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lundi 13 juillet 2009
Voyage au-delà de la nuit avec Wajdi Mouawad
Une scène de la pièce Incendies. La dernière représentation des trois pièces avait lieu cette nuit. : Photo PQR
Festival d'Avignon. À travers un spectacle de onze heures, le dramaturge francophone a offert un grand moment au public de la cour d'honneur du Palais des papes.
Avignon. De notre envoyé spécial.
Avignon affectionne ces spectacles au long cours, qui partent à la conquête de l'auditoire. Il y a eu, en 2005, Les Vainqueurs d'Olivier Py, et, l'année suivante, Les Éphémères d'Ariane Mnouchkine. En la matière, l'intégrale, en 1987, du Soulier de satin de Paul Claudel, dans la mise en scène d'Antoine Vitez, reste la référence mythique. Onze heures de théâtre... et entractes.
Wajdi Mouawad relève le défi, lui aussi, dans la cour d'honneur, avec Le sang des promesses. Même durée. Mais il s'agit là d'une suite de trois pièces déjà créées séparément. Le quatrième volet, Ciels, est attendu pour fin de cette édition 2009 du festival.
Il est 7 h 30. Avignon s'éveille. Au-dessus des gradins du Palais des papes, le ciel promet une nouvelle belle journée. Un tonnerre d'applaudissements brise un silence monacal. Les spectateurs sont debout, pour beaucoup encore enveloppés dans des couvertures couleur de bures. Cette salve plusieurs fois répétée a un effet libératoire, tant l'écriture du dramaturge libano-québecois contient son lot de tensions et d'émotions.
N'y aurait-il plus que le malheur pour inspirer le théâtre ? La question n'est pas si simple avec Wajdi Mouawad, même si sa vie personnelle profondément marquée par la guerre et l'exil a partie liée avec son oeuvre. C'est vrai avec la pièce d'ouverture, Littoral, ou les tribulations tragi-comiques d'un adolescent, qui ramène au pays son défunt père. C'est vrai encore avec Incendies, où un frère et une soeur doivent partir, sur les consignes testamentaires de leur mère, à la recherche de leur père et de leur frère.
Ça l'est moins avec sa troisième pièce-fleuve, Forêts. Wajdi Mouawad déploie un étonnant talent à dévoiler progressivement les tenants et aboutissants de ses intrigues et drames. Et là, il se surpasse. Ce qui n'est pas sans risque, quand le seuil d'écoute passe aux heures sup'.
L'histoire de Loup, jouvencelle au look gothique, démarre comme un thriller de Franck Thuillez, auteur féru de neurologie. Et puis grimpe dans les branches d'une généalogie aux destins de tragédie grecque et luxe de coups de... théâtre.
Mais les trois pièces de vies et de morts sont traversées par la même quête de l'identité et la promesse de l'apaisement de soi. Cette triple saga tient, elle, ses promesses d'un grand moment. Elle le doit aussi à une formidable équipe de comédiens, dont le conteur vendéen Yannick Jaulin.
Xavier ALEXANDRE.
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