jeudi 8 novembre 2007

Michel FAU suite et vie et fin d'une critique, comment les affronter, comment en jouer les déjouer...


  • L'ignorant et le fou **Théâtre de l'Athénée, Square de l'Opéra Louis-Jouvet, 7 rue Boudreau, 9e. 01 53 05 19 19. Jusqu'au 4 novembre.La Reine de la nuit est en retard pour la représentation. Dans la loge, son père s'inquiète, en compagnie d'un médecin qui décrit à l'envi des exercices d'autopsie. La vie est une torture et Thomas Bernhard dissèque ces trois monstres immuables. Dans le rôle du docteur obsessionnel, Michel Fau atteint des vertiges d'étrangeté, surprenant, inquiétant, drôle. Quant à Dominique Valadié, elle fascine. Même absente de la scène, elle imprime sa présence et ses accès de toux sont irrésistiblement bernhardiens, hoquets de haine, de folie, de dégoût. Face à ces deux interprètes éblouissants, Roland Bertin impose un père odieux et mystérieux. C'est captivant, fort, troublant.Dominique Valadié, une Reine de la Nuit projetée dans les étoiles.

  • "Si nous n'avions pas la faculté de divertir notre esprit/cher monsieur/nous devrions admettre/que nous n'existons plus du tout/l'existence est, notez-le bien, toujours/une diversion de l'existence/nous n'existons que parce que/nous faisons diversion à notre existence même." Celui qui parle est un médecin, spécialiste de la vivisection. Il s'adresse à son ami, un homme âgé qui s'imbibe de schnaps et vit collé à sa fille, une chanteuse d'opéra qui est la plus célèbre des coloratures. Ce soir-là, elle va être La Reine de la nuit, dans La Flûte enchantée, de Mozart, pour la 222e fois. L'ART DANS TOUS SES ÉTATS La première partie de la pièce se passe dans une loge de l'opéra, la seconde dans un restaurant, après la représentation. La Reine de la nuit a triomphé. Elle est au bord de l'épuisement. Pas seulement celui qui suit la performance, mais celui qui fait de chaque jour une performance. Et c'est cela que déroule L'Ignorant et le Fou. La logorrhée du médecin sur la vivisection enveloppe les considérations du père et de la fille, comme une allégorie atrocement réelle sur l'art dans tous ses états, et l'art et la manière de vivre.

  • Comme toujours avec Thomas Bernhard, on rit parce que "ce qui en réalité/est une tragédie/est une comédie/cher monsieur". Mais ce rire qui éclate, s'écrase aussitôt comme un corps en chute libre. C'est tout sauf celui que procure un clown. Et c'est là que pèche la mise en scène d'Emmanuel Daumas. Sa distribution réunit Roland Bertin, impressionnante masse de chair, dans le rôle du père, Dominique Valadié en Reine de la nuit, et Michel Fau en médecin. Cet acteur a un don comique inaltérable, qui fait merveille quand il joue avec Olivier Py. Mais là, il appuie sans nuances alors qu'il faudrait jouer un comique indissociable de l'inquiétude, à la Michel Serrault. Comme c'est lui qui tient l'essentiel du texte, il déséquilibre la représentation - les autres n'existent pas comme ils le devraient - et lui donne un ton outré qui épuise. Mais on est loin de l'épuisement existentiel de Thomas Bernhard.
  • Trois monstres pour lesquels il faut de sacrés pointures d’acteurs. Ceux réunis par Emmanuel Daumas, metteur en scène scrupuleux, chassant la justesse bien plus que l’effet, sont tout simplement fabuleux. Roland Bertin, présence compacte, absente, dodelinant hors du réel, parle peu mais s’impose, Michel Fau déblatère, lance comme un jongleur des chapelets de phrases, de sentences, d’invectives, ahurissant d’à propos, d’évidence, Dominique Valadié enfin, impératrice née dans les égouts, tour à tour triviale et aristo, se livrant à d’invraisemblables exercices vocaux, prodigieuse d’abatage et d’humour. On savait qu’elle était l’une des meilleures comédiennes de sa génération. Cette Reine de la Nuit la projette dans les étoiles.
  • De sa loge d’opéra jusqu’à l’auberge des Trois Hussards après la représentation de La Flûte enchantée, la cantatrice (Dominique Valadié) aura été le sujet de toutes les préoccupations d’un père (Roland Bertin) aveugle et alcoolique, qu’un médecin (Michel Fau) ami tente de divertir au mieux de l’inquiétude par un bavardage sans limites et son goût immodéré pour les opérations légistes. Un quatrième personnage (Vincent Deslandres) sera aux petits soins de tout ce petit monde d’abord en habilleuse de la diva, par la suite en qualité de maître d’hôtel. Près de vingt ans après sa mort, Thomas Bernhard sait provoquer toujours autant qu’il amène les consciences à une réalité du dérisoire face aux prétentions humaines. L’art et la mort sont constamment au coeur des préoccupations du dramaturge autrichien qui, de santé vacillante, n’aura jamais pu réaliser ses ambitions musicales de jeunesse. Une rencontre privilégiée entre Dominique Valadié et Emmanuel Daumas, le metteur en scène, avait initié un puissant désir de monter ensemble un projet pour lequel il fallait trouver "un texte monstrueux et drôle... Quelque chose entre l’engagement d’une vie dans l’art et le dégoût de l’art face à la barbarie". L’Ignorant et le Fou est donc la réponse implosive à ce souhait théâtral commun que Michel Fau va catalyser du début à la fin de la représentation dans un délire logorrhéique hors normes, au demeurant fort convaincant. Quant aux prestations de Roland Bertin face à Dominique Valadié, elles semblent pour leur part flotter entre deux eaux, en des flûtes enchantées de champagne, coulant à flots de maux renversés à la nique du désespoir. D’ailleurs, un spectacle où est assumé concrètement le plaisir de l’auteur à tirer la langue au public, est nécessairement revigorant.
Renseignements sur le spectacle et sa tournée pour ceux qui n'ont pu y aller, qui n'habitent pas Paris....
L’ignorant et le fou de Thomas Bernhard, traduction Michel François Demet, mise en scène Emmanuel Daumas, scénographie, costumes et vidéo Saskia Louwaard et Katrijn Baeten, lumières Bruno Marsol. Avec Roland Bertin, Michel Fau, Dominique Valadié, Vincent Desclandres. Paris – Théâtre de l’Athénée jusqu’au 10 novembre – 01 53 05 19 19

En tournée : 13,14 & 15 novembre – MC2 de Grenoble – 04 78 15 01 80 18 décembre : Théâtre de Bourg en Bresse : 04 74 50 40 00 11 janvier 2008 : Théâtre de Villefontaine – 04 74 80 71 85 du 15 au 22 janvier : Comédie de Valence : 04 75 78 41 70 /24 janvier – Théâtre de Vienne : 04 74 85 00 05 /29 & 30 janvier : Théâtre de Villefranche-sur-Saône : 04 74 68 02 89


Michel Fau, 4 critiques, il a tout entendu sur son jeu et dès ses débuts après le Conservatoire, je peux vous le garantir et cela de ses meilleurs amis...
Comment perdre ses amis : être en haut de l'affiche...
Lui demander de faire du Michel Serrault dans du Thomas Bernhard, ça vous en donne une idée des "conneries"...
Michel Fau c'est Michel Fau et Michel Serrault il en a entendu des "conneries" quand il jouait l'AVARE comme LA CAGE AUX FOLLES...

Je vous dirais comment résister chacun à sa façon, mais dans le jeu rester soi , c'est cela le boulot, et s'en tenir aux raccords, notes du metteur en scène, car la pièce, le rôle, c'est celui là à ce moment là... SELON SON DIAPASON.
Il faut tenter de ne pas se laisser influencer par les avis critiques réactions fussent-elles de proches de connaisseurs, de personnes faisant vos références en la matière :
-Michel Fau vient te voir et il te dit : IL FAUT TOUT CHANGER...
-Il est bien la dernière personne qui me dirait une chose pareille. Il est très à l'écoute des acteurs parle de prendre plus de plaisir, de maîtrise du tract, pour lui le tract est une marque d'orgueil point... il indique ce qui est modifiable et utile, précise toujours en accord avec le metteur en scène : c'est par exemple utiliser un chapeau pour signifier un changement de personnage...
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L'ignorant et le Fou suite et fin...
Je l'ai vue hier soir, 10/11/2007 ; cette pièce est un sommet, un comble des vanités. La mort, le Génie, poussières de déchetterie de vies.
Michel Fau a le rôle principal, comme on disait, Bertin et Valadié lui donnent la réplique. Aucune tendresse de garantie. C'est quelquefois drôle. Le metteur en scène est très jeune. L'acteur qui joue le/la serviteur, est d'une exactitude de funambule. Le décor, les jeux tout concoure à l'exacte, l'intime compréhension de la pièce.
Et ce qui m'a troublé, c'est que c'est une pièce sur l'isolement total de "la créature artistique" arrivée au paroxysme de son art...
C'est très difficile de jouer sa propre faiblesse, trame, voir âme... à même soi.

Il y a comme cela des acteurs de théâtre qui dans leurs pièces jouent leur vie, leurs fantômes, leurs désespoirs, leurs haines, leur mort...
Et là, si je suis partie en courant à la fin, après avoir marmonné un bravo que je lui devais bien. C'est que j'ai eu très froid...
Il est incroyable : d'une étrangeté palpable, dur, froid, élégant, il se met presqu' à genoux pour baiser la main de la Diva. Le texte est extrêmement difficile et pourrait être le sien quand il parle des conservatoires qui manipulent, triturent, étouffent les voix ; du manque d'imagination du public, quant il lui tire la langue...
Oui j'avais l'impression de voir Michel FAU jouer sa propre VIE. Les gens qui l'attendaient je n'en connaissais plus aucun. Des acteurs de théâtre comme Bertin et Valadié lui donnent la réplique...
Bien-sûr, il ne risquait pas de me les présenter, tant mieux.

Avons-nous été du même monde après ses sorties de scène ? une fois oui mais nous jouions ensemble et sur scène et la confusion des sentiments, chaque soir.
Suis-je jalouse ou malheureuse de l'avoir perdu définitivement. Quoique nous sommes dans des galaxies parallèles.

Ce qui m'a étonné, c'est que le début du texte de la pièce, c'est comme le début de cette page, il lit des critiques diverses et contradictoires à propos de la Diva qui interprète la Reine de la Nuit dans la Flûte Enchantée de Mozart. Il y va, il se la donne, c'est un Prométhée enchainé.



Si quelqu'un tombe sur ce blog et le connait présentement ne doutez pas de lui, c'est un artiste et un transmetteur voir un professeur de génie aussi. Il est dur intransigeant "impitoyable" mais on lui doit beaucoup... m'ont dit ses anciens élèves.
"Impitoyable" ai-je réfléchi toute la semaine...(ça tient compagnie, dans le froid tout en pédalant ! et juste sur ces grèves, "dans le mot grève il y a le mot rêve", j'ai toujours aimé les grèves, agitatrices des masses inertes...et les difficultés inconvénients fatigues qui en découlent, ce n'est pas non plus la Guerre et quand il n'y en aura plus de grèves il risque de ne plus en y en avoir de rêves)
pourquoi, j'ai repris ce terme car il est répété plusieurs fois dans la pièce par le père qui se plaint de sa fille... mais surtout aussi parce que Michel ne s'apitoie sur personne.

Et dites lui aussi que je l'embrasse fort et qu'à n'importe quel moment de solitude exagérée, il peut m'appeler pour boire un verre à sa santé qu'il faut absolument préserver. Au sens réel comme au figuré. Mais quand tout va bien voir très bien, quand nous aimons vivons jouons travaillons avec les élèves, les personnes aimant aimables ouvertes au théâtre ; ne pouvons-nous pas passer comme jadis une grande soirée en toute amitié avec une ballade l'hiver jusqu'au restaurant.
Cette fois j'ai mis le point sur l'origine du malaise, à le voir jouer dans cette pièce L'ignorant et le fou : que je n'arrive pas à gommer d'un poil à retrancher d'un mot d'une émotion. C'est parce que dans cette pièce, ils dînent et sont servis comme au restaurant, c'est réaliste et ça ne l'est pas, mais j'ai reconnu plein de petits gestes, comme celui qu'il a de servir le vin, d'utiliser son couteau sa serviette... Et j'ai superposé souvenirs réalité et scénographie et c'est très désagréable de voir un ami isolé dans un tel trio... même avec un tel brio(je n'ai pas pu m'empêcher mais c'est bon signe, je remets la distance salutaire au rire au cinisme et à l'ironie du sort et du destin.

En attendant il jouera le "trop rare Michel Fau" au cinéma dans cette comédie parait-il très réussie, sortie 14/11/2007 : Faut que ça danse de Noémie Lvosky.
Qu'attendent-ils ces réalisateurs apeurés, ces directeurs de casting sans imagination, ces productions paralysées par leurs réseaux.

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