jeudi 12 novembre 2009

Marie NDiaye, Daniel Mesguich, Luc Bondy Auteurs Acteurs Metteurs en scène...



Je viens de finir l'échappée ! pardon lapsus, L'effacée, joli titre -émanation de la psyché d'un comédien metteur en scène- titre du livre de Daniel Mesguich directeur du Conservatoire d'Art Dramatique et j'entame un morceau de choix qui a reçu le Goncourt et que j'avais ramené avant la distribution des prix dans notre maison : Trois femmes puissantes de Marie NDiaye (qui fait très bien de maintenir ses déclarations contre le gouvernement) quelle patte, quelle chair de style, quel livre dès les premières pages, j'ai été saisie. Elle a écrit des pièces de théâtre.

Et voilà un autre livre que j'aimerai à lire ensuite : À ma fenêtre de Luc Bondy
11 novembre 2009 blog Didier Jacob Nouvel Obs

Luc Bondy, les confidences du roi théâtre
Adulé dans le monde entier, Luc Bondy, le célèbre metteur en scène de théâtre et d'opéra, publie un roman, «A ma fenêtre» (Editions Christian Bourgois). Entre la première de «Tosca» au Metropolitan Opera de New York (première très chahutée par le public) et sa reprise à la Scala de Milan, Bondy va recevoir le prix de la Fondation culturelle Kythera, fondé en 2001 par Gabriele Henkel, et qui recompense chaque année des personnalités qui se sont distinguées dans le domaine des échanges culturels entre l'Allemagne et les pays latins. Après Patrice Chéreau, Claudio Abbado, Renzo Piano et Claudio Magris, c'est Luc Bondy qui est honoré cette année (remise du prix le 8 décembre 2009 à l'Ambassade d'Allemagne). Quant aux admirateurs du metteur en scène-écrivain, ils pourront assister à une lecture, par Yasmina Reza, des extraits de son livre le 30 novembre à 19 heures au Théâtre de l'Odéon. En guise de mise en bouche, Luc Bondy a accepté de nous recevoir, chez lui, à Paris...





Luc Bondy va bien. Oui, ce sorcier de la scène, agitateur du théâtre depuis quarante ans, et que l'on sait affligé d'une santé non pas fragile, mais catastrophique (il a récemment failli mourir, après de multiples hospitalisations pour cause de colonne vertébrale en loque, d'une infection nosocomiale), se tient droit comme un i, sans douleur apparente, sur le canapé de son appartement parisien, non loin du jardin du Luxembourg. Le tableau ne serait pas complet sans la tasse de café noir qu'il sirote à longueur de journée, et ses livres qui trament un peu partout. Ce jour-là, posés à côté de lui, on a vu des Sciascia (grand écrivain sicilien) qui se faisaient dorloter. Est-ce l'imagination, ou les a-t-on surpris qui ronronnaient de plaisir en compagnie de leur maître?

De la maladie de la vie, Bondy ne sait peut-être pas guérir. Créateur insatiable autant qu'éternel convalescent, il a cependant appris, au fil des années, à composer avec sa vieille amie souffrance. Au point de faire installer un lit sur la scène de l'Opéra de Paris, lors des récentes répétitions de «Yvonne, princesse de Bourgogne», l'un de ses derniers spectacles, pour diriger couché quand ses lombaires le faisaient trop souffrir. «Quand j'étais enfant, j'aurais voulu écrire, mais je m'interdisais de me mettre à mon bureau parce que j'avais des problèmes de dos.» Il faut donc remercier la Vierge et toute la Sainte Famille de l'avoir laissé achever «A ma fenêtre» (Christian Bourgois éditeur), une étourdissante partie de cache-cache romanesque où Bondy se livre sous l'identité d'un personnage qui lui ressemble: assistant d'un grand metteur en scène de théâtre, ce double (il s'appelle Donatey) tient que l'art dramatique, comme peut-être l'art tout court, arrive à son terme (il annonce avec humour la fin de la mise en scène pour 2014): «L'esthétique du théâtre évolue vers une direction que je ne comprends plus. C'est le culte de l'image, et je suis un homme de l'écrit. De toute façon, je veux pas devenir un vieux metteur en scène.»



Donatey, comme Bondy, vit dans l'attente de la douleur annoncée, et tient de sombres propos que l'auteur ne saurait démentir: «La mort me bondira dessus, encore plus imprévisible qu'elle ne l'est par nature. Ce sera plus la conséquence de mon caractère que celle d'une maladie.» D'où, peut-être, cet agenda boursouflé qui trahit la peur de mourir, à commencer par cette «Tosca» qui vient d'ouvrir la saison 2009-2010 du Metropolitan Opera de New York, et qui marque les débuts de Bondy au sein de la prestigieuse institution. D'où encore toutes ces pièces en attente de mise en scène (il annonce Euripide, Ionesco). On dirait que Bondy met tous les matins les bouchées doubles, comme si l'heure de sa dernière mise en scène était arrivée. «Quand on se demande quelle pièce on aimerait monter s'il ne devait pas y en avoir d'autre, forcément on en revient à Shakespeare. Prenez «Richard II», qui est un des plus beaux textes qui soit sur la déchéance. C'est si beau que tout vous retient de le monter, parce qu'on se demande quel acteur pourrait jouer un tel personnage. J'ai mis en scène à Vienne «le Roi Lear». Il n'y a pas une phrase qui ne soit époustouflante. Sur le temps, sur l'âge, sur la jalousie. Tout est là.»


Directeur du Festival de Vienne, Bondy multiplie les contradictions comme par crainte d'une existence trop rangée. Il saute d'une mise en scène à l'autre mais récuse cette image, qui lui colle à la peau, de papillon butinant à tous les râteliers. «Je peux être autiste comme tout sacrifier, en tant que metteur en scène, au travail de groupe, à la communication. Je peux être inattentif au reste du monde ou redoubler de vigilance au moment des répétitions. Ma vie est placée sous le signe de la schizophrénie contrôlée.» On ne saurait mieux dire: lui, dont l'arrière-grand-père, un des plus grands spécialistes de Goethe, dirigeait le Théâtre de Prague, dont le grand-père et le père (qui a fait connaître Gombrowicz en France) étaient de fins lettrés, est un autodidacte qui n'a pour tout bagage que son BEPC «J'ai l'impression que j'ai tant à rattraper», dit-il.

Perplexité devant la vie en général. «Les amis meurent autour de moi. L'isolation est biologique Bans mon iPhone, j'ai des téléphones de gens qui sont morts, et que je n'arrive pas à effacer.» Il sait être à la fois léger et grave, parle vite, mêle l'allemand au français, confie une très grande amitié pour Peter Handke (l'écrivain autrichien est en train de traduire en allemand «Hélène», de Euripide, que Luc Bondy doit monter à Vienne). Il a la tête ailleurs, souvent à «Tosca» qu'il va reprendre à la Scala: «La musique est incroyable, le premier acte est difficile mais le deuxième époustouflant, comme chez Shakespeare parfois, quand le dramaturge sacrifie tout pour ce prodigieux moment à venir.» Et sinon? Toujours les livres. «Ils jouent un grand rôle dans ma vie. Mais je ne sais jamais où ils sont.» Oui, en somme, les livres, encore une maladie."

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