lundi 29 octobre 2012

un tout petit livre noir : La voix de Samuel Beckett. Didier Anzieu, Stéphane Auvray-Nauroy/Monologue et Cinéma/Amour de Michael Haneke

"Après la lecture de l’œuvre de Didier Anzieu sur Beckett, le choc a été tel pour moi que je n'ai eu de cesse depuis de vouloir l'adapter en monologue pour la scène.
Ce texte dont Jean-Bertrand Pontalis a dit en substance qu'il n'était pas "un livre de fou", mais "un livre fou", est d'un tel foisonnement littéraire, psychanalytique,ludique et tragique, que toute adaptation en est nécessairement réductrice.
Il est néanmoins possible d'espérer que le travail de l'acteur, qui est celui du lien entre la parole et le corps, redonne à ce monologue l'ampleur et la richesse de l’œuvre originale."
S. A.-N.

Je viens de découvrir pourquoi j'ai laissé si longtemps ce petit livre noir à l'extérieur de moi et par ricochets pourquoi, je ne suis pas allée voir Stéphane jouer dans ce monologue. Les deux raisons ne sont pas liées.... La première c'est que j'ai peu écrit encore et surtout peu donner à lire sauf quelques rares fois dont une adaptation, justement que j'ai eue confié  à S. A.-N pour le théâtre et lui ne m'a jamais répondu. Elle n'est pas publiée (à part ici sur ce blog, donnée à voir ? dans les pages personnelles, c'est le cas d'une extatique étudié par le professeur Janet, adaptation d'un ouvrage sur les débuts de la psychanalyse puisqu'avant Freud, cette adaptation est dans mes pages personnelles) son titre "de l'Angoisse à l'extase".

Pourquoi je ne suis pas allée le voir jouer, parce que cette année là en 2008, à cette date là, je n'étais pas sur Paris ? mensonge :1 et que le théâtre est tellement éphémère ! mensonge 2 -justement, il s'est rejoué en 2011! 
Et voilà ! parce que quand on sait qu'on aurait du, ou qu'on voulait y aller, mais qu'on s'est laissé détourner de sa volonté première, il y a comme un carrefour de désirs contrariés qui font mémoire, de sa propre volonté évidée, de prémices préliminaires , il reste dans notre passé comme un trou obstrué, une question sans fin, une petite érosion de la peau qui ne se referme pas et qu'on arrive quelquefois à réparer par les mots, paroles délivrées par le jeu... le corps la voix l'écrit font une nouvelle trace des fuites du temps, elle recouvre ; car le temps ne fuit pas seulement dans la perte, s'il y a échec ou interruption ?une autre personne a la seule évocation, un enfant devenu grand peut rouvrir le livre et s'y remettre à la place, à la page en apparence blanche.

DU 5 AU 9 JUILLET 2011 DU MARDI AU SAMEDI À 19H30
LA VOIX DE SAMUEL
BECKETT
DE STÉPHANE AUVRAY-NAUROY
D’APRÈS BECKETT DE DIDIER ANZIEU                                                         DURÉE 45 MN
Un jeune auteur, fasciné par l’œuvre et la personnalité de Samuel Beckett, au point de
s’amuser très sérieusement à revivre l’expérience psychanalytique de ce dernier, se laisse
contaminer par la folie du langage et trouve à son tour sa propre parole et sa propre voix.
mise en scène Stéphane Auvray-Nauroy avec Julien Kosellek assistant à la mise en scène Mathieu Mullier lumière Xavier Hollebecq administration Romain Kosellek production estrarre Beckett est édité au Seuil / Archimbaud La Voix de Samuel Beckett est édité chez Séguier /Archimbaud Une forme courte de La voix de Samuel Beckett a été présentée dans le cadre de A court de Forme 2008 à L’étoile du nord.

http://www.estrarre.fr/flyer%20onplt2011.pdf
http://www.lecoleauvraynauroy.fr/blog/?tag=la-voix-de-samuel-beckett

EXTRAITS : pourquoi je me suis arrêtée à la page 20 24-
pourquoi mon attachement à Beckett quand il me fait mal ?


"Sur le pas de la porte je souligne à Michel(prénom du patient) la nouveauté de son propos et je termine par une invitation encourageante : "à suivre".
J'aurais du penser qu'agir ainsi avec un obsessionnel était le meilleur moyen pour que la suite ne vienne pas. En effet il ne revint pas à la deuxième séance.
De retour pour la 3ème séance de la semaine , il avoue avoir volontairement manqué.
Il n'avait plus envie de venir.: "A quoi bon faire des efforts ?" Il s'est senti plus que jamais malheureux.
La psychanalyse ne le guérira pas de sa tristesse."
 Paroles du même patient : Michel.(suite)
-Ma mère n'était gentille avec moi que quand j'étais malade.
Paroles de la mère du dit Michel. : Si vous allez-mieux, je ne m'occuperai plus de vous. (Autant rester malade)
- Ma mère a toujours refusé mon indépendance. Je devais vivre avec elle." 

pourquoi je me suis arrêtée à la page 24-
pourquoi mon attachement à Beckett quand il me fait mal ?

pourquoi je me suis arrêtée à la page  42-
"Sommes nous deux, voire plusieurs ?
Ou bien serait-il seul ? Et moi rien.
Moi sans rien dire, sans pouvoir dire.
Sans avoir à dire.
Moi ou lui ? Ou personne, que des mots muets  ?
N'étant rien, je n'aurais rien à dire à moins que pour la même raison il n'ait rien à me dire.
Tenir haute entre lui et moi cette tenture de silence. Entre moi et mon dire. "

Didier Anzieu chez Pivot
Dans l'adaptation qu'a faite S. Auvray-Nauroy intitulée : La voix de Samuel Beckett en un monologue pour le théâtre de l’œuvre de Didier Anzieu, Beckett, ce petit livre noir est une bombe(éditeur : Séguier Archimbaud).
une histoire d'amour avec les morts.... une histoire d'amour qui prend le risque d'épouser la folie de l'autre et ainsi en sortir de soi, une voix singulière qui change la vie.

Et donc je pense à AMOUR de Michael Haneke
le subterfuge de ce film : si on peut en imaginer un, c'est voyons la gifle unique qu'a du donner Trintignant à son Ève et en donner ces images.

après des journées et des nuits d'incubation, 
après avoir écouté des critiques en poste-vision audition ressenti sans larmes de ce film, ce film qui m'a comme fait aller plus loin dans l'amour et la lucidité sur la vie de couple, dans ma vie. 
Dans ma vie, une nouvelle référence est née, grâce aux jeux particuliers des deux, voir trois comédiens qu'on oublie totalement au (comment dire) au profit des personnages. C'est l'antidote à la culpabilité des enfants,  pour l'isolement dans lesquels on pense laisser les vieilles personnes en couple, alors que de les voir n'apporte plus ni échange ni affection ; je me dis qu'il faut beaucoup d'amour pour arriver à ces extrêmes là avec cette qualité là de relation.
Mais il n'y a aucun jugement, ni contre champ attendu dans ce film, de la part de Haneke. Les tableaux, les rêves cauchemars ou lucides, la musique interrompue, les  2 pigeons qui entrent et ressortent sont les seules ouvertures de cet appartement, tellement il est plein de ce couple. La bande son des bruits familiers, la lumière atténuée de toutes les variations de sombres pastels, comme sur certains tableaux qui sont déjà là, sur les murs, capitonne,  ensevelit les vieux amants ensemble. C'est l'histoire de Roméo et Juliette qu'on voulait tant écrire avec cet ami, qui d'ailleurs n'a pas aimé le film, comme quoi !
 Jean-Louis Trintignant chez Vincent Josse
Et se dire sans jugement, que peu de personnes âgées, très âgées vont aller le voir ce film,  sont-ils capables même d'une caresse, aujourd'hui ? en serons-nous, nous-mêmes capables? Entre eux,  les murs de silence sont déjà énormes d'épaisseur, comme entre deux êtres perdus dans le brouillard, alors qu'ils étaient Roméo et Juliette, au début du jour de leur rencontre. 
 Mais revenons au paradoxe de ce film : pour qui le réalise t-il ?
Comme je me disais quand j'étais jeune : encore un film sur des riches.... et là je pourrais rajouter des gens riches extrêmement cultivés. Ce que je peux lui reprocher à ce film qui est un bijou de réalisation et de lumières et de bande son c'est qu'il sera moins populaire qu'À BOUT DE SOUFFLE mais plus populaire que le Décalogue ou Ginger et Fred ou Violence et Passion de Visconti. Il marquera notr époque comme un andélus sur l'occident. Mais mais quand nous y sommes allés voir ce film, sur 3 cinquantenaires, deux seulement ont aimé. Deux Pascal, mon ami et moi. Dans la salle il n'y avait pas grand monde et surtout des jeunes(au pass pour cause de cinéphilie et non pas pour s'engranger des images à  desennuyer.   Certains spectateurs ont quitté la salle. 
Merci aux journalistes, je pense à Vincent Josse, le contraire d'un gentil, qui m'ont incitée à y aller très vite, absolument. Enfin, c'est le film romantique dont j'avais un urgent besoin.


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