lundi 16 décembre 2019

La chaleur de Victor Jestin

https://youtu.be/yEoTKnMH3gI
À la Hauteur de ses ambitions, car jamais perdu, ni aspiré par aucun genre, ni références. Très littéraire mais limpide et très vivant. Et comme dans la vie les histoires d’amour finissent toujours mal !!! Mais de son livre on ne s’en sort pas indemne. Lisez le mais ne cherchez pas l’auteur sur les réseaux sociaux il en est exempté...





Sur la photo à la Librairie de mes ami(e)s il s’efface derrière ses lecteurs. lectrices  et m’a laissé une bien belle dédicace, nous avons parlé comment, entre autres choses,  chaque lecteur habite dans un livre,  comment il singularise sa lecture, lui corne les pages, moi je note avec des croix sur les pages ou mets entre crochets des passages au crayon à papier. Nous avons dit qu’à relire tous nos extraits, on revit, revoit tout le livre, le nôtre. 

Mon premier post sur FB avec ces photos car nous avons parlé aussi de Gloria Mundi : il en est parti au bout d’une heure tellement les personnages des deux jeunes couples lui ont semblé insupportables dans ce film. C’est vrai que le personnage de Léonard de son roman est d’une autre planète.

La signature de Victor Jestin : La chaleur sur la photo avec Sylvie Anne Anabel, ce roman est si pur, une épure d’entre les mots, musical, sensuel et pas une once de vulgarité (contrairement au film Gloria Mundi de Guedigian et j’ai compris pourquoi ?  parce que les caricatures de personnages associent des idées : les jeunes arrivistes et drogués sont sexués : le sexe au milieu d’autres perversions uniquement attribuées aux jeunes). À lire absolument et ce livre se déroule à la période des vacances sur un camping dans les Landes, à l’âge qu’on dit merveilleux celui dé l’adolescence à l’âge adulte en passant par
l’esseulement de l’apprentissage amoureux... ce livre est incandescent et « pas seulement en surface« , sous « la chaleur » exactement... 
Bravo.

Extraits 
P 10 
Cette nuit là j’ai préféré me relever et marcher dehors. Tout était calme de ce côté. Les tentes et les bungalows se confondaient en nombre. Seul le distributeur de préservatifs continuait à briller. Ça disait protégez-vous. Ça disait faites-le, surtout. Chaque soir les ados en achetaient, fiers et honteux. Acheter, c’était déjà le faire un peu. Souvent ça finissait en ballon de baudruche et ça crevait dans les airs, comme un nerf qui claque au fond du cœur.
P 40-41
D’habitude, nous passions les vacances en famille chez les grands-parents. Mais celles-ci avaient constitué un horizon depuis l’automne. Les parents s’y étaient accrochés. Certains soirs en rentrant du travail, ils nous avaient montré des photos des Landes et des vidéos en direct pour voir la plage à toutes les saisons. Ç’a avait été de longs préparatifs. D’abord, acheter des tentes, du matériel de camping et des body-boards. Traverser ensuite la France. Sur place il avait fallu payer encore pour la vue, l’emplacement, l’accès direct à la plage. Enfin il y avait eu les sorties et les restaurants pour aller jusqu’au bout du plaisir. On avait répété souvent que le paysage était beau, « vachement beau », pour le rentabiliser. Une fois, un nuage gris s’était pointé dans le ciel et chacun de nous, même Alma, avait feint de ne pas le voir, pour que rien ne gâche la joie. 
P 67-68
J’ai tenté d’imaginer ce que cela faisait d’être lui en permanence, mais je n’ai pas réussi non plus.
En face, un homme repliait sa tente. Je l’avais déjà vu. Il devait avoir 40 ans et il n’était pas très beau. Une semaine auparavant, il est arrivé seul sur cet emplacement trop grand pour lui. Il avait rempli l’espace avec une table, des chaises et des guirlandes lumineuses. Il avait installé sur le coffre de sa voiture une antenne qui lui permettait d’avoir la télévision dans sa tente, ce que la majorité des campeurs jugeait de mauvais goût. Il s’en était peu servi. Il était souvent resté dehors à regarder les gens passer, surtout les femmes. Le matin seulement, il était allé courir dans la forêt. Personne n’était venu s’asseoir sur ses chaises.  Ses guirlandes s’étaient détachées plusieurs fois et il les avait toujours remises en place. Il achevait ses vacances maintenant, on ne le reverrait plus. Il disparaîtrait en franchissant ce porche qu’il avait franchi le samedi d’avant, dans l’autre sens en klaxonnant.
P 80-81
Elle ne m’aime pas. Elle ne m’aime plus. J’ai mis l’éternité dans deux heures qui n’étaient rien pour elle, elle est partie laver son linge et elle est revenue.
P 85-86
–T’as envie de quoi, alors ?
–Je ne sais pas…
–Qu’est-ce que tu veux, au fond ?
–Je ne sais pas… Je ne sais pas.
J’étais gêné. Ça l’amusait.
–C’est pas grave si tu ne sais pas. Et puis c’est peut-être juste ta musicologie qui t’intéresse pour l’instant.
–Merci.
–D’ailleurs qu’est-ce que tu écoutes, comme musique ?
–Un peu de tout…
–Les gens qui disent ça, on a envie de les frapper.
–Pardon. J’aime bien… La musique classique.
–Je connais pas beaucoup de choses en musique classique, mais j’adore Chopin.
–Chopin, ce n’est pas de la musique classique à proprement parler, l’ai-je corrigé en rougissant. C’est plutôt de la musique romantique.
Elle a souri et s’est excusée d’un signe de tête. J’ai eu envie d’autres questions.
P 104
La majorité de ceux de notre âge se fédéraient autour de gens comme Yann. Un détail dans leur regard ou le timbre de leur voix leur valait naturellement de mener les troupes. Ils irradiaient avec quelque chose de chaud, d’incandescent tout en surface qui suffisait à éclairer les yeux des autres, bien qu’à l’intérieur tout soit vide et froid, sans aucune musique.
P 110 
Les vacances nous presseraient entre leurs mains jusqu’au bout.

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