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Petite
promenade avec Michel Fau au grand
pays du Théâtre
Propos
recueillis par Frédéric Franck, au
Théâtre de L'Œuvre le jeudi 8 mai 2014
Depuis
que nous travaillons ensemble, je me suis enhardi parfois à vous proposer des
textes à jouer et vous les avez toujours refusés. Je n'en prends bien sûr pas
ombrage et je crois même que j'apprécie ces refus à leur juste prix. Vous savez
toujours très précisément ce que vous voulez faire et aussi ne pas faire. Tout
ce que nous avons fait ensemble est venu de vous et de vous
seul. Je m'y suis associé. Qu'est-ce qui vous décide à vous engager dans un
projet ? Vous êtes l'interprète de tous les spectacles que vous montez. Faites-vous
d'abord un choix d'acteur ou de metteur en scène lorsque vous optez pour une
pièce ?
Ce n'est pas
faux ce que vous dites et en même temps, ce n'est pas
tout à fait vrai. Je me souviens d'une pièce d'Ewdard Albee que
vous m'avez faite découvrir. La Chèvre.
Mais
vous ne l'avez pas montée !
Non,
mais je compte le faire ! C'est une pièce que j'aimerais bien
monter un jour, et jouer surtout. Ce sont les textes que j'ai
envie de jouer, davantage que les rôles. En fait, j'ai deux faibles : j'ai
un faible pour le théâtre du 17e, pour l'alexandrin,
c'est pourquoi j'ai monté Racine et Molière, et j'ai un faible
pour les auteurs oubliés, les auteurs méprisés comme Montherlant ou même
Guitry, dont on avait choisi une pièce peu connue. J'ai
envie de monter Roussin, Pagnol et
Marcel Achard. Certains auteurs sont méprisés parce qu'ils
ne sont plus à la mode et non pas à cause de leur valeur artistique. Pour
monter une pièce, il faut à la fois que j'ai envie de faire entendre le texte,
et il faut que mon imaginaire y trouve son compte. Je ne suis pas comme
certains metteurs en scène qui montent une pièce pour en donner leur vision. La
question que je me pose est « comment peut-on le mieux faire entendre
cette pièce, et comment peut-on être le plus proche de cette écriture et du
style qu'a voulu l'auteur ».
Même si après j'exagère certains traits.
D'Ibsen
à Guitry à la Madeleine, de Montherlant à Molière à L'Œuvre, de Racine au
Festival de Figeac à Orton à la Comédie des Champs-Elysées, jusqu'à Récital emphatique, votre diversité et
votre liberté d'inspiration sont saisissantes. Cherchez vous à surprendre ?
Pour Le Misanthrope je ne me suis pas dit : on va faire un manifeste pour
sauver le lyrisme, le baroque et l'alexandrin, mais
inconsciemment on le fait. C'est pareil pour le Récital. C'était quelque chose de complètement gratuit, je pouvais faire
ce que je voulais et c'est devenu un hommage au théâtre et à l’Art, et
un spectacle très drôle surtout. Mais je n'ai pas fait ce spectacle
parce qu'après Racine, il fallait que je fasse un truc
rigolo.
C'est
très récent et c'est grâce à vous, je fais ce que j'ai envie de faire, ce qui n'est
pas très courant. J'essaie d'écouter mon imaginaire et mes
fantasmes. C'est prétentieux mais je pense souvent à
Fellini ou à Picasso ou à Wagner et à tous ceux qui leur disaient qu'il ne
fallait pas faire ceci ou cela. À chaque fois que j'ai fait un spectacle, des
gens m'ont dit qu'il ne fallait pas le faire. Si je
les avais écoutés, je n'aurais rien fait. Je ne pense pas avoir le
souci de surprendre ou de choquer. D'ailleurs je ne sais jamais
comment les spectacles vont être reçus.
Dans
quelles filiations d'actrices s'inscrivent selon vous Audrey Tautou et Julie
Depardieu ? Dans quelle filiation d'acteurs aimeriez vous vous situer vous-même
?
D'abord il
faut parler d'Audrey Tautou parce que c'est un cas dans le paysage.
C'est elle qui m'a redonné envie de faire de la mise en
scène, c'est une des meilleures partenaires que j'ai eue, et j'ai travaillé
avec de très grandes actrices. Audrey a fait un travail formidable sur Maison de poupée, d'une
très grande précision, quasi-musicale. À mon avis c'est une très grande
actrice, mais pour elle le plus important c'est d'abord la
vie, l'art aussi évidemment mais l'art ne passe pas
avant la vie, donc elle tourne peu, elle
travaille peu, elle est rare. Elle pourrait être dans la lignée à la fois de Gaby Morlay et
elle me fait penser à une chanteuse d'opéra qui s'appelle
Teresa Stratas, une très grande actrice qui avait fait
notamment Lulu à l’Opéra de
Paris et La Traviata avec
Zeffirelli. Je la compare à une chanteuse parce qu'elle a la virtuosité
de ces gens-là. Elle me fait penser à un petit animal
noir, sombre et en même temps elle a un côté femme-enfant qui fait énormément
fantasmer les gens.
Ce
que j'aime chez les acteurs avec qui je travaille, c'est
la recherche de la créature. La créature peut être Geneviève Page comme Audrey
Tautou, ou Gaspard Ulliel. C'est plus important
pour moi que d'avoir un acteur habile, un faiseur, quelqu'un
qui n'a que du talent, ce n'est pas
intéressant. J'aime bien les gens qui ont un mystère et qui
font délirer l'imaginaire duspectateur
et, je pense qu'Audrey c'est une machine à fantasmes, c'est pour
ça qu'elle est un peu à part.
Julie
Depardieu c'est un autre cas, mais c'est un cas
aussi. Julie a quelque chose qu'ont très peu d'actrices
aujourd'hui, c'est qu'elle n'a pas peur de jouer la Lolita, la
futilité féminine, qui est quelque chose d'interdit, de
censuré maintenant alors que ça existe et que ça existera toujours et il y a
beaucoup de rôles qui le demandent. C'est ce qu'elle faisait très bien dans Nono, alors que c'est très
difficile de jouer les femmes chez Guitry, et c'est ce qu'elle a fait dans Célimène. Je
pense qu'il faut être très intelligent et avoir un
regard très pointu sur l'humain pour arriver à faire
cela. Elle n'a pas peur d'être vénéneuse, pas peur
d'être naïve non plus. Cela raconte une certaine pureté et c'est
là où elle rejoint Yvonne Printemps ou Arletty.
En ce
qui me concerne, souvent quand j'aborde un rôle, je le fais réplique par
réplique. Parfois il y a une référence à un acteur par réplique, je me dis tel
acteur le ferait comme ça. Ce n'est qu'un théâtre de références et de plagiat.
Sur le Récital mes références n'étaient que
des actrices évidemment, et des chanteuses d'opéra.
C'est un repère pour moi. C'est une histoire de forme
et de musique, et puis de sentiments humains. Les grands acteurs mettent en
abîme des sentiments humains. C'est vrai que j'ai une passion pour Pierre
Brasseur, Paul Meurisse, Michel Simon, Robert Le Vigan
mais je pense aussi à des acteurs comme Michel Bouquet, Claude Rich, Claude
Piéplu, Michel Galabru.
Quand
vous jouiez Nono, vous interprétiez
le rôle joué par Sacha Guitry qui était lui-même un acteur très spécifique.
Vous avez dû penser à lui en travaillant le rôle.
Le
problème avec Guitry c'est qu'il ne faut pas essayer de l'imiter.
Cependant c'est écrit musicalement, c'est presque du chanté-parlé, ce
que faisait très bien Sophie Desmarets, c'est écrit pour être
proféré donc on ne peut pas contourner le problème. Si on contourne le
problème, d'abord c'est moins drôle et, c'est moins
beau.
J'ai eu
l'impression que vous le citiez.
Oui,
c'était un hommage. C'est ce que j'ai essayé de faire. J'ai
énormément de références. Quand je suis arrivé à Paris je voulais être Jean Le
Poulain. Je l'adore parce que j'aime ce
côté clown dérangeant, qui dépasse les limites. Mais je n'ai pas
du tout fait la carrière de Jean Le Poulain, j'ai
fait d'ailleurs une carrière qui ne ressemble à aucune de
celles des acteurs que j'ai cités. Je pense qu'on a notre chemin à faire. Je
pense avoir été honnête avec ce que j'étais donc ça a donné mon
aventure avec Olivier Py et maintenant mes spectacles à moi qui
sont vraiment ce que je suis, je le pense profondément. Il ne faut pas avoir
peur de se faire influencer quand on est acteur par des grands maîtres, des
aînés, des modèles, parce que si on est honnête avec ce qu'on a envie de faire
on finit par en tirer profit. On forge notre personnalité artistique en se
faisant influencer par différents maîtres.
Pour Britannicus, vous travaillez avec l'une
des plus extraordinaires actrices françaises, Geneviève Page, que pouvez-vous
dire d'elle ?
Geneviève
Page c'est une créature. Quand j'étais adolescent j'allais voir
les grandes figures du boulevard comme Jacqueline Maillan ou
Maria Pacôme et puis j'allais voir les grandes
tragédiennes : Geneviève Page, Christine Fersen, Maria Casarès. Il
n'y a que ça qui m'intéressait, les tragédiennes et les boulevardières. Je
pense que ça se rejoint, d'ailleurs une actrice comme Judith Magre a
toujours fait les deux, du boulevard et de la tragédie. Geneviève Page aussi,
elle a créé Le Canard à l'orange avec Jean Poiret après avoir joué Le Soulier de satin de
Claudel. C'est formidable, sa démarche est déjà un exemple pour moi.
Je me
souviens vous avoir dit que
je rêvais de jouer Néron et que je voulais proposer le rôle d'Agrippine à Geneviève
tout en sachant: qu'elle refuserait. Et elle a dit « oui!
». Vous avez été exemplaire en produisant Britannicus parce
que le spectacle s'est joué cinq fois
avec des costumes rutilants, sous la pluie. Avec Geneviève,
on a trouvé une complicité. Contrairement à ce qu'on pourrait croire c'est quelqu'un
qui vous aide à être vous-même, elle n'est pas du tout
paralysante alors qu'elle vit entourée de poètes en permanence. Elle a
amené quelque chose que j'avais rarement vu en tragédie, évidemment
elle parlait de la folie humaine, mais il y avait quelque chose de sulfureux.
Geneviève
Page est aussi un fantasme pour beaucoup de gens et, on croyait vraiment voir
la sœur de Caligula. Il y avait quelque chose de maléfique que j'avais
rarement vu sur Agrippine. Un tel spectacle aurait dû être
programmé au
Théâtre de l'Odéon.
Vos
mises en scène, très à contre-courant d'une esthétique dominante, ont réhabilité
la rampe ou le jeu d'acteur face public, tombés en désuétude par ailleurs. Pourquoi ?
Olivier
Py a dit une chose très vraie la tragédie et le boulevard se jouent
face public. Et comme dans mes spectacles j'essaie
toujours qu'il y ait des moments tragiques et des
moments grotesques, souvent il y a un jeu plutôt frontal. J'aime
beaucoup le jeu frontal parce qu'on voit les visages, c'est comme un gros plan
de cinéma. C'est vrai qu'à la base les comédiens jouaient frontal
pour qu'on les entende et pour être éclairés par les bougies mais moi je trouve
cela très beau. C'est aussi pour avouer qu'on est au théâtre. Je ne monte pas d'auteurs
naturalistes parce que j'aime bien dire qu'on est au
théâtre. Même sur le Orton, qui n'était pas
une pièce naturaliste mais qui était une pièce néo-réaliste, c'était joué face
public. J'aime bien quand l’acteur
et le texte rentrent dans l'esprit du spectateur, et c'est
assez fort d'avoir un acteur qui dit un texte face public. C'est
aussi l’idée que l’acteur entre, il se met face public
et il dit le texte. Souvent je me dis que je fais des versions
de concert en costumes. Le Misanthrope c'était le texte devant avec des beaux costumes.
Quant
à la rampe, je l’utilise à la fois par nostalgie, à la fois pour
pouvoir éclairer le visage des acteurs. Et puis ça fait une lumière très belle.
Avec les moyens techniques qu'on a aujourd'hui, travailler sur l’éclairage par en-dessous
peut donner des résultats étranges.
Souvent
on me reproche de trop maquiller les acteurs pourtant les acteurs ont
été très maquillés jusque dans les années soixante. C'est très récent, ce n’est
qu'à partir des années soixante, soixante-dix qu'on maquille moins les acteurs.
Dans ses films, Guitry était outrageusement maquillé.
J'aime
bien partir de la convention, je trouve que la convention est très noble, pour
la détourner ensuite, la réinterpréter. Je prends toujours les didascalies à la
lettre que je déforme ensuite, je les transforme, je les interprète. Quand on
jouait Maison de poupée il y avait
cinq Maison de poupée qui se montaient en même
temps, mais on était les seuls à avoir mis les meubles décrits par Ibsen. C'est
Ibsen qui a choisi, c'est pas n'importe qui Ibsen quand même II
y avait donc le canapé, le guéridon, le piano, le poêle, le vestibule...
C'était très contraignant mais ça amenait quelque chose d'oppressant, et
de scandaleux de voir ça sur scène.
Vos
spectacles sont toujours très soignés plastiquement, ils ne ressemblent à aucun
autre. Comment travaillez-vous avec Bernard Fau, scénographe, votre frère,
David Belugou, costumier, Joël Fabing ou Alban Rouge, éclairagistes et Pascale
Fau, maquilleuse, votre sœur ?
C'est
très compliqué parce que, d'abord je travaille en
famille, et la famille c'est quand même pesant. On le sait, on a lu Les Atrides, on a lu Mauriac. Mais en même temps
on a une complicité qui vient de l'enfance, du théâtre de
marionnettes. Ce que j'aime bien par exemple avec
David Belugou c'est que je lui dis ce que j'imagine, j'ai
des idées très arrêtées parfois ça peut être assez
pénible pour mes collaborateurs. J'arrive avec une idée très précise, David
a son imaginaire et sa vision et ça donne une troisième chose, c'est ça l'idéal. D'ailleurs sur Maison ae poupée, Bernard Fau a fait
trois maquettes, il a fait la maquette qu'il voulait, la maquette que je voulais,
et il en a fait une troisième qui a été la bonne. Ce qui est bien avec David
Belugou c'est qu'il a une culture colossale et sans faire de reconstitution
historique, il arrive à rêver autour de l'époque ou autour d'un style.
Avec Joël Fabing c'est particulier parce qu'il est comme Audrey Tautou il n'est pas
du tout carriériste, il a refusé d'éclairer beaucoup de spectacles.
C'est pourquoi j'ai parfois travaillé avec Alban Rouge qui
fait partie de la même famille. Joël n'a pas d'ego d'éclairagiste, j'ai
eu des soucis avec des éclairagistes avant de travailler avec lui, mais lui
comme il est sur la recherche, il n'a pas peur d'essayer d'éclairer
une scène avec un seul projecteur, par terre, côté jardin. « Et s'il y
a des ombres partout, est-ce que ce n'est pas beau ? Et si on voit les sources
? » J'aime beaucoup l'éclairage par la face, qui a été censuré
dans les années soixante-dix parce que ce n'était pas
de bon goût, parce qu'en effet ça fait des ombres, ça fait des gueules
particulières. Avec Joël on a une liberté dans le travail qui est
exceptionnelle.
Vous
êtes un homme et un artiste libre, volontiers transgressif. Certains vous disent
réactionnaire. Vous reconnaissez-vous dans ce qualificatif ?
Moi
je ne dis pas que je suis réactionnaire, je dis que je suis passéiste et nostalgique.
Je fais avec l'héritage du passé. C'est en
faisant avec l'héritage du
passé qu'on fait le théâtre d'aujourd'hui. On n'est que
le résultat de tout ce qui s'est
passé avant. On fait avec la semaine dernière. C'est horrible d'ailleurs
parce qu'on est chargé d'un fardeau. Surtout quand on est artiste, on
est obligé de faire avec les mouvements artistiques qu'il y a eu, qui sont magnifiques,
qui sont des modèles. Je pense que là où je ne suis pas réactionnaire, c'est
que je ne fais pas un théâtre qui est à la mode, mais je ne fais pas un théâtre académique non
plus. C'est le style de l’auteur
qui me donne envie de réinventer.
L'Art
du théâtre est-il de révéler ce qu'il y a de contemporain dans une œuvre
classique, de témoigner de son
actualité et par là, de trouver la juste convergence entre deux temps ?
Une
grande œuvre d'art, que ce soit une peinture, que ce soit une
musique, que ce soit une pièce, si elle a du génie, traverse le temps.
Elle finit par être intemporelle. Au théâtre, c'est penser que les gens sont
bêtes que de croire qu'ils ne vont pas comprendre que, dans son fond, l'œuvre
reste intemporelle et universelle, avec le temps. Le public n'a pas
besoin, pour comprendre, qu'on rajoute des téléphones portables, des imperméables,
des survêtements ou de la vidéo. C'est comme si on taguait La Joconde ou qu'on
repeignait la tour Eiffel en rosé. Une œuvre d'art est intéressante
par son style, par sa forme et par son fond. À l'opéra
on a fait un travail qu'on n'a pas fait au théâtre, c'est de rechercher comment
on jouait et on chantait les
œuvres au 17e siècle, au 19e siècle, les différences, même d'instruments.
Vouloir
moderniser les pièces classiques est un vieux débat. Pierre Dux
a monté Le
Misanthrope en costumes modernes au Théâtre de l'Œuvre
au début des années soixante. Strindberg disait que faire du
théâtre moderne avec des vieux textes, c'était comme faire du vin nouveau
dans des vieilles bouteilles, elles risquent d'éclater.
Une œuvre peut nous fasciner et nous interroger sur l'humain,
par son fond et par sa forme, qui évidemment est datée.
Que
pensez-vous du clivage théâtre public / théâtre privé ? Vous venez du premier
et êtes devenu véritablement vous-même au sein du second. Quel est votre regard
là-dessus ?
Je pense que c'est une vaste mascarade.
C'est complètement ridicule parce que le théâtre dit public est très récent.
Avant il y avait la Comédie-Française et c'est tout. C'est comme s'il n'y avait pas
eu de théâtre avant. Mes rêves, et c'est parce que je ne l'ai pas
connue que je peux rêver dessus, c'est l'avant-guerre,
c'est Jouvet, c'est Pitoëff, c'est Dullin mais
pas seulement le Cartel, c'est aussi Copeau, c'est
un théâtre poétique, et c'était du théâtre privé. Je pense que c'est
une question de personne. Il y a des imposteurs et des gens qui sont audacieux
dans les deux secteurs et il y a des gens qui sont tristes et prétentieux dans
les deux secteurs. Le théâtre public à une époque a été beaucoup plus audacieux
qu'il ne l'est maintenant. Je trouve que la programmation
à l'Odéon de Jacques Toja dans les années
quatre-vingt était plus audacieuse que celle d'Olivier Py, sans
parler de l'époque de Barrault qui était novatrice.
Je trouve que le Théâtre de l'Odéon, qui était le
grand théâtre national, qui a des moyens énormes, est devenu très bourgeois,
dans le sens confortable et chic et, rentable en plus. Ça ne suffit pas de
remplir les salles. C'est comme la Comédie-Française, elle est là avant tout
pour défendre un patrimoine, elle n'est pas là seulement pour
remplir les salles. À la base le théâtre public a de l'argent
public pour pouvoir prendre le risque de faire des choses qui vont surprendre.
Ce n'est pas toujours le cas et parfois dans le privé j'ai vu
des projets très audacieux, comme ce que vous pouvez faire
au Théâtre de L'Œuvre. Par contre le privé, lui, a plutôt
intérêt à ce que la salle soit pleine.
Quand
j'étais enfant, ma mère m'amenait aussi bien à la Comédie-Française qu'aux
boulevards, je ne comprenais pas du tout la différence,
le spectacle était bien ou pas. J'ai compris assez tard
cette guerre, et je pense qu'au contraire il devrait y avoir des ponts et des
aides. L'idée qu'un spectacle qui marche dans le
subventionné puisse être exploité dans le privé, je trouve cela très
bien. Mais c'est beaucoup plus complexe que de dire le théâtre privé fait de
l'argent et le théâtre public fait de l'Art.
Vous
avez dispensé des cours chez Florent et au Conservatoire National d'Art
Dramatique. Tout le monde peut-il devenir acteur ? Le métier d'acteur s'enseigne-t-il
? Qu'aimeriez-vous transmettre à vos élèves ?
Je
pense que c'est un peu absurde. De toutes façons faire du théâtre est absurde,
ce n'est pas normal du tout, ça devrait être interdit, les acteurs devraient
être excommuniés. Je pense que ce n'est pas naturel, c'est artificiel, c'est
trafiquer le réel. Donc enseigner cela, c'est encore plus absurde.
Le seul intérêt, qui est totalement égoïste,
c'est de côtoyer une nouvelle
génération pour se remettre en question soi, ce qui est très important. J'ai souvent
travaillé avec des gens d'une autre génération, soit avant moi, soit après moi.
Sinon, où je peux aider un jeune acteur ou une jeune
actrice, c'est de leur apprendre qu'il faut être fidèle à leurs premiers
fantasmes artistiques, ne pas essayer d'être à la mode à tout prix.
Que le seul moyen d'imposer qui on est, sa personnalité, sa
différence artistique, c'est d'être dans le travail, dans la folie à la
virtuosité.
Comment
est née en vous l'idée de Récital
emphatique ? Que souhaitiez-vous exprimer avec ce spectacle ?
Ce n'est pas
très réfléchi, c'est assez pulsionnel mais c'est des années et des
années de rêveries autour de l'art de l’acteur
et du chanteur d'opéra, particulièrement des tragédiennes et des
divas. Parce que j'ai une passion pour ces gens-là.
Ça a
été une carte blanche que m'a donné Olivier Mantei aux
Bouffes du Nord et puis vous, puisque vous avez été co-producteur du
spectacle. Ça a été un geste gratuit, c'était un caprice égocentrique sur
mes délires. J'aimerais bien régulièrement faire quelque
chose de totalement gratuit. Ça a été joué dix fois aux Bouffes du Nord puis ça
a été repris au Marigny, longtemps, mais au
début je ne savais pas du tout ce que ça allait être. D'ailleurs à
quelques jours de la première j'étais terrorisé. Je ne savais pas que ça
allait devenir quelque chose de très drôle comme ça. Je savais que ça allait
être drôle parce que je faisais le clown, au sens noble du terme, mais je ne
pensais pas que ça allait toucher un public aussi large. C'est une plaisanterie
qui se transforme en hommage à l'Art, où je dis que tout est
code de jeu.
Parlez-nous
de l'expérience du travestissement ?
C'est
quelque chose d'essentiel pour moi, c'est le théâtre en fait. C'est
le théâtre shakespearien, c'est le kabuki, à l'époque de
Molière les rôles de vieilles femmes étaient joués par des hommes. D'ailleurs
sur le Récital, je n'essaie pas
de jouer une femme, j'essaie de jouer un monstre. Ce qui me plaît
c'est qu'on ne sait pas ce que c'est, c'est une femme de cauchemar.
Il y
a des gens qui sont venus voir le spectacle et qui croyaient que c'était une
femme, je me dis qu'ils ont une vision de la femme qui est terrible ! Pour moi,
c'est comme jouer un vieillard ou un jeune homme, j'aimerais
bien jouer un jeune homme d'ailleurs, un
jeune premier. On devrait se l'autoriser
davantage au théâtre, on est beaucoup trop réaliste. J'aimerais
bien aussi arriver à
jouer un grand rôle tragique, Clytemnestre dans
Electre ou un personnage féminin de Tennessee Williams.
Évidemment il y aura une distance puisqu'on sait que c'est un homme. Pour moi c'est
le théâtre, on y croit alors qu'on sait que ce n'est pas vrai. C'est comme
quand on regarde un dessin animé, on sait que c'est faux mais on marche.
Le
théâtre de boulevard est mis au ban de « l’esthétiquement
correct ».
Vous
vous apprêtez à présenter au Théâtre de L'Œuvre en mai 2015 une pièce d'André
Roussin Un amour qui ne finit pas,
qu'aucun théâtre fréquentable ne s'aviserait de programmer. Quelle est votre
lecture de ce théâtre-là ? Pourquoi vous tient-il tant à cœur ?
Je
pense que ce théâtre-là a sa place et que Roussin fait partie des auteurs méprisés
que les gens n'ont pas lus, comme Montherlant, et ce sont
des auteurs qui ont été très importants à une époque. Je me demande toujours comment
un auteur a eu un tel pouvoir à une époque, il s'est
bien passé quelque chose. Du coup je me suis replongé dans son œuvre. Il a été
joué par des très grands acteurs, par Galabru, par Pierre Fresnay, par
Suzanne Flon, même par Ava Gardner, ce
n'est pas si anodin que cela.
Je
crois que Un amour qui ne finit pas
est une pièce à part, Pierre Barillet disait que c'était une des pièces
préférées de Delphine Seyrig. C'est comme ça que je
me suis penché sur cette pièce et j'ai trouvé le sujet
formidable, puisque ça parle de l'amour platonique. Les rôles
sont formidables, c'est aussi l'envie de jouer un rôle, c'est
un homme qui est à la recherche de l'amour qui ne finit pas, il pense que c'est
l'amour platonique qui ne finit pas, c'est un personnage assez lunaire. C'est
aussi l'envie de jouer des personnages un peu solaires, je n'en
pouvais plus de jouer des personnages noirs, mais il y en a pas beaucoup dans
le répertoire. La langue est très belle, c'est très bien écrit. Je pense qu'avec le
temps, c'est ce qui se passe aussi avec Guitry, la langue acquiert une
préciosité et une saveur qu'elle n'avait pas
à une époque. C'est comme les meubles des années cinquante en Formica qu'on
trouvait affreux et que maintenant, on achète à prix d'or.
La
pièce est étrange et surprenante. Ce que j'aime chez les auteurs c'est
quand il y a un propos, le théâtre du non-dit ce n'est pas
tellement mon trip ou alors il faut que ce soit Pinter
parce que, chez lui, c'est dangereux alors ça me plaît parce que ça fait rire
et ça fait peur, ce qu'il appelait le théâtre de la menace, les secrets des
personnages vous amènent dans des abîmes vertigineux. Sinon j'aime bien quand
le théâtre dit des choses et je suis également attaché à la forme, j'aime quand
il y a une écriture.
A-t-on
la liberté de transformer un drame, comme le pensait Antoine Vitez, en comédie,
une farce en tragédie, etc. ?
La
tragédie antique comme plus tard la tragédie baroque, était un concentré de
moments tragiques, terribles. Et puis il y avait la farce qui était un concentré
de moments grotesques. Tout le théâtre qui est arrivé après, surtout au 19e
et au 20e siècle, a fait avec les deux. Je pense que dans la vie il y a des
moments tragiques et des moments burlesques.
Évidemment que la farce frôle la tragédie. Ce sont les deux formes qui m'intéressent.
Je pense qu'elles se rejoignent. Je ne peux pas envisager un spectacle sans
humour, je ne peux pas faire autrement.
C'est
pourquoi il y a des auteurs auxquels je ne toucherai pas. L’homme a
des moments ridicules, pathétiques et des moments où il est sublime. Le
tragique ce n'est pas le drame. Le drame c'est quelqu'un qui ne va pas bien,
qui a des soucis, la tragédie c'est beaucoup plus grave. Medée ce n'est
pas quelqu'un qui se fait plaquer par son mec, c'est une femme qui a des pouvoirs
maléfiques, c'est une sorcière, elle est capable de détruire. C'est beaucoup
plus inquiétant.
Dans Le Misanthrope par exemple, il y avait
des moments tragiques, cornéliens et il y avait des moments de farce pure et
puis il y avait des moments philosophiques. J'aime bien quand les genres sont
mélangés.
Beaucoup
de gens parlent du plaisir de jouer la comédie. Michel Bouquet - lui - parle de
la souffrance. À quelle école appartenez-vous ?
Ce
n'est ni l'un ni l'autre, c'est les deux. Je dirais que c'est une joie, mais la
joie ce n'est pas le bonheur. Je recherche l'extase
à tout prix, et pour y arriver c'est des angoisses, c'est de la souffrance.
La place de l’acteur devrait être comme celle du danseur
ou du chanteur d'opéra ou du trapéziste
ou du sportif de haut niveau, c'est-à-dire que ça fait peur, c'est terrible,
c'est difficile, mais par moments on peut arriver à décoller du sol. Il y a
beaucoup d'acteurs qui jouent confortablement. Moi je
ne suis jamais à l'aise sur
une scène. Je crois que c'est ce que
Bouquet veut dire. Mais il y a des moments d'éblouissement tels
que je continue à le faire. On ne joue pas pour s'amuser,
comme disait Guitry.
En
même temps, j'essaie d'éviter le
travail dans la douleur. Évidemment c'est une souffrance, c'est
tellement difficile, on n'est jamais content de ce qu'on fait et en même temps
on a toujours envie d'y retourner.
Le
peintre, le compositeur, l'écrivain — une
fois l'œuvre achevée — ont termine leur travail. L'acteur doit chaque soir
recréer son œuvre. Son œuvre est détruite au baisser du rideau et il doit la
reconstruire à chaque lever de rideau. Croyez-vous, comme Roger Planchon, que
la beauté du théâtre soit précisément dans le périssable ?
Cette
idée a beaucoup changé pour moi. Par exemple mes spectacles n'ont
pas été filmés, sauf le Récital, parfois je le regrette,
parfois je me dis que c'est peut-être bien de ne garder que des photos ou des
extraits, uniquement des traces. Je suis assez partagé. Je suis très content de
pouvoir voir Maria Casarès dans Lady Macbeth ou Michel Serrault dans La Cage aux folles mais, en même temps,
c'est vrai que ce côté éphémère est assez beau. C'est pour cette raison que
le théâtre existera toujours, il ne pourra jamais être remplacé par une image
virtuelle parce que c'est de la chair en direct. Moi j'aime bien
qu'on fasse exactement la même chose que la veille, mais en mieux. Comme on
n'est jamais content parce que c'est trop difficile,
on a
toujours une motivation pour faire mieux. C'est l'histoire de
Laurence Olivier, il avait été génial dans Othello
et il est sorti de scène en furie.
Alors
on lui dit : « Laurence, c'était formidable » et lui répond : « Mais c'est ça
le problème ! Comment vais-je faire demain ? Je ne
vais jamais retrouver ce que j'ai trouvé ce soir!» Il
était furieux d'avoir été génial. Mais c'est ça l'idée.
Souvent dans Le Misanthrope quand je
réussissais une scène le lendemain, je la loupais.
Jean-Louis
Barrault disait qu'une pièce bien distribuée était à moitié montée. Que
pensez-vous de cette affirmation ?
Bien
sûr, c'est évident. D'ailleurs je suis beaucoup plus
heureux depuis que je choisis mes partenaires. J'ai trop souffert d'avoir des
partenaires avec qui je n'arrivais pas à jouer. Pourtant
il y a des mauvais comédiens avec qui on arrive à jouer et de très bons
comédiens avec qui on n'arrive pas à jouer, ce n'est
pas une histoire de talent, c'est une histoire de complicité, c'est
sensuel, c'est un délire, c'est absurde comme une histoire d'amour,
c'est inexplicable. À la base, quand on choisit Edith Scob, il
suffit qu'elle arrive, elle ouvre la bouche et il se passe quelque chose. Ce sont des gens chargés,
c'est évidemment très important.
Je
suis très amoureux de mes acteurs. J'étais très amoureux d’Audrey Tautou
et j'étais très amoureux de Gaspard Ulliel, ils m'aidaient à jouer la
pièce.
Comme
Julie m'a beaucoup aidé sur Le Misanthrope, ça m'aide d'avoir une Célimène qui m'intrigue, qui
me fascine, qui me séduit. Ce n'est pas pour faire du
psychodrame, c'est parce que je suis heureux de la retrouver le soir. C'est
pareil pour la scène avec Edith Scob, c'était tous les soirs
un plaisir. C'est pour ça que c'est
très compliqué de faire une distribution.
Y
a-t-il un « physique de théâtre » ?
Il y
a de la « plateaugénie », comme il y a de la photogénie. En effet,
il y a un physique de théâtre. Il y a une présence. Il y a des gens qui sont
très beaux dans la vie, qui ne sont pas beaux sur scène, et l’inverse. Je
pense que la présence se cultive, qu'on a une présence quand on est honnête
avec qui on est, et quand on s'est posé des questions sur l’Art.
Interpréter,
est-ce devenir un personnage ? Jouer, est-ce seulement faire semblant ?
Ni
l'un ni l'autre, ce qui est important c'est d'incarner.
Incarner un texte, à la rigueur un rôle. Incarner, c'est
dans la chair et en même temps il y a quelque chose de divin, de métaphysique.
C'est respirer une parole. Si on fait un théâtre
sans texte alors c'est un geste qui doit être incarné ou transmuté. Le geste
pour moi est très important, je me pose beaucoup de questions sur les
gestes quand je joue, le corps est totalement lié à l’esprit. Je
ne pense pas trop au personnage, je pense plutôt au rôle et à la parole, au
texte, comment il doit être dit, avec quelles formes, avec quels gestes, de
quelle façon. Et quand on a de grands auteurs, le rôle apparaît. J'aime
quand il y a l’esprit et les entrailles, j'aime quand il y a de la
chair. Je n'aime pas les acteurs
qui ne jouent qu'avec leurs bouches.
On
reproche à certains acteurs de ne jamais se renouveler et finalement de se figer
chaque fois dans un même personnage. On constate que les plus grands comédiens
se sont parfois contentés de créer un type. Ainsi Chaplin a-t-il inventé
Chariot, géniale création, et l’a placé d'un film à l'autre de la période muette
dans des situations différentes mais le personnage ne bougeait pas.
Certains
autres acteurs, souvent américains, semblent changer jusqu'à leur style à
chaque nouveau travail. Lequel de ces deux chemins vous touche le plus ?
Ça,
c'est une question intéressante. En effet c'est très compliqué. On dit de certains
acteurs qu'ils font toujours la même chose mais ce n'est pas
gênant, on cherche dans une certaine direction. C'est ce que faisait Chaplin,
il y a un endroit où on cherche. Je suis attiré par un théâtre surréaliste ou
poétique ou expressionniste et c'est très délicat, même pour un metteur en
scène, il est très facile d'appliquer une
recette. On peut être influencé par différents styles mais dans les spectacles que j'ai
fait, il y a des points communs sur l'expressionnisme, sur la dérision, sur la
folie, sur le côté sophistiqué, le côté précieux des choses, et sur le côté
absurde de la vie. J'ai arrêté de me poser cette
question mais à une époque, quand je faisais beaucoup de spectacles avec
Olivier Py, je faisais toujours la même chose parce
qu'il m'écrivait
éternellement le même rôle. Un jour je lui avait dit que j'aimerais
bien jouer un rôle différent
et il m'avait répondu qu'il fallait, au contraire,
continuer à creuser ce chemin inventé ensemble. Il avait raison je pense,
c'était bien de passer par là. Depuis que je monte mes spectacles, j'essaie
d'aller vers des choses qu'on ne m'a jamais proposé ou que je n'ai
jamais joué. Par exemple le personnage du Récital
est un personnage qui existait en surimpression
dans d'autres spectacles,
et
pour que ce personnage s'enrichisse, il a
fallu que j'aille voir d'autres
univers, en parallèle. Il y a ce qu'Antoine Vitez
appelait l'acteur-poète, c'est celui qui amène un univers, qui
amène de l'onirisme, de la poésie dans « ce monde de brutes ».
L'acteur, qui n'est qu'un interprète, qui
est au service de l’auteur, a quand même une signature. Quand
je vais voir Martine Chevalier, qui est pour moi une des plus grandes actrices
françaises, j'attends d'elle qu'elle soit Martine
Chevalier dans toute sa splendeur, je n'attends pas de voir autre
chose. Chez les acteurs américains que j'admire,
qui sont beaucoup sur la composition, ce qui est très noble pour moi, on
retrouve quand même un esprit. Que ce soit Meryl Streep ou Glenn
Close, on retrouve une dimension qui est commune à tous les rôles qu'elles
peuvent interpréter. On m'a dit que c'était incroyable de me voir dans Alceste et
de me voir ensuite dans le Récital,
parce que ce n'était pas du tout la même chose. Certes, ce
n'est pas le même texte, mais je n'ai pas l'impression que
ce soit si éloigné, j'ai l’impression que les deux sont une
vision baroque de l'humain.
Il me
semble que dans Le Misanthrope,
Molière n'est ni Alceste ni Philinte ni naturellement aucun des autres
personnages. N'est-ce pas toujours une erreur que de rechercher 1'auteur dans
un personnage de sa pièce ?
Oui
c'est vrai, c'est un cliché en plus. Il y a des répliques où Molière est Alceste,
des répliques où Molière est Philinte ; ou alors Philinte est ce qu'il aimerait
être et Alceste est ce qu'il redoute d'être.
N'est-ce
pas une erreur — commise par Jouvet et Vilar eux-mêmes – de faire de Dom Juan
le centre de gravité de la pièce. N'est-ce pas en réalité Sganarelle, que
Molière interprétait ? Dom Juan n’est-il pas là simplement pour le
révéler, le définir et lui faire vivre le cauchemar de son caractère ?
Bien
sûr c'est un couple. Comme Philinte et Alceste.
C'est un déclencheur. D'ailleurs il faudrait jouer
Sganarelle comme un Iago moins néfaste. C'est
comme Scapin, c'est un déclencheur, ce n'est même
pas un personnage, ce n'est pas un être humain, il n’existe
pas. Mais Dom Juan est une pièce
compliquée, c'est une pièce à machines en plus. Bien sûr que s'il y
a un rôle que j’ai envie de jouer c'est Sganarelle.
Mais il faudrait rêver sur les machineries de l'époque, les
apparitions.
Croyez-vous
à l'improvisation ? Que pensez-vous de la commedia dell'arte ?
J'aime
beaucoup la commedia dell'arte parce que c'est
un théâtre qui n'est pas naturaliste,
c'est un théâtre codifié, comme le kabuki et comme était le théâtre baroque
français, la déclamation baroque du 17e qu'on a complètement méprisée.
J'aime beaucoup l'idée que ce soit
codifié, que ce soit masqué, parce ce que ça va à l'encontre de
tout le théâtre naturaliste et bourgeois dont on est imbibé
encore aujourd'hui. Évidemment ça remet tout en question, puisque tout est
codifié, tout est formel, tout est artificiel apparemment, évidemment il faut
que ce soit nourri par de la sueur, de la chair et du
sang. J'aime l'idée de la plage d'improvisation,
c'est ce qu'on avait essayé de faire sur la scène de Du
Bois dans Le Misanthrope. C'est une scène de farce, comme
une scène de commedia dell'arte, et Fabrice Cals est un acteur très
doué pour ça. Pourtant je ne me l'accorde pas tellement dans le Récital, alors que je pourrais,
mais tout est réglé. L'improvisation est bien quand elle reste
balisée. Le danger c'est que ce ne soit plus le même spectacle. C'est d'ailleurs pour
ça que je suis content d'être sur le pont du bateau avec
les autres acteurs quand je fais une mise en scène parce qu'on
peut se dire des choses, d'ailleurs on se dit des choses tous les soirs, pour
que le spectacle ne dérape pas ou ne bascule.
Chacun
a noté dans Le Misanthrope votre
travail sur l'alexandrin. Quelles indications avez-vous donné à vos acteurs sur
la scansion des vers ?
C'est
dément, je pense que le mois dernier, LŒuvre était le seul théâtre en
France où on disait bien l'alexandrin ! Il y a des livres de
déclamation qui existent, des traités de déclamation qui datent du
17e Tout le monde prétexte qu'on ne sait pas comment c'était dit. On ne sait
pas tout, mais on sait certaines choses. J'ai beaucoup potassé ces trucs-là et j'ai
travaillé avec Benjamin Lazar qui est un spécialiste
du théâtre du 17e Dans le spectacle, on ne dit pas l'alexandrin
comme à l'époque en roulant les «R»,
j'ai ré-inventé un baroque d'aujourd'hui. Mais
il faut connaître les bases pour pouvoir imaginer, comme les bases du clown ou
du kabuki. Trouver l'évidence de
la parole sans être dans la banalisation, c'est ce que je voulais. L'alexandrin
c'est la parole sublimée, c'est de la poésie pure.
Pensez-vous
qu'il y a de multiple, simplement plusieurs ou bien uniquement une seule façon
d'interpréter un chef-d'œuvre ? Chaque œuvre contiendrait-elle secrètement un
absolu de sa présentation ?
Si je
voulais foutre la merde je dirais Oui ! Ça va tellement contre tous les discours
qu'on entend ! En fait, c'est plus compliqué que ça. Le plus important est de
faire entendre la parole du poète, mais dans la façon de l'incarner il y
a des différences de forme. Sur Le Misanthrope, on a essayé d'être le plus naïf possible, le plus «
bon élève » possible et se demander qu'est-ce que veut dire Molière,
et est-ce que ce n'est pas plus intéressant ce que dit Molière
que ce qu'on pourrait imaginer. En fait, il nous a amenés beaucoup plus loin. À
partir du moment où on contredit la parole du poète ou on ne l’entend
pas, ça ne m'intéresse pas. Je ne pense pas jouer
Molière comme il le jouait lui, ce ne sont pas les mêmes décors, les mêmes
costumes, la même mise en place, mais je ne pense pas avoir trahi la parole de
Molière, avec toutes ses contradictions et ses ambiguïtés. Je pense que la
parole de Molière est plus intéressante que la parole d'un
metteur en scène. C’est-à-dire qu'il y a un style, on est dans le style ou
on est hors-style. Et on peut être dans le style sans pour autant faire de la
reconstitution, c'est là où ça se complique.
Une
œuvre dramatique commence-t-elle à la première réplique du texte s'achève-t-elle
à la dernière ? Autrement dit, les personnages ont-ils un passé et un futur ?
Quels sont-ils alors et comment les découvrir ?
Moi
je pense que non. J'en parlais beaucoup avec Jean-Pierre Lorit qui
a été un partenaire rare et patient. Philinte et Alceste,
c'est une histoire d'amour pour moi, c'est une
amitié dévastatrice. Jean-Pierre avait dû se raconter des choses, lui, mais moi
je ne me pose pas cette question. Pour moi le rôle existe à partir du moment où
il entre en scène et il parle. Ça ne m'intéresse pas
de savoir
ce que va faire Alceste après. Je sais qu'il dit qu'il part, et qu'il
quitte la scène. Après on imagine ce qu'on veut mais ça ne m'aidera
pas à jouer ce qu'il y a avant. Il n'y a pas de règle en art et chacun fait
comme il peut. Dans le théâtre du 20e siècle c'est compliqué parce qu'il y a
des non-dits, il y a des mensonges, il y a des
tricheries, les gens n’osent pas parler donc il y a des silences. Je pense
que dans le théâtre du 17e siècle, il n'y a pas cela, les gens disent ce qu'ils
pensent et pensent ce qu'ils disent, sauf les personnages maléfiques qui
mentent, mais il y en a très peu dans ce théâtre-là.
Avez-vous
avant la première répétition trouvé la conception d'ensemble d'un rôle ?
Ou la trouvez-vous pendant les répétitions ?
Je
travaille beaucoup en amont. Le
Misanthrope j'y réfléchis depuis très longtemps. Je n'attends pas
tout des répétitions, mais j'essaie de m'autoriser des
découvertes. C'est l'opéra qui m'a
appris qu'il fallait travailler en amont, parce que les chanteurs arrivent avec la
partition sue par cœur. J'aurais tendance à tout prévoir à l'avance.
Nous remarquons parfois qu'un acteur peur être
formidable à un moment du spectacle et non pas tout le temps. Peut-il trouver
pour une partie seulement et non pas pour le tout ? Comme-ne se fait-il qu'une
part du personnage puisse parfois lui échapper ?
C'est très
mystérieux. Je le voyais sur le
Misanthrope ou même sur le Récital, c'est difficile d'être
performant du début à la fin. Il y a des scènes que je rate et d'autres que
je réussis mieux, mais ce ne sont pas toujours les mêmes. C'est très fragile.
Ou alors c'est que l'acteur
n'a pas assez travaillé, ou qu'il ne s'investit que
dans certaines scènes, mais je ne comprends pas trop
cette démarche- C'est vrai qu'on n'est
jamais content de la totalité mais je ne suis
jamais totalement mécontent non plus. Même quand une représentation ne se passe
pas très bien, il y a toujours un moment de grâce.
Qu'est-ce
que le trac ?
Le
trac rejoint ce qu'on disait sur la joie et la souffrance.
C'est comme quand on fait du ski de haut niveau ou du trapèze, on
a peur mais on a envie d'y aller. Il faut que cette
peur se transforme en excitation et pas en paralysie. Le
trac c'est la peur de ne pas arriver à sauter l'obstacle.
Vous
l'avez, vous ?
Oui j'ai le
trac mais, pour moi être sur scène est tellement solennel, tellement
exceptionnel, tellement gracieux que je ne veux pas me bousiller la joie par ce
trac. Sur Le Misanthrope je n'ai
jamais été tranquille, à cause de la difficulté du parcours, de la course d'obstacles et
de la forme. Et si on veut la respecter
pour en profiter, elle nous amène à d'autres endroits, vocalement et intimement, du
coup j'avais très peur.
Que pensez-vous
du vedettariat, du statut de vedette ? Cela peut-il être un idéal de 1’acteur?
Quelle peut être une ambition de Facteur ?
C'est compliqué
cette histoire de vedettariat, bien que je n'ai aucun problème là-dessus. J'aime les
divas et les grandes actrices alors je suis automatiquement
séduit par le côté glamour du vedettariat. Je suis
séduit tout autant par des acteurs de théâtre purs et durs que par des stars de cinéma.
Je n'ai pas d’a priori, si les gens me font fantasmer, ils me font fantasmer,
qu'ils soient vedettes ou pas. Que ce soit une démarche est plus compliqué,
évidemment je ne suis pas là-dedans. Si je l'avais
voulu, je ferais d'autres choses. C'est
mon désir qui parle avant tout, je n'ai pas de plan de carrière. Justement, ni Audrey Tautou, ni
Julie Depardieu, ni Léa Drucker n'ont de
plans de carrière non plus. D'ailleurs je ne pense pas que ce
soit la voie pour faire une carrière digne de ce nom, elle advient quand on a
une démarche très personnelle. Le vedettariat est très éphémère, je ne pense
pas que ce soit un idéal. Ce qui m'intéresse
c'est d'incarner un grand texte, qu'il y ait du
monde dans la salle et que les gens me disent que je suis bouleversant, que je
suis fascinant. Au niveau de l’ego, c'est ce qui peut me travailler.
On est peu de chose, tout cela est très futile.
Quelle
pourrait ou quelle devrait être la fonction de la critique ?
On
oublie à quel point Jean Vilar était critiqué. Un jour, il avait fait un spectacle
qui était complet dès le début donc il n'avait pas
besoin des critiques. Certains n'étaient pas venus, d'autres
avaient simplement témoigné du spectacle, sans en dire du bien ou du
mal. Je pense que c'est cette idée-là, ils devraient témoigner
du geste artistique, c'est-à-dire raconter ce qu'ils ont vu. Savoir s'ils
aiment ou s'ils n'aiment pas me paraît secondaire. Les critiques devraient
être des témoins, mais pour cela ils devraient être beaucoup plus cultivés
qu'ils ne le sont. Je trouve qu'il y a un réel manque de connaissances chez
certains critiques.
Moi j'ai un
rapport assez serein parce que j'ai eu des critiques dithyrambiques,
des choses même gênantes parfois, et puis des choses terrifiantes, à
pleurer. C'est vrai qu'une bonne critique flatte et qu'une mauvaise
critique blesse. Au théâtre c'est particulièrement dur, parce qu'il faut y
retourner le soir. Ce n'est pas comme au cinéma, où
quand les critiques sortent,
le film est déjà fini. Au théâtre, si on
a eu une mauvaise critique, on y pense au moment d'entrer
en scène.
Le
théâtre n'obéit-il pas davantage aux lois du rêve qu'à celles de la réalité du
monde?
Oui
bien sûr. C'est Baudelaire qui disait quelque chose comme il serait triste de réduire l'art à une reproduction de
la réalité. Il faut que l'art soit
onirique mais qu'il parte de la réalité.
La réalité est souvent plus violente et délirante et poétique
que ce que veulent nous faire croire les
metteurs en scène. La vie est réaliste, elle n'est pas
naturaliste.
On
reconnaît souvent un acteur à une voix. Un acteur, ne serait-ce pas d'abord une
voix ?
C'est
comme les chanteurs d'opéra. C’est souvent les
acteurs qui ont une personnalité qu'on reconnaît à la voix, ou alors c'est que
la voix est insupportable ! C'est beau de reconnaître un acteur à sa voix.
C'est très important la voix. En même temps, personne
n'aime sa propre voix. Moi j'ai une voix blanche, je parle
faux mais j'en ai fait un atout, un fond de commerce. Ce qui est formidable
c'est de faire ce qu'on veut avec sa voix, bien qu'il y ait toujours des choses
qui nous échappent. Sur tous les textes que je joue, j'ai essayé de travailler
sur des graves, sur des aigus, sur des accélérations, sur des contrastes,
sur des mezza-vocce et des fortissimo. Je trouve cela très
important.
Quelle
est la part de l'inconscient dans le jeu ?
Elle
est énorme. Il faut maîtriser le maximum de choses parce qu'il y a toute une
autre partie qui nous échappe totalement.
On dit que la vérité est dans l'œil du spectateur, mais chaque
spectateur voit des choses différentes, la divergence des avis sur un
spectacle est incroyable.
Souvent je travaille avec des acteurs qui ont
un certain métier, donc ils maitrisent les choses avec
extravagance comme Charlotte de Turckheim ou Jean-Paul Muel. Ou alors
j'essaie de travailler avec des gens qui ont moins de métier, ce que j'aime
beaucoup aussi, qui du coup n'ont pas d'a
priori. C'était le cas avec Agathe Bonitzer qui m'a fait totalement
confiance dans ma façon de travailler, très particulière parce que très réglée,
très cadrée. Une actrice comme Léa Drucker
s'est complètement adaptée. Elle n'a jamais remis en question ma façon de
travailler alors que c'est une actrice qui avait travaillé avec des gens très
différents.
Que pensez-vous
du contre-emploi?
Certains
jeunes acteurs veulent absolument travailler leur contre-emploi avant d'avoir été
au bout de leur emploi. L’emploi est très beau. C'est
comme la tessiture à l'opéra, on a une voix qui nous permet de
chanter certaines choses mais pas tout. Ce qui est
très beau c'est que la tessiture de la voix part de ce que le chanteur a en
lui, de son intériorité, et pas de ce qu'il représente physiquement. Par
exemple, on se fichait que la chanteuse ait soixante ans pour chanter Elektra qui
en a seize, de toutes façons on ne peut pas chanter
Elektra à seize ans. C'est vrai qu'au théâtre, la notion d'emploi
est davantage liée au physique qu'à l’opéra, c'est ce qu'on dégage
sur un plateau. C'est bien d'être conscient de ce qu'on
représente auprès du public et des gens qui font du théâtre, de cerner
ce pourquoi on va être choisi. Quitte après à aller contre, à le détourner, à
lui tordre le cou. Avec l'âge, je suis un peu condamné
à aller au bout de mon emploi, qui était celui de Jacques Charron ou de Jean Le
Poulain, qui s'appelait le « ventre doré ». Ce
sont soit les rôles comme le malade imaginaire, les grands premiers rôles de
Molière ou alors ce sont les bourgeois dans le répertoire du 19e siècle,
c'est l'emploi de Bernard Blier dans
une pièce de Balzac, et ça ne me déplaît pas
du tout. Je crois que jeune, je n'avais pas vraiment d'emploi et
que j'ai été obligé de trouver mon identité artistique à
travers un poète, qui était
Olivier
Py, qui a écrit des rôles pour moi, des rôles de clowns
tragiques. Il faut trouver la vérité de son emploi. La notion
d'emploi n'a pas été inventé à la légère, ça raconte
des choses profondes. Souvent la convention en remplace une autre et le contre-emploi
devient un académisme. On est tellement allé vers le contre-emploi, on a
tellement voulu raconter autre
chose que ce que racontaient les pièces, surtout les grandes pièces de répertoire,
que maintenant revenir à l'origine de la pièce, donc à l’emploi, c'est
très subversif.
L’art
peur-il aspirer et atteindre une unanimité du public et de la critique ?
L’artiste
doit-il la rechercher ? Peut-il être consensuel ?
Non.
Ça n'existe pas, ce n'est pas possible. De toutes
façons il ne faut pas se poser la question, on sait très bien que ça ne marche
pas. Évidemment je préfère avoir de bonnes critiques et je préfère que la salle
soit pleine, mais c'est imprévisible. Par exemple je ne pensais pas que la
pièce d'Orton allait choquer autant, alors qu'on a eu des
bonnes critiques. Sur Maison de poupée on a eu des critiques qui étaient très
violentes alors que j avais l'impression de
faire un spectacle très classique. Quant au Récital
je ne me doutais pas qu'il atteindrait un public si large. C'est
totalement mystérieux, et c'est tant mieux.
Quelle
est votre définition du kitsch ?
Le
kitsch est noble pour moi, c'est positif. C'est l'excès,
c'est le trop. Le trop peut être dans le creux, ça peut être un vertige
intéressant mais le kitsch, c'est un trop exacerbé. J'aime l'excès. J’aime les
choses radicales.
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Je vais ouvrir un nouveau genre non pas l'auto fiction c'est déjà fait mais l'auto interview à savoir que je est un autre, commandé par un surmoi et que j'adore apporter les réponses à mes propres questions.... On me dit souvent si fu fais toi-même les questions et les réponses inutile de m'interroger. Voilà je ferais cela à partir d'interviews déjà faites quoiqu'intéressantes elles me laissent toujours sur ma faim. Beaucoup de gens j'ai rencontrés, me dit-on eh bien justement .... pas besoin de relectures données à l'intéressé, de rencontres qui jamais ne se réalisent : tu es encore venue me voir, il faut qu'on dine ensemble tous les deux.
Bon je commence par exemple avec Michel Fau : certains vous taxent de réactionnaire que leur répondez-vous ?
- pas même qu'ils sont jaloux ou que je cherche une revanche il faut toujours passer par le cliché pour une réponse inattendue... je cherche comme tous à exprimer à travers ma singularité une certaine modernité et surtout ne pas me laisser enfermer dans des tendances.... on a tout essayé les cyclos comme fond de scène on en a autant abusé qu'aujourd'hui des vidéos alors que par les lumières et les décors on peut créer comme de l'usure de la décomposition de la défragmentation de l'effondrement.... et de la joie par le jeu des acteurs de la synesthésie de l'identification par un geste et de la générosité en offrant son visage maquillé avec soin goût grâce et intelligence des rôles c'est ma sœur qui crée les maquillages.
Michel Fau
Michel Fau
Catherine Piétri et Norah Krief
Pascale Fau
Philippe Person sur le Bosphore lors de la tournée de Manger
Philippe Person Christophe Sauger Nathalie Savary Xavier Hollebecq répétitions essais de Tout sauf aimer
Grégory Guillotin
Olivier Steiner
-Olivier Steiner on vous admire parce que l'on vous craint comment expliquez-vous que bcp de gens vous gardent comme de l'affection...
- parce que je suis une pute telle Maya, je saisis les fantasmes qu'on a de moi les excite et puis les frustre infiniment et je n'ai pas peur d'aller voir toujours ailleurs et tout le monde sait que je suis ambitieux alors on m'accorde le bénéfice du doute, et puis après on sait ce que je pense des gens.
- Vous pouvez être redoutable ?
- pas autant qu'un grand sportif ou un grand joueur d'échecs mais il y a de ça, de l'émancipation de l'émulation par la compétition mais vous savez j'aimerai bien mieux qu'on soit heureux et reconnus tous à notre juste valeur....
-Philippe PERSON on dit que vous résolvez bien des conflits par la séduction...
- oui j'aime la compagnie des femmes mais je suis aussi un solitaire un indiscernable on ne sait pas ce que je pense alors on m'attribue bien des raisonnements.... j'aime toutes
les compagnies, j'aime être heureux en compagnie par le theatre voir de la Régie les personnes s'avancer en confiance, sur les planches c'est presqu'une renaissance. Sinon je suis plus timide que pudique mais beaucoup confondent...
-Catherine PIETRI : femme de caractère, c'est cela qu'on dit de vous.
-Oui, alors que j'ai une certaine autorité naturelle et surtout je sais ce que je ne veux pas, Je suis très fidèle en amitié. Mes goûts en matière de jeu de scénographie sont très affirmés et surtout j'ai une belle complicité avec un homme qui correspond à mes choix artistiques et qui m'apporte beaucoup depuis des années.
-Vous avez été ensemble avec... ?
-C'est ma vie privée est-ce que vous poseriez cette question à un luthier ou à un ébéniste, j'adore le bois... je ne peux m'empêcher de passer ma main sur tous les bois... qu'ils soient table ou violon....
- Jean-charles Dumay, vous êtes très discret sur vos origines comme sur les cours que vous avez fréquentés... sur les gens qui vous sont proches
- oui car je suis très curieux des autres...
- je dirais que vous êtes un ancien charmeur devenu plus protecteur
-Christophe ALévêque, vous avez connu Nathalie Feyt ? Oui dans un cours de theatre déjà la je faisais des one man show, je voulais être humoriste...
-Grégory Guillotin : votre personnage de Bengui et sa mère ont la même naïveté, dans la vie c'est Nathalie Feyt, elle a été un de vos profs de théâtre dans un atelier d'amateurs, mais elle était plutôt l'assistante comment l'avez-vous connue en tant qu'actrice, jouait-elle avec vous ?
-Non juste pour des passages très brefs, mais elle nous faisait rire et dans la vie aussi et surtout ses conseils critiques étaient avisés toujours détaillés, elle nous était utile....