samedi 3 mai 2008

"BEAUCOUP DE BRUIT POUR RIEN" de SHAKESPEARE adaptation Philippe Honoré mise en scène Philippe PERSON

Je sais, "je ne suis pas venue vous dire que je ne partais pas..."
J'étais où ? Partie réfléchir sans pare-feu, clavier, écran, téléphone...
Donc dans ces cas-là je rédige (toujours mon besoin d'écrire) des lettres
que je classe dans mon petit bouquin jaune : journal, récépissé de réflexions,
écrites toutes entre 9h30 et 11h du matin...
Des lettres qui n'arriveront pas à leur destinataire,
l'envie du bruit du stylo sur le papier qui court comme une danse,
un dessin ininterrompu, une ligne de vie...

et qui commencerait par : "Monsieur, Madame, metteur en scène,
je vous écris une lettre que vous lirez peut-être si vous avez le temps"
Pourquoi m'avoir chassée de votre vie? de ma vie à la Scène...
Vous êtes devenus des chefs d'entreprises, on s'est perdus...


-T'as fait quoi ?
-Toujours pareil : j'ai été voir au théâtre, à propos de bruit, au théâtre LE LUCERNAIRE


Beaucoup de bruit pour rien...

Selon GILLES COSTAZ dans les Échos
Et nous savons que les titres comme les pièces de Shakespeare sont anguleuses, difficiles à monter
-ET...
-j'ai beaucoup aimé
et comment me direz-vous :
-peux-tu être objective ?

Parce que ce mot vous le savez est basé sur une notion qui n'existe pas.
Parce que c'est mon libre arbitre et que cette valeur pour moi de liberté veut dire quelque chose plus aujourd'hui que jamais.
Et j'ai beaucoup aimé, j'ai ri du propos et des jeux facétieux étincelants des acteurs
de l'impertinence de la mise en scène : politiquement incorrecte
de la beauté des femmes un peu comme dans les films de David Lynch : Mulholland Drive
ou dans ceux de Wong Kar-Wai : In the Mood for Love...
Shakespeare oui aux États-Unis, cela ne gène aucunement.

Shakespeare n'était pas un frileux, c'est un théâtre qui doit déranger et comment peut-on si souvent encore le réfugier dans des mises en scènes classiques.
Pourquoi ? parce que Shakespeare s'est transformé souvent en un livret d'OPÉRA, si l'on sait trouver les musiques et vous pouvez lui faire confiance à Philippe Person, pour les B.O.

Et comme vous le savez aussi, on ne peut rêver pas cauchemarder, voyager, se projeter
actuellement sans faire référence au cinéma. Il devient à sa façon le chef d'orchestre de nos vies. Pour certains, pour beaucoup d'autres c'est la télévision, pour des exceptions c'est encore les tableaux, la peinture.
Quand je lis un roman je fais ma distribution et le personnage tout le long de l'histoire de ses bribes de ses paillettes de vie je l'affuble de la tête d'Harvey Keitel ou de Klaus-Maria Brandauer...
-Que lit t-elle ?


A propos de grands acteurs, dans cette mise en scène, il y a un grand comédien c'est Emmanuel Barrouyer pour cette légèreté qui se mue en tragédie par accès, excès, accents.
Il a toujours su tout faire : jouer, danser, chanter, briller de mille costumes les plus souvent composés par lui-même.

Les femmes y sont belles et biens comme sous un feu d'artifice.
Emmanuel Barrouyer est époustouflant les autres rôles d'hommes sont moins porteurs mais ils sont très bien portés.

C'est une comédie américaine musicale et aussi un mélodrame revisité à la façon de "Loin du Paradis" de Todd Haynes film et réalisateur d'exception infiltrant le cinéma par le théâtre.

Eh bien voilà Monsieur Philippe Person est un infiltreur, il infiltre tous les genres et reste strict dans ses références années 50-60 et non pas 70, pour cette création, il brouille les cartes comédie tragédie mélodrame.

Le méchant frère joué par Olivier Guilbert nous fait penser à un vétéran, à un parrain.

Oui car dans un décor minimaliste étincelant de Vincent Blot, nous avons toute liberté de faire virevolter toutes les images. Il faut une chambre obscure pour infiltrer d'autres images et les rideaux noirs, le manque d'espace et qui sait de production sont une porte ouverte une liberté ajoutée prise par Philippe Person pour inventer.


Et politiquement ce n'est pas de la nostalgie ce n'est pas la franche rigolade sur le retour aux anciennes valeurs comme celles défendues par les Évangélistes américains qui prônent aujourd'hui la virginité avant le mariage, la lutte contre l'avortement en enrôlant des enfants...

Là ce n'est pas l'apologie du mariage, de l'honneur, de la virginité...c'est un questionnement profond et léger à la fois, sur toutes les lois du temps qui passent sur les modes amoureux...

Puissions nous nous faire abuser et choisir d'aimer et que tout enfin puisse quelquefois se terminer par des photos et des chansons.
comme Nicolas Cage qui chante Love me Tender sur la bagnole dans Sailor et Lula du toujours même David Lynch.

Écouter cette chanson, elle est reprise dans la pièce, sans pleurer est difficile... voir "no possible".
Résister c'est aussi continuer de rêver pour une certaine Mrs America.

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