Texte et récit ´Olivier Steiner publié sur FB
« Noli me tangere, Marilyn
En 2009 j'ai fait ce voyage à LA avec mon amoureux de l'époque, c'est ainsi qu'un 5 août au matin je suis allé au Westwood Memorial Cemetery, où avait lieu une cérémonie dans cette même petite chapelle dans laquelle son cercueil reposa... c'est là que j'ai rencontré des gens, notamment Georges Barris, son véritable dernier photographe et ami... et je suis rentré à Paris avec cette photo de la plage après le bain, un vrai tirage encadré, venant d'une galerie de Beverly Hills... Je regarde souvent cette photo, en vrai elle vibre d'une façon si particulière... je me suis si souvent approché de ce regard, à la fois perdu et net, dans le vague et clair comme un ciel d'azur, complètement perdu et comme touchant une sorte d'éternité retrouvée au beau milieu d'un paradoxe sublime... que dit-il, ce regard ? Qu'appelle-t-il ? Que cherche-t-il ? Je crois que j'ai écrit le texte du Ravissement de Marilyn Monroe pour répondre à cette photo, ces questions, pour essayer de la rejoindre. Car il y a là, il me semble, une réponse sous forme de silence que je cherche désespérement pour ma vie même. C'est la mort bien-sûr, qui se profile à mesure que le jour tombe, mais c'est aussi quelque chose comme se tenir vivant au coeur du monde, encore et toujours, pour toujours. C'est ça, Marilyn, un coeur du vivant, qui bat toujours, qui résonne encore dans le monde entier. Mais attention, aucune nostalgie chez moi, et même ces années 50 et 60 américaines ne m'intéressent pas tant que ça. Ce que je vois, qui m'intéresse, que j'attends, que je cherche, c'est Marilyn aujourd'hui. Ce qu'elle annonce. Ce dont elle est le nom. Ravissement. Je n'ai trouvé que ce mot en l'empruntant à Duras. Et je n'ai pas non plus tout compris, loin de là. Pourquoi elle persiste autant par exemple, pourquoi elle et pas une autre ? En quoi elle ? Mais c'est bien. Je n'ai pas fini. La recherche n'est pas finie. C'est bien, c'est du voile dans les voiles du désir. Mais je crois qu'une partie de la réponse fut là dans les yeux humides de ce petit monsieur de 80 ans, Georges Barris, ce monsieur tout ému, un peu vouté, qui m'avait dit ce jour-là : "Elle était si gentille"... Il avait dit cela tout doucement, en détachant chaque mot comme si c'était la première fois qu'on disait ça de quelqu'un, avant de baisser les yeux, de sourire tristement et de laisser toute sa place au silence : sacré. Comme est sacré ce même silence qu'il me reste et nous reste à écrire. Ce même silence qui plane au-dessus des vagues dont elle sortait, Eve surgie des eaux, en prière. »
Comment se protéger de l’adversité !? Non je ne suis pas inquiète de me trouver comme dans un vertige à la lecture du livre du ravissement de Marilyn, d’Olivier Steiner pour le texte et d’Anne Gorouben pour les dessins peints au crayon graphique. L’identification procède d’une drôle de chimie, pour un personnage une actrice ou par exemple à un ou une de nos grands-parents : P 41 « Whitey commence par légèrement brosser les sourcils pour accentuer leur implantation en accent circonflexe. »
P 45 « Sur la pelouse à côté de la chaise longue, au bord de la piscine ovale, deux animaux en peluche, un petit lapin blanc et un bébé tigre. »
P 95 « Maf n’a jamais jamais raconté sa vie, mais il aimait beaucoup sa maîtresse qui le lui rendait bien Maf de son vrai nom Mafia Honey, petit bichon maltais né dans le Sussex, élevé et sevré par la mère de Nathalie Wood, avait été offert par Frank Sinatra à Marilyn pour la consoler de sa rupture avec Arthur Miller. Maf n’aimait pas beaucoup Eunice Murray, celle-ci l’installait dans le garage la nuit pour que ses éventuels aboiements ne réveillent pas sa maîtresse. Mais il ne manquait pas de confort, il dormait sur un manteau en poil de castor, cadeau d’Arthur Miller que Marylin ne s’était jamais résolu à jeter. Maf en a tellement vu et entendu qu’il aurait pu écrire une biographie pleine de révélations croustillantes, mais il ne l’a pas fait car il avait trop de respect pour Marilyn. Mais s’il l’avait fait il aurait commencé ainsi : « ma maîtresse était la seule personne humaine capable de chuchoter une exclamation ! »
Voilà j’ai fini le livre ; pourquoi ne l’ai je pas lu, plus tôt parce qu’il n’était pas édité, écrit, sorti de la fusion émotionnelle entre lui et elle…. Soit un fantôme mais les fantômes sont vivants en nous. Et avec les dessins d’Anne Gorouben brumeux voluptueux grisés déchirants. Depuis si longtemps après sa mort à Marilyn. Je n’aurais pas regretté de m’être arrêtée en chemin dans la carrière de comédienne.. Je ne supporte plus quand on me présente comme comédienne. Je suis une comédienne ratée et qui a arrêté de jouer depuis 16 ans . Je me souviens quand je jouais et travaillais toujours dans les bureaux d’assurances, en doublon pour payer mon loyer (le Théâtre m’ayant permis que d’avoir plus de dettes et de bénévolat) j’ai rencontré dans un autre service embauché comme stagiaire, un jeune homme qui avant était apprenti comédien au cours Florent et qui m’avait dit avoir arrêté, car il ne supportait plus sa sensibilité exacerbée il avait besoin d’une vie normale et plus intermittente et précaire…. Une vie de mort vivant par les contrastes les entrées les sorties, sorties vécues comme un exil.
Olivier Steiner Marie Hasse et Anne Gorouben
Maude Sambuis
Les dessins exposés lors de la dédicace signature des Mots à la bouche https://motsbouche.com/13-beaux-livres
Photo de Maude Sambuis
Et si je vous disais que je vais le relire et à voix haute pour mon chat Dora qui aime comme tous ceux que j’ai eu jusque-là quand je joue répète ou fais la lecture à voix haute. Il est important de sentir son public et de ne pas aller jusqu’au trop plein au rassasiement…… le laisser par exemple écouter comme par inadvertance.
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