vendredi 13 novembre 2009

A propos de cinéma... "Herbes folles" d'Alain Resnais et "L’Imaginarium du Docteur Parnassus" de Terry Gilliam/Bashung : ces 2 art. Blog Grenoble

Tout cela pour répliquer aux gens, voire aux amis,
un peu à l'emporte pièce répartie : à un cliché par un autre cliché,
aux gens qui parlent d'Internet et des Blogs, par là même qui parlent de leurs auteurs, comme des interdits de séjour à la qualité de l'œil critique et du style pour l'information.
Réponse à une facilité, comme si on doutait de l'imagination de certains solitaires effrayés par la lumière et la mise en évidence, la mise en vente de leurs greniers, bibliothèques, souvenirs journal, carnet de bord, tout à trac en vrac.

A l'origine j'aimais écrire des lettres et recueillir des articles de journaux pour les passer, pour entretenir une conversation d'amitié... et puis une fois quelqu'un m'a répondu : "je suis assez grand pour lire le journal... moi-même !"

Le Blog, celui-là, s'il y a quelques cendres... ce sont aussi d'Herbes Folles.
A propos du dernier film d'Alain Resnais que j'ai vu et attendu, j'en aime surtout l'idée et la composition et les références à quelqu'un comme Monsieur François Truffaut, c'est très bien et puis c'est rallongé pour moi, le terme n'est pas beau, mais cela a toujours fait partie de son style justement la cassure les ruptures du temps et des conventions. Oui, surement il faudrait que je le revoie.
Mais dans les monuments de ce cinéma que j'aime par dessus tout et qui me manque quelquefois plus que le théâtre... je vais courir voir aussi le dernier film de Terry GILLIAM, car en plus c’est l’homme qui dort dans notre lit qui me l’a fait découvrir et beaucoup aimer : ce réalisateur américain? !
Voilà donc j'ai trouvé sur internet "un petit bulletin" exigeant de Grenoble auquel je m'abonnerai bien si j'étais des montagnes et de cette région qui m'étreint car écrin de souvenirs et lieu de séjour d'amis en effet pétris d'imagination...vous me direz il est édité !
-aussi, un peu comme "la Terrasse"?!




L’IMAGINAIRE AU POUVOIR

"À l’occasion de la sortie de L’Imaginarium du Docteur Parnassus, portrait du plus obstiné des cinéastes de l’imaginaire, des délires de Monty Python aux galères de Don Quichotte… Christophe Chabert

Publié dans le n°728 - Mise en ligne : 11/2009L’œuvre de Terry Gilliam commence par des dessins découpés et animés sommairement, et s’achève (provisoirement) par un petit théâtre de marionnettes manipulées grossièrement dans la rue. La boucle est bouclée, se dit-on. Lui aussi, d’ailleurs. «Quand j’ai fini L’Imaginarium du Docteur Parnassus, je me demandais vraiment ce que j’allais faire après» dit-il lors de la conférence de presse donnée à Lyon au lendemain de la présentation du film. «Il fallait trouver un projet avec lequel je pouvais avoir autant de plaisir, qui exprimerait aussi bien ma vision du monde. J’ai repris Don Quichotte, et je me demande ce qu’il va être. Le film grandit tout seul, comme quelque chose d’organique, avec sa vie propre…» Gilliam revient donc sur les lieux du crime, ce tournage apocalyptique et ce film inachevé qui a scellé (avec l’aide du documentaire Lost in la mancha, un «unmaking of» stupéfiant) son image de cinéaste maudit. Une étiquette qui l’a poursuivie ensuite, jusque sur le tournage de Tideland (2005) où il en est encore à se lamenter sur les tuiles (pourtant très ordinaires) qui lui tombent dessus. Mais Gilliam a changé, et entend bien le faire savoir : malgré le décès de Heath Ledger pendant le tournage de Parnassus, il affiche un optimisme nouveau : «Les choses n’ont pas forcément tourné comme je l’aurais voulu, mais ce n’est pas une question de mauvais choix ; c’est la main du destin.»

L’imaginarium du cinéaste Terry
La main du destin ? On se souvient que, dans les animations de Sacré Graal (1974), un des films qu’il a tournés avec Monty Python, Dieu vient régulièrement donner un coup de main (et pas mal de coups de pied) aux protagonistes. Sans parler de La Vie de Brian (1979), qui raconte carrément l’enfance d’un Christ anglais aux fraises. Quant au Sens de la vie (1983), le titre même du film dispense de tout commentaire. Gilliam aurait-il des tendances mystiques ? Osons émettre cette hypothèse : ce qui l’intéresse, dans cette vision déterministe de l’existence, c’est l’idée d’un grand ordonnateur qui tirerait nos ficelles et qui ressemblerait beaucoup… à un cinéaste ! Le cinéma de Gilliam est de ce côté-là, celui de l’imaginaire, de la magie et de la poésie ; c’est un enfant de Méliès plutôt que des frères Lumière. Les Aventures du Baron de Munchausen (1988) repartait ainsi de l’origine foraine de son art, débutant dans un théâtre avec des effets spéciaux mécaniques et visibles, pour mieux s’échapper ensuite au grand air vers un spectacle d’illusions purement cinématographiques. Le lien entre les deux ? L’envie de fables et d’histoires extraordinaires. Tous les personnages des films de Gilliam ont ce besoin d’échapper à la réalité, par le rêve (Brazil, 1985), l’idéal (Fisher King, 1991) ou la drogue (Las Vegas Parano, 1998). Dans sa version noire, cette évasion onirique permet de fuir l’horreur, même si elle finit par nous rattraper — c’est ce film malade, insupportable ou fascinant, qu’est Tideland. Au bout du rêve, le cinéma de Gilliam trouve son point de synthèse dans la belle idée d’un «imaginarium» : non pas une machine à produire de l’image, mais la matérialisation d’un imaginaire enfoui que le créateur libère chez ceux qui en franchissent la porte.

Citizen Gilliam
On dit souvent de Gilliam qu’il est un cinéaste «visionnaire». Terme double qui désigne à la fois sa capacité à exprimer sur l’écran ses visions personnelles et de prophétiser l’avenir. Brazil, par quelque sens qu’on le prenne, est un immense film visionnaire. Cette libre adaptation de 1984 transposée dans un futur bureaucratique, totalitaire et rempli de «conduits» pose des questions toujours pertinentes 25 ans après sa réalisation. Gilliam le souligne avec humour : «Quand j’ai fait la promo de Tideland, j’ai promis de faire un procès à George Bush et Dick Cheney pour avoir pillé les droits de Brazil !» Cette angoisse du futur se retrouve dans un autre grand film de Gilliam, L’Armée des 12 singes (1995). Cette fois, c’est La Jetée de Chris Marker qui lui sert de base, mais Gilliam en fait un film sur le danger des utopies collectives. Chez le cinéaste, le futur ne fait pas rêver, et la science-fiction n’est pas son domaine ; il y préfère la fiction intime, quotidienne et personnelle. C’est pourquoi les héros de Gilliam sont des solitaires, en marge du monde dans lequel ils vivent, inadaptés aux codes sociaux qui les entourent. Ce sont tous des Don Quichotte luttant pour conserver le petit bout d’espoir auquel ils s’accrochent. Gilliam choisit de leur donner raison et de leur offrir le salut, que ce soit littéralement (Fisher King, Munchausen, Parnassus) ou plus ironiquement. L’image la plus forte de toute son œuvre est celle qui conclue Brazil : un homme attaché qui chantonne le sourire aux lèvres, entravé par le système mais libéré par l’imagination."
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VERTIGES DE L’AMOUR

"Un Jean-Claude Gallotta inspiré donne forme aux mots de Gainsbourg interprétés par Bashung : rien que pour le plaisir intense qu’il procure, L’homme à tête de chou s’impose déjà comme l’un des spectacles de l’année. François Cau
Impossible de faire abstraction de l’émotion entourant la création. Avec la responsabilité monumentale de devoir faire honneur à l’œuvre posthume d’Alain Bashung, Jean-Claude Gallotta est sous le coup d’une pression que bon nombre d’artistes doivent cela dit lui envier. Il s’en serait fallu de très peu pour que ce magnifique cadeau se transforme en héritage empoisonné, on en connaît qui auraient botté en touche, qui auraient opté pour une transposition littérale de la narration sans se poser plus de questions, s’effaçant derrière la puissance d’évocation sidérante de la bande sonore. Au fil des répétitions ayant suivi la disparition de l’icône, Gallotta a dû réviser de fond en comble ses partis pris de départ, pallier l’absence monstrueusement envahissante de son narrateur, ne pas donner à l’ineffable beauté de son enregistrement une tonalité trop sépulcrale. Gommer les aspérités, les facilités, interroger son propre style pour offrir la chorégraphie la plus harmonieuse possible. On savait le directeur du Centre Chorégraphique National de Grenoble en plein questionnement artistique, comme pouvaient en témoigner les détours théoriques de ses dernières créations, leur rapport très perturbé au corps. Sans tergiverser, Jean-Claude Gallotta a choisi de foncer dans le tas, de vider son plateau, d’assumer l’énergie et la sensualité du texte, de se lover dans ses sublimes excroissances rock avec un culot qui lui sied merveilleusement bien et qui, surtout, respecte formidablement la liberté de l’œuvre originale.

Volutes en fusion
Prenons une première chose pour acquise : l’appropriation de l’album de Serge Gainsbourg par Alain Bashung est une réussite totale. Miracle de cette prise unique, enregistrée d’un bloc et dont les contours instrumentaux ont été retravaillés en aval, elle sonne comme le zénith artistique du chanteur. Sa voix se fait l’écrin parfait de cette romance barrée, aux images fécondes, à la langue aussi malicieuse que sulfureuse. Sur certains passages, Bashung s’aligne même sur le timbre si particulier de Gainsbourg, sans que l’exercice ne passe pour autant pour de la simple parodie – on atteint dès lors une fusion organique entre les deux personnalités artistiques laissant pour le moins pantois. Au sortir d’une intro pudique où le spectre de l’absent, figuré par une chaise vide, est évoqué avec délicatesse, Gallotta élabore un premier tableau survolté, où les quatorze danseurs se déploient en jouant avec grâce sur les perspectives. On retrouve un chorégraphe ludique, respectant sa matière sonore sans en être esclave, en pleine possession de la chose dansée. Ce plaisir chorégraphique instantané couplé à la découverte de la fabuleuse bande son est à même de rassurer illico les plus sceptiques, et de faire se hérisser les poils des plus réceptifs - oui, ce fut notre cas. D’où l’avalanche de superlatifs.

Les amants magnifiés
Le reste du spectacle parvient à garder intact cette vitalité, à empoigner à bras le corps sa poésie pour la transfigurer. Histoire d’amour improbable, vouée à l’exaltation sexuelle et passionnelle en attendant son issue fatalement funeste, L’homme à tête de chou dévoile ici toute la richesse de son univers en une succession de tableaux ne faisant jamais retomber la tension narrative. Jean-Claude Gallotta œuvre dans le suggestif, puis dans l’incarnation lascive des jeux érotiques des deux amants : le passage illustrant l’orgiaque reprise de Variations sur Marilou nous fait littéralement découvrir le chorégraphe sous un nouveau jour, passionné, sensuel, ludique dans sa façon de gérer les interactions entre ses danseurs – sans se renier, bien au contraire, mais en incorporant ses touches personnelles et autres gimmicks à une dynamique plus marquée. Duos et trios se font les reflets naturels de cette liaison forcément déraisonnable dont Bashung nous narre les errements, les moments de grâce. La fluidité de l’ensemble ne laisse aucun moment de répit au spectateur, happé par la cohérence d’un spectacle à voir et à revoir pour en saisir toutes les résonances. On peut aussi, et c’est encore le mieux, se poser dans son siège, laisser l’atmosphère sonore nous étreindre et jouir encore et encore de la saisissante complémentarité des univers artistiques en présence."

L’homme à tête de chou

Du 12 au 15 novembre, au Grand Théâtre de la MC2 Grenoble

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