dimanche 26 novembre 2006

Délivrez Proust ...

Délivrez Proust ...
d'après Marcel Proust de Philippe Honoré

Mise en scène de Philippe Person
Avec Anne Priol et Pascal Thoreau
Lumières Alexandre Dujardin
Décor Vincent Blot

Théâtre du Lucernaire
53, rue Notre-Dame-des-Champs 75006 Paris
Reservations au 01 45 44 57 34 ou sur www.lucernaire.fr
Du mardi au samedi à 20 H 00
dimanche à 17 H 00

la 1ère c'était le 15 nov j'ai vu le spectacle à Avignon et à Paris donc je peux vous le conseiller
Proust se délivre... au Lucernaire
J'y suis allée deux fois et j'ai pleuré ri me suis comme rebaignée
réhydratée
la thalasso des pensées des rêves et des souvenirs par les mots,
les livres, les voix,
de longues pages d'insomnies délicieuses car c'est comme cela, que nous sont aussi dévoilées déchirées toutes les parodies, du beau du laid des sentiments des liaisons et de leurs trahisons des rites humains : la vie et ses strates de préhension à haute voix
vous suivez ? pas du tout ? tant mieux.....
je rappelle au Lucernaire à 20h tous les jours et le dimanche à 17h
Il n'y avait pas grand chose au théâtre, eh bien! voilà ça arrive et
avant les fêtes....
D'autres avis celui du metteur en scène : Philippe Person
"Proust c'est aussi un western écrivait Gilles Deleuze
Nous allons vous le prouver.
Pourquoi vouloir toujours séparer le drôle et le sérieux, le rire et l'émotion ?
Délivrez Proust vous entraîne dans un tourbillon ludique et bouleversant."
...
de François Morel
"On rit souvent et puis on quitte la salle les yeux embués par l'émotion.
Ce ne sont pas les phrases de Proust qui sont trop longues,
c'est le beau spectacle de Philippe Person qui est trop court !"
...
de Daniel Pennac
"Venez avec moi délivrer Proust et vous verrez s'entrouvrir
toutes les portes de nos prisons intimes

Adieu Philippe Noiret


Adieu tendre Monsieur Philippe,
qui interprèta le régent "Philippe le caressant"
je vous remercie infiniment.
Aujourd'hui je me sens orpheline le mot est un peu fort, d'autant, par rapport à ce Monsieur Philippe, je ne peux qu'avoir de la décence et de la délicatesse et je ne suis pas proche ni affectivement ni professionellement de Philippe Noiret... mais je lui avais écrit une fois et il m'avait répondu me remerciant de ma lettre sensible et m'engageant à persévérer dans mon amour du théâtre en précisant que c'était facile pour lui d'écrire cela, mais que le théâtre comme toutes les histoires d'amour étaient des "patiences" (ce mot je le reprends du Proust mis en scène par cet autre Monsieur Philippe... Person au Théâtre du Lucernaire et que je viens de voir et de beaucoup aimer ; je ne fais pas de publicité ; je récolte les signes, pour aider ma troupe d'amis, ma famille).
Car comme toutes les histoires d'amour, disais-je, la lettre de Philippe Noiret je ne m'en souviens pas bien et je l'ai brûlée, je ne m'imaginais pas vieille l'utiliser comme une relique (et maintenant et depuis des années je regrette).
C'était à l'occasion de la sortie d'un film qui est passé inaperçu avec Jean Rochefort sur l'amitié, au sein d'un orchestre : L'Ami de Vincent.
Là orpheline, à consulter comme beaucoup sa biographie je découvre que... il a échoué plusieurs fois au bac, comme moi exactement,
ah ! je comprends d'autant son sens de l'humour acéré intelligent et provocateur, c'est un de ses petits signes à tous les loupés, l'élégance, c'est quelquefois ne jamais se décourager.
Ce monsieur m'a appris aussi en dehors de son métier à respecter les gens de droite, pensez-vous je me suis toujours sentie de Gauche et maintenant avec les années et l'immense déception suite au gouvernement socialiste en France je me dis que c'est beaucoup plus compliqué...
c'est c'était un acteur sensible et intelligent amoureux du partage et fustigeur d'une certaine connerie d'enrichi. Il y a son ami Monsieur Rochefort qui est de la même bande, quand il déclare qu'il faut être bien pervers pour inventer du poulet pour pauvres
j'écris trop mais comment m'arrêter :
imaginez si dans notre vie Philippe Noiret n'avait pas existé...il est trop haut trop loin de moi
mais justement par là et parce que.....par ses films
sa simplicité discrétion sur sa vie privée
il est d'autant plus proche de nous tous c'est un véritable acteur populaire
je n'ai pas raté l'occasion de le voir au théâtre dans ces deux dernières pièces pour "les Côtelettes" j'ai crié bravo Philippe !
parce que c'était un retour au théâtre et pas n'importe lequel, avec cet immense habitué des planches Michel Bouquet et avec cet autre grand artiste Bertrand Blier,
J'étais ce soir là un peu au Paradis ou paraît-il il y a des créneaux pour fumer un cigare avec Hitchcock, lire des poèmes avec Shakespeare, parler planches et festival avec Monsieur Jean Vilar et Maria Casarès, elle arrange avec talent tous les conflits...
S'il est un Paradisio, Philippe Noiret est avec Monsieur Altman, et de Broca et tous plein d'anonymes qui le reconnaissent
je ne me fais pas trop d'illusions mais il est un entre deux avant que tout disparaisse...
merci monsieur Philippe
pour
LA VIEILLE FILLE, LA GRANDE BOUFFE, L'HORLOGER DE ST PAUL, QUE LA FÊTE COMMENCE, UN TAXI MAUVE, NOUS DEUX, LES RIPOUX, LA VIE DE CHÂTEAU, LE JUGE ET L'ASSASSIN, PÈRE ET FILS, CINÉMA PARADISIO, COUP DE TORCHON, LES GRANDS DUCS, LE FACTEUR, GROSSE FATIGUE, L'AMI DE VINCENT, PILE OU FACE, LES ACTEURS,
ALEXANDRE, LE BIENHEUREUX, TOUCHE PAS À LA FEMME BLANCHE, LA VIE ET RIEN D'AUTRE...
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A son dernier voyage et...
à ses derniers bravos et enfin
aux photographes qui ne peuvent afficher autre chose que le grand manteau de bois verni couvert de fleurs orangées.

Les comédiens sont depuis plusieurs siècles enterrés dans les cimetières et locataires des églises et du clergé pour leur dernier voyage.
Monsieur Philippe Noiret, j'avais besoin de grossir le flot des anonymes. Car à votre enterrement j'ai cru comprendre que votre discrétion n'était pas une légende, car le flot la foule les gens sont restés discrets sur le coté et derrière toutes les barrières : vous ne faîtes pas partie des amis et des proches...
Je crois que Ste Clothilde était assez grande pour accueillir quelques anonymes "infiltrés"...
Mais moi, je ne veux pas voir je suis là et je ressens votre présence. Les comédiens sont les seuls qui se font encore applaudir quand on soulève leur cercueil. J'attends là dehors, à côté des CRS, j'ai mis un chapeau borsalino et une fleur à la boutonnière.

Il y a le bruit des cloches et le soleil d'automne, la douceur est telle que la végétation, elle-même, s'interroge sur la saison.
C'est l'automne, Monsieur Noiret est mort, et la terre d'ici ne sait si elle doit refleurir ou enterrer.
Les seuls papillons sont les photographes et les journalistes à caméra, ils n'ont pas encore pompé leur lot d'images.
Ils recrutent vite fait quelques plans possibles sur les petits groupes d'anonymes, mais s'agglutinent se décorent en pièce montée pour capter à la sortie de l'église les célébrités.
Du côté "jardin" de cette église, avec ma myopie et ma mémoire qui déteint, j'ai reconnu plus de politiques que d'artistes.
Mais j'ai vu celui devant lequel j'aurai bien donné "un coup de torchon" : Monsieur Eddy Mitchell qui a toujours su à sa façon, faire sa fête, au cinéma."Un grand enfant"?
Pourquoi, la Nouvelle Vague n'a pas voulu des trois compères : Marielle, Noiret et Rochefort?
Je commence à me poser les questions rabâchées,car je ne sais plus sur quelle jambe me reposer.
Il me manque dans les vivantes, une voix chaude et émouvante, habitée au point d'envahir un silence mortel.
"Entrez, et que la fête commence..." venez tous "boire un canon..."
Madame Girardot perd la carte et Monsieur Noiret a fermé son parapluie.
Le bruit des cloches a retentit pour le final.

Je vais vous tenir compagnie Monsieur Noiret le plus que je peux, par toutes les forces de ma pensée. Et vous allez habiter à Montparnasse, c'est un bon cimetière pas trés loin de chez nous, à cinq stations de métro. Je reviendrai vous voir pour vous d'abord et puis pour votre femme dont je n'ai jamais oublié le visage depuis les photos que j'ai apprises par coeur du TNP, Monique Chaumette, c'est la même avec des cheveux gris c'est le même sourire en habit noir. Je reviendrai par intermittence, pour que vous n'oubliez pas l'hommage des anonymes, des malchanceux, que vous avez porté un peu malgré vous, sur des ailes de vieil ange, dans bien des films.

Je viendrai à cause du chagrin que vous laissez en partant ce chagrin immuable
Au fait le vieil ange, si en passant vous reconnaissez un de mes amis un des meilleurs comédiens qui a existé fauché vous savez par l'affreuse maladie qui mêle à ce qui peut-être le plus doux le meilleur entre deux humains qui mêle à l'amour la mort, vous savez cette maladie qu'on oublie car maintenant ça se passe ailleurs : le SIDA, si vous le rencontrez, il s'appelait Bruno Collomb, il a joué au théâtre : le gardien, l'éducateur d'un prince, Rosencrantz dans Rosencrantz et Guildenstern sont morts de Tom Stoppard
et il a joué au théâtre l'amoureux dont j'étais "la vierge folle"...

Où suis-je, où vais-je ? de quel film à quelle réalité ? Mais, au fait Monsieur Philippe Noiret
comme dans "Grosse fatigue" c'est peut-être votre sosie qui vous a sucré la place ? Vous trouviez qu'il en faisait toujours trop... Oui, c'est cela c'est lui qui est sous terre et vous ? vous êtes allé jouer un peu plus loin, et quand vous rentrerez, votre chien et vos cheveaux seront les premiers à vous reconnaître, juste avant le sourire de votre princesse aux cheveux gris.

vendredi 24 novembre 2006

"LADY CHATTERLEY", DE PASCALE FERRAN


Marina Hands dans "Lady Chatterley" : une exaltation dionysiaque de la puissance de l'amour.






je ne sais pas si ce film est bien distribué mais je connais de très bons cinémas en "Province" et comme j'ai envie de prévenir le monde des hommes et des femmes de ce dernier film.
Il n'est pas toujours bon d'avoir lu une critique avant d'être allée voir un film
faites comme vous êtes, (-merci!!!),
j'ai tellement aimé cette femme et cet homme tout simplement -un long temps-
l'article critique je l'ai trouvé après avoir passé, grâce à ce film entre autres photos de la journée, une excellente AM d'automne où je me suis laissée allée à prendre -un long temps- de vie d'abord d'amitié et de cinéma aussi.
je n'ai qu'un regret c'est de n'y être pas allé avec mon Ami...
J'attends vos avis en retour

LE MONDE | 31.10.06 | 17h24
"LADY CHATTERLEY", DE PASCALE FERRAN
Film français avec Marina Hands, Jean-Louis Coulloc'h, Hippolyte Girardot, Hélène Alexandridis, Hélène Fillières (2 H 30)
L'âpreté rayonnante de la chair

Un véritable miracle. C'est la première sensation qui s'impose à la vision de ce film bouleversant, qui scelle l'improbable rencontre d'une cinéaste française trop rare (Pascale Ferran) et d'un texte anglais trop connu (L'Amant de Lady Chatterley, publié en 1928 par l'écrivain anglais David Herbert Lawrence). Même si, en vérité, Pascale Ferran s'est attaquée ici à une version antérieure et méconnue du texte canonique, intitulée Lady Chatterley et l'homme des bois (publié aux éditions Gallimard).
A quoi tient, en tout état de cause, le miracle ? Pour le dire en un mot, au fait que ce film renoue avec un génie cinématographique national qu'on croyait révolu. Ce réalisme lyrique, cette élégante fluidité, cet intimisme palpitant au rythme du monde, cette âpreté rayonnante de la chair, cette justesse d'approche et de ton, enfin, qui va droit au coeur des êtres et des choses, et qu'on ne croyait plus possible de voir et de ressentir avec une telle intensité depuis Grémillon, Renoir ou Pialat. (...)
Incarnée par deux acteurs sidérants (Marina Hands ou la grâce absolue, Jean-Louis Coulloc'h ou la virilité magnifiée), aux côtés desquels Hippolyte Girardot campe un Clifford Chatterley magnifique de raideur, cette histoire si simple devient ainsi une exaltation dionysiaque de la puissance révolutionnaire de l'amour contre l'aliénation sociale qui paralyse, insidieusement ou manifestement, les hommes. A ce titre, ce qui se joue dans le film se joue aussi bien pour le film, dont le projet et la mise en oeuvre relèvent de l'utopie. Comment convaincre aujourd'hui quiconque qu'il est possible d'adapter au cinéma un classique de la littérature mondiale avec un budget restreint, possible de risquer une reconstitution historique en la limitant à quelques lieux et personnages qui se comptent sur les doigts d'une main, possible de faire durer ce plaisir deux heures trente ?

Il y a pourtant plus de cinéma dans ce film que dans beaucoup d'autres qui ne s'en réclament qu'au titre de la plus-value de budget, de stars ou de salles. Pascale Ferran prouve a contrario que tout tient, en la matière, au regard qu'on porte sur les choses, et au temps qu'on s'accorde pour les faire vivre et les voir changer. L'histoire de Constance et Parkin n'est rien d'autre que celle d'une différence fondatrice (d'origine, de sexe) et d'une passion obstinément muette que le film transmue, dans le mystère de la chair, en une possibilité ultime de parole enfin partagée. Cela, seul le cinéma le peut, et quand il le peut avec cette intensité d'inspiration et de désir, c'est tout simplement éblouissant.
Jacques MANDELBAUM