mardi 25 juin 2019

Francesca Melandri : Plus haut que la mer

Dans la série livres italiens consolateurs : pour moi, les italiens sont revenus de tout et savent que le Pire peut toujours attendre comme ne jamais arriver. Après la saga des 4 volumes d'Une amie prodigieuse celui-ci est bien arrivé dans ma vie. C'est une femme qui aime les romans militante à Lutte ouvrière et bénévole à la Cité du Roman qui me l'a conseillé en me disant, c'est un peu comme la Route Madison mais en plus cela se passe sur une île ou sont enfermés les prisonniers de haute sécurité...
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Extraits :
p 156
« Elle est comme ça cette ile, poursuivit Nitti. Elle te laisse dans le silence pendant des jours. Puis, elle t'envoie quelqu'un qui écoute, et alors il faut t'abattre à coups de fusil pour te faire taire. »
p 171
"Le jour où on a arrêté mon fils, on a parlé de lui dans tous les journaux télévisés. Et aussi de ses victimes, du moins des victimes avérées. Le lendemain matin, j'étais à l'école. J'avais des garçons de terminale et nous étions en train d'étudier Kant.
–Qu'est-ce que c'est ?
–Un philosophe.
–Ah! Difficile ?
–Euh! Oui, parfois. »
Paolo regarda la lune. Elle était maintenant dégagée des nuages et ses cratères se détachaient  nettement comme des empreintes sur de la neige fraîche.
"la plus belle phrase qu'il est dit n'est pas du tout difficile, pourtant.  « Deux choses remplissent mon cœur d'admiration et de vénération : le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi. »
p 177
"Entourée des bras de Paolo, Luisa pleura, pleura comme elle ne l'avait jamais fait de toute sa vie. Elle pleura ses douleurs menstruelles assise sur le tracteur. Elle pleura les raviolis que sa plus jeune fille avait enviés et qui avaient fini à la poubelle. Elle pleura les chaussures d'homme que depuis des années, en novembre et en avril, elle sortait de l'armoire pour les cirer. Elle pleura la petite fille qui avait trois ans avant et qui en avait six maintenant, et elle pleura son très beau prénom. Elle pleura ses enfants qui s'entendaient dire dans la cour de l'école : "Ton père est un assassin." Elle pleura cet homme que, la veille encore, elle ne connaissait pas et par la bouche de qui sortaient des sons de souffrance. Elle pleura l'étreinte qu'il lui donnait. Elle pleura le compagnon de beuverie que son mari avait battu à mort par une nuit d'hiver, elle pleura son mari roué de coups par les collègues du deuxième homme qu'il avait tué. Elle pleura sa propre peur de jeune épouse au sommet de la montagne. Elle pleura la première fois où on l'avait invitée à danser, elle pleura le beau sourire dont elle était tombée amoureuse. Elle pleura les fouilles dans les antichambres du parloir. Elle pleura le pédophile si gentil avec les enfants. Elle pleura sa jeunesse et son enfance, elle pleura le goût des pâtes aux oursins, elle pleura sa fille qui lui avait dit :" Ne t'inquiète pas. " Elle pleura parce qu'elle ne pleurait plus depuis l'âge de 13 ans et parce qu'on n'avait plus caressé ses cheveux depuis l'âge de 10 ans."
p 210
Et pourtant, ils riaient tous les deux,  ils riaient à gorge déployée,  ils riaient en faisant du bruit.  Ils riaient comme de vieux époux qui ont élevé ensemble leurs enfants et vu leurs petits-enfants devenir grands. Ils riaient comme s'ils étaient sûrs de se réveiller le lendemain dans le lit où ils avaient dormi enlacer pendant 50 ans, sa poitrine à lui, couverte de poils blancs, coller contre son dos à elle, maintenant parsemé de taches mais qu'il aimait autant qu'à  l'époque où il était lisse comme de la soie. Ils riaient comme un homme et une femme qui se regardent dans les yeux et voient défiler devant eux les années, les mois, les jours, les heures qu'ils ont partagés."

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