu le temps d'inventer la Vie, la Beauté, la Jeunesse,
Les larmes qui brilleront comme des émeraudes dans les yeux des filles,
Le sourire des bêtes enfin détraquées,
La priorité à Gauche, permettez !
Nous ne mourrons plus de rien
Nous vivrons de tout
Et les microbes de la connerie que vous n'aurez pas manqué de nous léguer, montant de vos fumures
De vos livres engrangés dans vos silothèques
De vos documents publics
De vos règlements d'administration pénitentiaire
De vos décrets
De vos prières, même
Tous ces microbes juridico-pantoufles
Soyez tranquilles,
Nous avons déjà des machines pour les révoquer
NOUS AURONS TOUT
Dans dix mille ans.



et/ou "Mourir pour des idées" de Brassens  
Mourir pour des idées, l'idée est excellente
Moi j'ai failli mourir de ne l'avoir pas eu
Car tous ceux qui l'avaient, multitude accablante
En hurlant à la mort me sont tombés dessus
Ils ont su me convaincre et ma muse insolente
Abjurant ses erreurs, se rallie à leur foi
Avec un soupçon de réserve toutefois
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente,
D'accord, mais de mort lente
Jugeant qu'il n'y a pas péril en la demeure
Allons vers l'autre monde en flânant en chemin
Car, à forcer l'allure, il arrive qu'on meure
Pour des idées n'ayant plus cours le lendemain
Or, s'il est une chose amère, désolante
En rendant l'âme à Dieu c'est bien de constater
Qu'on a fait fausse route, qu'on s'est trompé d'idée
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente
................
Encor s'il suffisait de quelques hécatombes
Pour qu'enfin tout changeât, qu'enfin tout s'arrangeât
Depuis tant de "grands soirs" que tant de têtes tombent
Au paradis sur terre on y serait déjà
Mais l'âge d'or sans cesse est remis aux calendes
Les dieux ont toujours soif, n'en ont jamais assez
Et c'est la mort, la mort toujours recommencée
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente
O vous, les boutefeux, ô vous les bons apôtres
Mourez donc les premiers, nous vous cédons le pas
Mais de grâce, morbleu! laissez vivre les autres!
La vie est à peu près leur seul luxe ici bas
Car, enfin, la Camarde est assez vigilante
Elle n'a pas besoin qu'on lui tienne la faux
Plus de danse macabre autour des échafauds!
Mourrons pour des idées, d'accord, mais de mort lente
D'accord, mais de mort lente

Annie Ernaux nom d'origine Duchesne est née en 1940, à 6 ans 1/2 sa soeur est morte de la diphtérie le 14 avril 1938.

Ensuite ce sont des citations de son journal d'écriture : Écrire la vie.

"Ce photojournal ne constitue pas une "illustration" de mes livres.... Il n'est pas non plus l'explication d'une écriture mais il en montre l'émergence... Il faut je crois le considérer comme un autre texte, troué, sans clôture, porteur d'une autre vérité....
"Écrire n'est pas pour moi un substitut de l'amour mais quelque chose plus que l'amour ou que la vie".....

"Brusque ressouvenir d'une scène oubliée, une humiliation effrayante. Octobre 57, la Saint-Luc, la nuit un samedi. Je me promène dans la foire avec mon père, mon oncle Bernard et ma tante Marie-Louise, à jeun tous deux, heureusement. Et voilà que surgissent Gérard P. et un autre type de l'École d'agriculture. Ils vont nous suivre tout le temps en ricanant. Ils se marrent, c'est clair parce que ma famille ressemble aux familles ouvrières de cette époque, dans une petite ville de province, des ultra-péquenots pour eux (les parents de G. P. sont profs, à Nancy, ou Troyes ? Et ils le font en toute impunité puisque je ne peux pas venir vers eux, leur parler, leur dire "ça suffit". Impossible à l'époque, dans mon milieu, d'avoir l'air de connaître ces garçons. De toute façon, ils diraient que je suis cinglée. Je me souviens combien ce fut long, ce fut horrible, deux petits mecs laids, des gnomes à lunettes, à 10 mètres constamment. Eux de "bonne famille". Je revois la gabardine beige de P., l'autre, je ne le vois plus. Ma tante, sa dégaine, ses cheveux blancs coupés courts, tout juste si elle n'avait pas sa blouse de travail. Bernard l'appelait Maman ou plutôt "manman". Mes souvenirs de foire quelque chose hors de la vie  ...." 
21 juillet 2002


Sans m'en rendre compte, j'élargis le fossé entre mes parents et moi, mais ils me sont nécessaires et, à cause d'eux, je serais capable de beaucoup de choses, comme si toutes ces souffrances qu'ils ont subies, leurs humiliations, je voulais les prendre à ma charge et les venger. Si j'ai écrit, c'est un peu à cause d'eux mais ce n'était pas le roman qu'il fallait, je recommencerai, des nouvelles sans doute. Pourquoi depuis toujours, ai-je eu envie de faire le mal et par ailleurs je souffre toujours. J'ai peur, parfois comme aujourd'hui, "le scrupule".  
4 avril 1963



Depuis deux mois, lui et moi ne nous sommes plus revus - cette chose finit par ne concerner que moi. Que devenir, moi qui ait tant aimé la liberté.
décembre 63

J'attends toujours demain je retournerai chez la faiseuse d'anges puisqu'elle n'a pas "réussi".
17 janvier 64 

Soirée avortement sur Arte. Revoir Gisèle Halimi, c'est revoir ces années où nous étions encore "coupables", "salopes". En face, la représentation du Vatican, yeux clairs, image atroce de la haine de la vie, de la liberté, l'Église offrant son visage réel :"La femme veut être comme les hommes mais la femme est faite pour avoir des enfants" etc...
26 février 1993

La Passion selon saint Matthieu de Bach. Je suis bouleversée, c'est toute ma vie ici, l'art et la mort. Je suis si sûre  qu'en février 64 a eu lieu pour moi une expérience unique. Je ne sais pas si les mots sont à la hauteur, dire cela est vouloir dire l'au-delà. En même temps quelle joie profonde, comme d'être sauvée, en entendant cette Passion. Rien ne compte plus, c'est le temps retrouvé, la vraie vie.
17 décembre 1999

"Tout le passé est nécessaire pour aimer le présent."....
octobre 68

Pour moi écrire serait un "mieux être" comme si ma personne dans le monde où elle se meut n'avait pas d'équilibre ou d'épaisseur, comme si les choses m'étaient étrangères, ou pis menaçantes.
Rien pour moi n'a de réalité, ni de métier, ni les autres, sauf ce qui est attachement presque animal, enfants par exemple. Mais tant que la recherche n'aura pas abouti dans une oeuvre complète, achevée, ce ne sera que feuilles détachées de moi, rien d'essentiel. Ai-je seulement envie de parler de moi maintenant? Écrire comme les peintres font des natures mortes et y ajouter le monde - par surcroît. Ce qui refuse bien entendu le personnage - et même le "je".
5 janvier 70

Hantée par la phrase de Breton, "S'il pouvait faire du soleil cette nuit."
Soleil rouge. J'attends "le mot qui cognera à la porte".
12 mars 1972

Tous mes voyages maintenant se superposent, simples images sans réelle signification. Ce matin je me suis dit que je n'avais plus qu'un très vague souvenir de ma chambre au Novotel de Sofia, en 87.
mai 1998


Ce sentiment que j'avais si fort, après le départ de S., que notre couple continuait d'être quelque part, comme autrefois je croyais que la fille de Rome 63 (moi) était toujours là-bas, et les amants de Venise (Philippe et moi) dans cette pension de Zattere, pleine de lierre. Mais je le crois toujours. Il n'y a pas de différence ici entre ma vie et un roman : les personnages continuent de vivre quelque part. Nous passerons sur la terre... Ma douleur, mon émotion, en revenant à Venise, viennent de ce que je ne peux pas revivre, être en 63, je ne peux pas relire ma vie...
4 janvier 1993

Ce soir dans le centre ville, sous un passage non loin de Tarte Julie, un homme est couché les pieds sur une baguette de pain. Il semble dormir, ou bien il est dans le coma. Des femmes autour. La patronne d'une boutique de fringues appelle les pompiers, Une femme "il est sûrement drogué". Je dis que ce n'est pas une raison pour le laisser là. Quand je reviens de la Fnac, les pompiers arrivent avec leur mallette, disent à un africain tout en blanc, en gandoura, "circulez y a rien à voir". Ils secouent l'homme allongé. Accablement, horreur, envie de pleurer. Ce sont tous les hommes ivres morts de mon enfance qui sont revenus, tout le malheur, la débine, l'impossibilité de survivre pour certains. La douleur jamais guérie d'avoir vu des jeunes gens tituber dans la rue pendant que je révisais mes leçons. 
1990

Je ne sais si Éric va partir ce week-end aux USA. Seuls mes enfants sont capables de me donner cette angoisse viscérale, cette hantise qu'il leur "arrive quelque chose": ce sont les seuls êtres pour lesquels j'ai l'impression que j'accepterai de mourir à leur place.
mai 96

Les choses qui m'arrivent, au moment où je les vis s'écrivent toujours déjà à l'imparfait.
21 juin 2001

Je ne travaille pas sur les mots, je travaille sur ma vie.
6 août 1990

Et si croire que je suis venue au monde pour écrire était une pure construction ? Au fil des années ?"
décembre 2001




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